PARIS - Avec 2.150 soldats français sur le terrain, l`intervention militaire au Mali est déjà l`opération extérieure en cours la plus importante de l`armée française, devant l`Afghanistan.
Deux opérations très différentes, malgré quelques points communs qui alimentent la crainte d`un "nouvel Afghanistan" au Mali. Après la prise d`otages en Algérie, le Premier ministre britannique David Cameron a ainsi évoqué dimanche une lutte "qui prendra des années, voire des décennies" contre le terrorisme dans la région.
- Les motifs de l`intervention.
Comme en Afghanistan, il s`agit de s`en prendre au terrorisme. "La comparaison avec l`Afghanistan n`est pas très opératoire" mais "il y a quand même une analogie, c`est la lutte contre le terrorisme", a souligné le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Après les attentats du 11 novembre 2001 il s`agissait de lutter contre Al-Qaïda en Afghanistan,
aujourd`hui de s`en prendre à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et les autres groupes islamistes présents au Sahel.
"Si la sécurité de l`Europe se jouait dans les montagnes afghanes, elle se joue plus sûrement dans la zone sahélienne", résume le général Jean-Paul Thonier, chef de la mission européenne Artémis en 2003 en République démocratique du Congo.
- La France en soutien.
Officiellement, l`armée française n`a pas vocation à être en première ligne au Mali, où elle est intervenue pour aider l`armée malienne à bloquer l`offensive vers le sud des combattants islamistes. Elle doit participer ensuite à la reconstitution des forces maliennes et à la formation de la force des pays de l`Afrique de l`ouest, pour passer au plus vite le relais aux
soldats africains.
Même approche qu`en Afghanistan, où les soldats français et de l`Alliance atlantique ont formé les unités afghanes pour leur transférer, avec plus ou moins de succès, la responsabilité de la sécurité du pays.
- Deux univers géographiques.
Au Mali, une grande partie de opérations aura lieu dans des zones désertiques, vides de population sur de très longues distances. En Afghanistan, les Français étaient au contraire chargés de la sécurité de zones géographiques limitées, de l`ordre d`un département français, au sein d`une puissance coalition.
"C`est une guerre de mouvement", a souligné dimanche Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, dix jours après le début de l`opération française au Mali. Selon les spécialistes, les forces françaises vont tenter de stabiliser le front dans le centre du pays pour empêcher toute nouvelle avancée des
islamistes.
- Une armée adaptée au terrain, des islamistes bien armés.
La plupart des unités françaises déployées au Mali ont servi en Afghanistan, où elles ont acquis une longue expérience des situations de combat. L`armée française est rompue aux opérations en terre africaine et a déployé du matériel léger (chars Sagaie, transport de troupes VAB et VBL, VBCI...) adapté au terrain. Les bases françaises en Afrique de l`ouest (Gabon, Tchad, Burkina Faso...) lui assurent en outre des points d`appui pour la logistique et le ravitaillement.
Contrairement aux talibans en revanche, dont l`armement était rudimentaire (Kalachnikov, lance-roquettes, engins explosifs...), les groupes islamistes au Mali sont fortement armés, en armes légères, mitrailleuses lourdes et probablement quelques missiles sol-air récupérés en Libye qui constituent une menace pour les avions et hélicoptères français.
- La population
Contrairement à l`Afghanistan, où les talibans pouvaient se fondre dans les villages et bénéficiaient du soutien d`une partie de la population, les habitants du nord du Mali sont globalement hostiles aux groupes islamistes. A Bamako et dans le sud, l`arrivée des troupes françaises a généralement été bien accueillie.
- La durée de l`opération.
Les troupes de l`Otan sont en Afghanistan depuis plus de onze ans. Au Mali,
la durée de l`opération française est la grande inconnue. L`objectif affiché est de transmettre dès que possible le relais aux Africains, mais, une fois constituée, la force africaine devra encore être étroitement soutenue et accompagnée.
"La situation n`est pas simple, mais elle semble beaucoup moins difficile à résoudre que celle de l`Afghanistan. Je ne pense pas qu`on éradiquera le terrorisme, mais on peut ramener la situation à un niveau supportable", analyse Eric Denécé, du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R).