C’est au moment où le Mali vient de passer de la 122è place à la 118è selon le baromètre sur la liberté de la presse de Reporter Sans Frontière édition 2015, que notre confrère Birama Touré du journal « le Sphinx » disparait. Cette « disparition » d’il y a plus de 15 jours a indigné plus d’un acteur du monde médiatique ainsi que les défenseurs de la liberté de la Presse. Cette brusque disparition, si elle devait être confirmée, sans pointer un doigt accusateur sur quiconque, serait de loin une très mauvaise image pour notre pays.
Les questions classiques restent les mêmes, qui a intérêt et à qui un tel acte profiterait-il ? Venant d’un journal d’investigation aussi respecté que « le sphinx », les autorités sont-elles conscientes des multiples supputations que suscite une telle disparition sur l’image d’un régime déjà malmenée par les différents scandales à répétition ? La Sécurité d’Etat est vivement interpellée pour lever toute équivoque et rassurer les maliens que Birama n’est point enlevé ni inquiété pour ses écrits. Elle est la seule structure à même d’apporter ces éclairages qui la blanchissent autant qu’ils réhabilitent un pouvoir qui jusqu’ici n’a rien fait pour empêcher globalement la Presse de faire son travail.
La Presse malienne a le devoir de se mobiliser autant comme en Guinée où après la mort du journaliste Diallo, ses confrères avaient marché puis observé une journée sans journaux. C’était lors, d’un rassemblement des militants de l’UFDG de Cellou Dalein Diallo intervenue dans la première semaine du mois courant. Le ton vient certes d’être donné par la Maison de la Presse, qui a tenu une conférence de presse pour informer l’opinion publique nationale et internationale des démarches qu’elle a entreprises. Ce fut l’occasion pour elle d’interpeller les autorités à qui incombe le devoir régalien de protection de tous les citoyens. Au delà de la conférence, il revient aux organisations corporatistes de défense de la liberté de la Presse telles que l’ASSEP, le Groupement Patronal de la Presse, l’UNAJOM, le SYJOR, l’URTEL de faire bloc derrière la Maison de la Presse pour que le cas Birama fasse école.
Parmi les actions qu’il est possible d’entreprendre, nous pouvons citer une « journée sans presse », une marche pacifique, un sit-in à la primature, aux ministères en charge de la communication et de la sécurité ainsi que de la protection civile. Les maliens ne comprendraient pas que les autorités maliennes se soient si intensément mobilisées à commencer par le chef de l’Etat lui-même quand nos deux confrères français Claude Verlon et Ghislaine Dupont ont été sauvagement assassinés à Kidal. Nous attendons un tel cri de leur part pour que la lumière soit faite sur cette inquiétante disparition, la première du genre au Mali où on était habitué à voir les journalistes interpellés ou kidnappés, tabassés ensuite relâchés que disparus sans nouvelles.
Vivement donc le retour de notre confrère du « Sphinx » Birama Touré parmi nous.
Youssouf Sissoko