Depuis plus d’une semaine, que l’ancien Premier ministre Moussa Mara a décidé de rompre le silence en parlant ouvertement et publiquement de la visite mouvementée qu’il a effectuée à Kidal le 17 mai 2014, les sites et réseaux sociaux font de cette sortie inattendue, leur choux gras, comme on peut le constater sur facebook et diasporAction.fr. Pour Moussa Mara c’est « en tant que Premier ministre agissant sur instructions du Chef de l’État » qu’il s’est rendu à Kidal.
« Je n’interviens pas souvent mais, quelques fois, cela s’avère nécessaire, comme dans le cas présent au sujet des débats sur Kidal et mon déplacement dans cette région », écrit l’ancien Premier ministre Moussa Mara.
Dans un texte à l’ossature de six points, Moussa Mara assène ce qu’il avait sur le cœur, à l’allure de celui qui juge qu’il a raison, sur un évènement qui enfle la polémique, la désapprobation, et souvent la révolte : la visite à Kidal du chef du gouvernement malien le 17 mai 2014, qui a occasionné des affrontements sanglant entre les forces armées maliennes et les groupes armés, faisant des victimes en vies humaines.
Non reconnaissance à la Minusma
Moussa Mara indique n’avoir jamais demandé ou recouru aux services des forces onusiennes ou françaises. « Pendant notre séjour à Kidal, nous n’avons jamais demandé ou bénéficié de protection de SERVAL et nous n’avons jamais eu à faire à eux, deux de leurs hélicoptères étaient constamment dans le ciel de la ville, sans aucun rapport avec nous. Sur le sol, j’ai refusé le véhicule blindé de la MINUSMA pour emprunter la PRADO du Gouverneur avec ce dernier, pendant tous les trajets, y compris à notre entrée dans le Gouvernorat sous le feu des groupes armés. J’ai refusé de passer la nuit dans le camp de la MINUSMA quand cette dernière nous l’a proposé et, avec les Ministres et le reste de la délégation, nous avons passé cette nuit du 17 au 18 dans le camp 1 sous la protection des forces maliennes. À un moment donné, vers minuit, quelques forces de la MINUSMA, sans que nous l’ayons demandé encore une fois, sont venues se poster aux alentours du camp de l’armée malienne ». L’ancien Premier ministre Moussa Mara poursuit, « le matin, nous avons quitté le camp de l’armée malienne, sous escorte des forces maliennes et de celles de la MINUSMA pour aller prendre l’hélicoptère et venir à GAO ». L’ancien Premier ministre, sous le coup de quel délire ne sait-on, fait son récit comme s’il n’était pas arrivé à Kidal à bord d’un hélicoptère de la Minusma qui atterrit et ne décolle de nulle part ailleurs que dans le camp de la Minusma. Mais celui qui a décidé de prendre la parole, alors que pour certains, il a l’obligation de réserve, n’a pas cru nécessaire de s’allier l’honnêteté intellectuelle d’avouer que s’il n’avait pas compté sur les moyens des Nations-Unies, il n’aurait pas entrepris sa périlleuse visite. Moussa Mara ne reconnait pas que par son manque de sens de l’écoute, il a mis en danger, et exposer la vie de ceux qui l’accompagnaient ou qui sont venus l’écouter ou défendre la mission.
Comme à son jeu favori de se prêter aux mauvaises appréciations et de dire des contrevérités, l’ancien Premier affirme de façon péremptoire que « le principe de ce déplacement a été soutenu par tout le pays, je rappelle que le député Mody Ndiaye de l’opposition a été parmi les premiers à me demander à l’assemblée nationale quand est ce que je partirais à Kidal, c’était à l’occasion du débat sur la déclaration de politique générale à la fin du mois d’avril 2014 ».
Mody Ndiaye dément
Propos que le député Mody Ndiaye a d’ailleurs démenti sur sa page facebook, en ces termes : « L'ancien PM Mara s'est sérieusement trompé de personne en indiquant dans le récit qu'il fait de son aventure malheureuse à Kidal que moi Mody Ndiaye lui aurait demandé à quand son déplacement à Kidal? Et cela au cours du débat sur sa déclaration de politique générale. Il s'est trompé de personne car durant tout le débat sur sa DPG je n'ai prononcé une seule fois le mot Kidal à fortiori de lui poser la question relative à son déplacement… Il ya eu erreur sur la personne et mieux ce jour la consigne de vote de mon groupe était de dire non à cette DPG, et si cette tendance était suivie par la majorité, cela devait se traduire par la démission du PM. A titre de rappel après sa déclaration et son déplacement à Kidal, notre groupe parlement a déposé immédiatement une Motion de censure contre son gouvernement à cause de sa visite inopportune à Kidal », a écrit l’honorable Mody Ndiaye de l’URD.
Plus de 20 mois après cette visite à Kidal d’où le Premier ministre est sortie par la petite porte, Moussa Mara fait le ragaillardi et accuse le président Ibk d’en être le décideur attitré: « Nous avons prévenu tout le monde de ce déplacement mais ce que je me suis refusé à faire et que je ne ferais pas, c’est de demander la permission de me déplacer à qui que ce soit, en tant que Premier ministre agissant sur instructions du Chef de l’État, sur une partie du territoire national reconnue comme telle par tous, notamment les groupes armés qui avaient signé les accords de Ouagadougou, accepté les élections présidentielles à Kidal et participé, certains d’entre eux, aux élections législatives de 2013 ». Moussa Mara évoque-t-il l’accord de Ouagadougou sans en savoir le contenu ? Sans savoir que l’accord impose des obligations aux parties et que le pouvoir élu avait écarté, ne voulant dialoguer avec des rebelles avant leur désarmement ?
Duplicité
D’une part l’’ancien Premier déclare : « J’ai toujours compatis à la douleur de ceux qui ont perdu un proche ce jour-là ou qui ont été blessés. J’ai prié et je prie pour le repos de l’âme des disparus… Je ne me suis pas contenté de déplorer les morts et les blessés, j’ai engagé et je continue de le faire de nombreuses actions de soutien aux familles, dans la discrétion, comme je le fais depuis plus de 15 ans au bénéfice de nos compatriotes vivant difficilement. Cela n’est pas un motif de fierté mais simplement un devoir de citoyen que je me donne ». Et d’autre part : « Je ne me suis jamais excusé de quoi que ce soit dans ce dossier et je ne le ferais pas. Je ne me reproche pas de fautes pour m’excuser. Là également, ce n’est pas une bravade ou une indécence comme le dirait quelqu’un, mais simplement une attitude logique. J’ai fait mon devoir de responsable public en mission pour les populations et travaillant selon des principes républicains. Si je devais le refaire, je le referais évidement, sans provoquer qui que ce soit, mais en agissant avec détermination pour ce que j’estime être l’intérêt du pays et son honneur ».
Nulle part dans cette sortie, Moussa Mara n’évoque la question de justice pour les victimes, encore moins du traitement des blessés dont certains sont toujours dans l’errance sans trouver une prise en charge adéquate, encore moins du devenir des ayants droits des victimes. L’impunité semble être l’arrangement tout trouvé dans cette affaire. A suivre