Il été instruit à la direction générale des Impôts (DGI) de mobiliser, en 2016, 720 milliards de FCFA. Ce montant représente seulement une infime partie du potentiel fiscal de notre pays. Qui pourrait valablement financer son développement si les administrations financières travaillaient en synergie. La mauvaise collaboration entre la Douane, le trésor public et les Impôts du Mali, fait perdre à l’Etat des centaines de milliards de FCFA. Et malgré la multiplicité des impôts et des services de recouvrement, la direction générale des impôts réalise ses objectifs annuels seulement grâce aux impôts provenant des grandes entreprises, soit près de 80% de ses recettes. Le potentiel fiscal du Mali est tout simplement inexploité. Enquête.
Pour la réalisation de ses programmes, l’Etat mise beaucoup sur les services de d’assiette et de recouvrement (Douanes, Impôts…) en les fixant des objectifs annuels en termes de recettes. Des recettes qui représentent seulement une petite partie du potentiel fiscal de notre pays. La direction générale des impôts (DGI) pourrait, à elle seule, mobiliser plus de 1000 milliards de FCFA, contre seulement 720 milliards, son objectif de 2016, si l’Etat et les citoyens assument leur responsabilité. En un mot, si l’on engage une croisade contre l’incivisme fiscal.
En 2015, sur une prévision de 630 milliards de FCFA, la DGI a réalisé 631, 236 milliards de FCFA. Cette année, l’Etat lui a demandé 720 milliards de FCFA, soit une augmentation de 90 milliards de FCFA. Selon des sources proches de cette structure, l’objectif est bel et bien réalisable. Mieux, on peut aller au-delà si les administrations financières travaillaient en symbiose. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Les fausses déclarations cautionnées par celles-ci, la tricherie de certains contribuables, la corruption généralisée, entre autres, font perdre à l’Etat des centaines, voire des milliers de milliards de FCFA par an. Un magot qui pourrait lancer l’économie nationale et résorber la crise perpétuelle du chômage dans notre pays.
Pour atteindre son objectif annuel, la DGI mobilise ses agents à travers quatre sous directions, notamment celle des Grandes entreprises (DGE). Qui, à elle seule, a fourni, en 2015, près de 80% des recettes des impôts, environ 516, 236 milliards de FCFA, contre 50 milliards pour la direction des impôts du district (DID) ; 40 milliards pour celle des moyennes entreprises (DME) et 25 milliards pour les directions régionales des impôts (DRI). Elle pouvait faire deux fois mieux si l’incivisme n’avait pas gangréné notre société. Tenez-vous bien !
La loi 06-067 du 29 décembre 2006, portant code général des impôts, a fixé une panoplie d’impôts (directs et indirects) qui, dans une bonne gouvernance, pourrait favoriser l’émergence de notre pays.
Le code général des impôts énumère, entre autres, pour les impôts directs, ceux relatifs aux Impôts sur les traitements et salaires (ITS), les Impôts sur les revenus fonciers, l’impôt sur les revenus des valeurs mobilières, l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux.
S’agissant des impôts indirects, il y a la taxe sur les activités financières (TAF) (dont l’Organisation patronale des industriels du Mali (OPI) demande la suppression), la taxe intérieure sur les produits pétroliers, l’impôt spécial sur certains produits et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dont la mobilisation constitue la croix et la bannière pour les services d’assiette et de recouvrement. Tous ces impôts doivent générer beaucoup d’argent pour notre pays. Mais à cause du dysfonctionnement des services du recouvrement et la mauvaise foi des contribuables, l’Etat perd des milliards de FCFA chaque année. C’est la responsabilité des pouvoirs publics de créer les conditions adéquates pour récupérer ces milliards qui lui échappent à cause de l’incivisme de certains agents et d’opérateurs économiques véreux.
En 2015, la TVA qui est un impôt sur la consommation, représentait 170 milliards des recettes des impôts. « C’est dérisoire par rapport au potentiel fiscal du Mali », explique notre interlocuteur. Qui précise que beaucoup d’opérateurs économiques ne reversent pas la TVA au trésor public et n’hésitent même pas à l’utiliser pour fructifier leur propre business. Si elle est reversée normalement, la TVA pouvait générer entre 300 à 400 milliards de FCFA par an.
Il y a 5 à 6 ans, le Sénégal avait dépassé les 400 milliards de FCFA de TVA annuelle, contre 500 à 600 milliards de FCFA pour la Côte d’Ivoire. Certes ces pays ont certains avantages sur le Mali, mais n’en demeure que le Mali est aussi un pays de consommation.
Autre handicap auquel la DGI est confrontée, c’est bien la mauvaise collaboration des administrations financières. La Direction générale des Douanes et la Direction générale des Impôts sont les deux plus contributeurs au budget de l’Etat, avec respectivement des prévisions, en 2016, de 512 milliards et 720 milliards de FCFA.
Mais la collaboration entre ces deux structures nationales reste à désirer. Certains agents des douanes ne manquent pas, pour des intérêts égoïstes, de fournir contre espèces sonnantes et trébuchantes, des fausses déclarations aux impôts. Combien sont les importateurs qui ont des marchandises dépassant les 100 millions de FCFA, et qui payent l’impôt pour, au moins, la moitié ? De toute évidence, ils ne sont pas nombreux puisqu’ils bénéficient presque tous d’une certaine complicité des administrations financières. Une complicité, de part et d’autre, qui nuit à la mobilisation des recettes publiques, qui perdent chaque année, du fait de cette mauvaise collaboration, des milliards de FCFA. Du coup, il est souhaitable que des initiatives soient engagées pour favoriser une meilleure collaboration de toutes les administrations financières. Qui doivent œuvrer afin de communiquer les bonnes informations.
Aussi, pour récupérer les milliards de la TVA, des initiatives sont en cours, pour expliquer aux opérateurs économiques que l’argent de la TVA appartient exclusivement à l’Etat et qu’ils sont tenus de le reverser.
Idrissa Maïga