Après la signature de l’accord de cogestion de Kidal entre la Plateforme et la CMA, les deux mouvements ont désigné comme porte voix du consensus auquel ils sont parvenus, Moulaye Ahmed Ould Moulaye, secrétaire permanent du Mouvement Arabe de l’Azawad (MAA-Plateforme) et membre du Comité de suivi de l’accord de paix et de réconciliation issu du processus d’Alger. Quelle est la motivation qui explique le choix de cet homme à l’occasion de tous les événements qui ont failli mettre en péril la cohésion des deux coordinations ? Comment en est-il arrivé là ? Lisez plutôt le parcours de cet incontournable artisan de la paix.
S’il y a une qualité que tous les acteurs du processus de paix peuvent témoigner de Moulaye Ahmed Ould Moulaye, c’est sa constance dans son combat pour l’acquisition des droits des peuples du nord dans un « Mali, Un et Indivisible ». « J’ai compris tout de suite que les communautés du nord ne sont pas préparées à la création d’un Etat indépendant… », rappelait-il souvent à ceux qui pensaient le contraire. Nous étions en 1991 où il était secrétaire administratif du Front Islamique Arabe de l’Azawad (FIAA), qui a signé avec le gouvernement et le Mouvement Populaire de l’Azawad (MPA) de Iyad Ag Ghaly, l’accord de Tamanrasset, le 6 janvier 1991. Quelques mois plus tard, cet accord est remis en cause par un coup d’Etat, malgré les garanties du Comité Transitoire pour le Salut du peuple (CTSP).
Cet homme, connu pour sa discrétion, a longtemps œuvré pour éviter la dislocation de notre pays. Certains de ses compagnons qui étaient opposés à lui hier, sont aujourd’hui fidèles à la République. D’autres aussi n’ont pas hésité, plusieurs années après, à lui fausser compagnie.
Ancien membre du bureau de coordination des Mouvements et Fronts Unifiés de l’Azawad (MFUA), Moulaye Ahmed Ould Moulaye a apporté une contribution significative au processus de paix de 1991 à nos jours.
Conseiller occulte…
Qui est cet incontournable artisan de la paix qui joue à la fois le rôle de leader de la communauté arabe, mais aussi de conseiller occulte auprès du gouvernement, des mouvements armés et même de la médiation internationale sur les questions du nord, et particulièrement celles concernant les communautés arabes ?
En créant dans les années « 90 », le Front Islamique Arabe de l’Azawad avec, entre autres, Zahabi Ould Sidi Mohamed, actuel ministre de la Réconciliation Nationale, Ould Moulaye voulait mener un combat au sein de la République pour les droits des communautés du nord. Mais leur route se sépare, en 1994, quand Zahabi (secrétaire aux relations extérieures du FIAA) a voulu remettre en cause le pacte national. Le FIAA s’est finalement scindé en deux groupes dont l’un, favorable au processus de paix avec le Mali, suivra Moulaye Ahmed Ould Moulaye. L’autre branche accompagna l’actuel ministre de la réconciliation nationale dans sa croisade contre le Mali.
Moulaye et ses amis acceptent de « composer » avec l’Etat, d’où le qualificatif de pro-gouvernemental. Ils sont restés dans ce schéma jusqu’en 2012 où ils décidèrent de créer le Mouvement Arabe de l’Azawad (MAA) avec tous ceux qui constituent la dissidence du mouvement arabe, née en 2014 à Ouaga et qui a rejoint la CMA. Moulaye Ahmed Ould Moulaye est resté de marbre sur ses convictions : loyal et républicain.
Aussi, il a joué un rôle important dans le rapprochement des différents groupes armés du nord, notamment ceux de la plateforme dont il est un des acteurs clés. Ce n’est pas gratuit qu’à l’occasion de tous les évènements périlleux, Moulaye Ahmed Ould Moulaye soit désigné porte-parole de la CMA et de la plateforme, notamment à Ménaka, à Anéfis, à Kidal, et même à Alger.
Par son expérience et ses talents d’organisateur, Moulaye a contribué à donner une assise politique à la Plateforme. Qui a, sans doute, œuvré pour que le Mali demeure « Un et Indivisible ». A Alger et au nord, les responsables et les combattants de la plateforme ont tout simplement sauvé le Mali. D’ailleurs, c’est lui qui, en 2006, a organisé la communauté arabe au sein de la Coordination des Communautés Arabes du Mali (CCAM) dont il fut le secrétaire général. Comme un pressentiment, Moulaye avait évité à notre pays que les communautés arabes du nord soient impliquées dans la rébellion enclenchée, le 23 mai 2006, par Iyad Ag Ghaly.
Membre du comité de suivi du pacte national (1992-1996), Moulaye fut également membre du comité de suivi des accords d’Alger de 2006. Et depuis 2015, il est membre du CSA issu du processus d’Alger. C’est probablement ce parcours sans faute de l’enfant de Taoudéni qui lui vaut la confiance des deux plus importantes coordinations de mouvements armés du nord.
Idrissa Maïga