Publié, jeudi dernier, par un quotidien de la place, sous le titre : « Le Bureau des Produits Pétroliers de la douane épinglé pour un manque à gagner de plusieurs milliards de CFA », un article a soulevé un concert d’indignation à la direction générale de la douane ; mais aussi, au Bureau du Vérificateur général. Lequel précise qu’il n’a effectué aucune vérification au Bureau du pétrole, durant l’année écoulée. A fortiori, y déceler un « manque à gagner de plusieurs milliards de CFA », pardon 3 milliards CFA.
« Les vérifications, rapportent nos sources, ont permis de constater un important manque à gagner au niveau de la caisse des recettes. Le gouffre serait estimé à plus de trois milliards de nos francs », indique notre confrère. En réalité, l’article d’une demi-page tient à ces deux phrases. Sans explication, aucune. Tout le reste de l’article est focalisé sur les missions du Bureau du Vérificateur général et ses rapports de 2013 et de 2014.
Le Bureau du Contrôle Interne de la douane dément…
Ce manque à gagner de « plusieurs milliards CFA », pardon ces trois milliards CFA de manque à gagner concerne quels produits ? De l’essence ? Du gas-oil ? Du pétrole lampant ? Il concerne quel mois ? L’article en question ne répond à aucune de ces questions. Curieusement. D’où l’indignation suscitée à la direction générale de la douane ; mais aussi, au Bureau du Vérificateur général.
« S’il y avait un manque à gagner au Bureau des Produits Pétroliers, nous serons les premiers à le savoir, avant même le Bureau du Vérificateur général. Le Bureau du Contrôle Interne de la douane (BCI) a été créé pour cela : déceler et enquêter sur tous les cas de fraude et de malversations », déplore un haut cadre du BCI, les yeux rivés sur le journal. Et d’ajouter, avec assurance : « Peut-être que le journaliste s’est trompé, de bonne ou de mauvaise foi. Une certitude absolue : le Bureau des Produits Pétroliers de la douane, en abrégé BPP, est le bureau le plus excédentaires de la douane. Ses recettes sont passées de 12 milliards CFA à plus de 19 milliards CFA par mois. Soit une hausse de plus 7 milliards CFA par mois. Et sa gestion est sans reproche ».
Et notre contrôleur interne de la douane de conclure : « Nous serions heureux de voir le rapport 2015 du vérificateur général auquel le journal fait allusion. Il n’existe pas, car le Vérificateur général n’a effectué aucune mission de contrôle au Bureau des Produits Pétroliers de la douane ».
Le Bureau du Vérificateur général, aussi
Même surprise au Bureau du Vérificateur général : « Contrairement à ce que j’ai lu dans ce journal, nous n’avons envoyé aucune mission, en 2015, au Bureau du pétrole. Et le rapport 2015, auquel le journal se réfère, est cours d’élaboration. Et il ne parle nulle part du Bureau du pétrole », assure notre interlocuteur, proche du « Végal ».
Choisi entre mille autres officiers de la douane, à cause de sa rigueur, l’actuel chef du Bureau des Produits Pétroliers a, de mars 2015, date de sa prise de fonction, à nos jours, insufflé une nouvelle dynamique à ce bureau. Qui réalise, à lui tout seul, la moitié – ou presque – des recettes de la douane.
Le Bureau des Produits Pétroliers en chiffres
Estimées à 12 milliards CFA, les recettes du Bureau du Pétrole sont passées à plus de 19 milliards CFA par mois. Soit une hausse de plus de 7 milliards CFA par mois. Autre exemple de la rigueur de l’actuel chef du bureau : avant son arrivée à la tête du bureau du pétrole, 52 millions de litres d’hydrocarbures sont déclarés à la douane. Dès sa prise de fonction, le nombre de litres déclarés est passé à 84 millions par mois. Où passaient donc la différence, c’est-à-dire les 34 millions de litres par mois ? Allez savoir.
Durant l’année écoulée, le bureau des Produits Pétroliers devraient réaliser 151 milliards CFA. Ce quota a été atteint dès octobre 2015. En décembre 2015, il a engrangé 189 milliards CFA. En clair, le Bureau des Produits Pétroliers a dépassé ses objectifs de recettes de 38 milliards CFA. Mieux, il a eu droit à une lettre de félicitation du ministre de l’Economie et des Finances d’alors : Mr Mamadou Igor Diarra.
Il a été, aussi, décoré de la médaille « Etoile d’argent du mérite national » pour avoir réussi la plus grosse saisie d’armes de l’histoire de la douane ; mais aussi, la plus grosse saisie de cocaïne pure dans notre pays : 116 kg. A l’époque, il dirigeait la BMI : Brigade Mobile d’Intervention (BMI) de la douane.
Comme chef du bureau des douanes de Kati, les recettes sont passées de 384 millions CFA à 4 milliards CFA par mois. On comprend, dès lors, pourquoi l’inspecteur général Modibo Kane Keïta, directeur général de la douane, lui a fait appel pour piloter le bureau du pétrole.
Le scoop a fait pschitt
Autre contrevérité relevée, par nos interlocuteurs, dans cet article : l’existence d’une « caisse de recettes » au Bureau des Produits Pétroliers de la douane. S’y ajoute le montant du prétendu « manque à gagner ».
S’agit-il de 3 ou de plusieurs milliards CFA ? Car le titre de l’article annonce plusieurs milliards CFA, avant de préciser, plus loin, qu’il s’agit de 3 milliards CFA.
Rappelons que le Bureau du pétrole ne dispose pas de « caisse de recettes ». Les recettes réalisées sont versées, chaque jour ou presque, au représentant du Trésor sur place. Lequel les rapatrie, à son tour, à la direction générale du Trésor.
Publié à la une comme le scoop de l’année, l’article intitulé « Le bureau des produits pétroliers de la douane épinglé pour un manque à gagner de plusieurs milliards de CFA » devrait, – du moins, si les faits étaient vérifiés -, faire l’effet d’une bombe.
Mais, contre toute attente, il a fait pschitt. Comme un pétard mouillé.
Oumar Babi