En marge des activités de la 12ème édition du Festival sur le Niger à Ségou, le Pr. Yacouba Konaté, Directeur de MASA Festival, a rencontré certains journalistes, afin d’échanger avec sur les grandes articulations de la 9ème édition du Marché des Arts du Spectacle Africain (MASA), qui se tiendra à Abidjan en Côte d’Ivoire du 5 au 12 mars 2016. Il a reconnu l’existence de plusieurs difficultés financières, mais elles n’empêcheront pas la tenue du MASA.
Pour cette édition, l'appel à candidatures aux groupes artistiques a été lancé. Ces groupes artistiques dont les productions relèvent de 5 disciplines, ont fait acte de candidature au MASA 2016. Il s’agit de la musique, du conte, de la danse, de l’humour et du théâtre. Il a nous confié que les préparatifs sont en cours, mais que c’est la question financière qui les a poussés à réduire certaines dépenses, surtout les billets d’avion, la taille des invités ainsi que les aspects secondaires de la manifestation.
Le Pr. Yacouba Konaté reconnaît que pour des manifestations comme le MASA, les difficultés sont comme des écoles, des étapes à franchir. C’est pourquoi, même celles de l’année dernière sont revenues cette année encore, notamment celle liée au financement. Mais il dira qu’à la différence de 2014, «nous savons pourquoi les financements ne viennent pas à temps voulu et nous savons comment faire pour que ça arrive le plutôt possible.
Il faut comprendre que l’année budgétaire est en train de commencer dans nos différents Etats et que l’aide publique et les financements n’arrivent que courant février. Alors que nous, nous devrons commencer à envoyer les billets. Nous essayons d’agir sur ces difficultés, notamment en utilisant au mieux les subventions, qui nous viennent du secteur privé, pour essayer de parer au plus pressé».
Malgré ces difficultés, le MASA a un grand retentissement au niveau international. 365 artistes sont sélectionnés pour le MASA Marché et 380 pour le MASA Festival. La règle dans le MASA Festival, ce sont les groupes eux-mêmes qui payent leur déplacement et dans le meilleur des cas, les responsables du MASA essayent de les accompagner, une fois sur place. Ce qui donne un effectif de 360 plus 380 ; cela, sans oublier les diffuseurs, les programmateurs ou les payeurs.
D’après le Pr. Yacouba Konaté, il était sûr d’avoir un groupe de 20 payeurs d’Espagne, 20 acheteurs du Maroc, 15 acheteurs, plus 5 journalistes de Belgique. Avec les Etats-Unis, ça augmente, selon lui, tous les jours, avec des groupes de payeurs et d’acheteurs. Ils étaient 50, les Américains au moment de notre entretien avec lui ; 2 de la Chine ; 2 du Japon. Il y aura au moins 20 acheteurs de la France. En plus de tout cela, il faut ajouter les directeurs de tous les grands Festivals de la sous-région. D’ailleurs, ces directeurs des Festivals de la sous-région vont tenir une rencontre à Abidjan, en marge du MASA. Cette rencontre sera coordonnée par l’ancien ministre de la Culture du Mali, Cheick Oumar Sissoko.
«C’est important que les Festivals deviennent les interlocuteurs des pouvoirs publics locaux, mais aussi des institutions régionales comme l’Uémoa, la Cédéao, l’Union africaine. Il faut qu’on entame un plaidoyer qui rende plus efficient le financement des politiques culturelles, via les Festivals qui fonctionnent, qui ont commencé des événements importants avec des agendas nationaux et internationaux», indique Pr. Yacouba Konaté. Il faut aussi dire qu’il y aura une forte présence de l’Union européenne à travers un panel pour communiquer sur les ACP culture. La Coalition mondiale des artistes pour l’Unesco sera de la fête et animera un panel. Sans oublier que l’Union internationale de la marionnette, par le biais de la section, va tenir une réunion importante.
«Il y aura beaucoup d’activités professionnelles. C’est pour cela que nous sommes obligés de tenir compte de l’engouement pour satisfaire tout le monde», explique le directeur du MASA. Au total, il y aura 70 spectacles pour le MASA 1, mais il risque d’y avoir une double programmation. Dans le MASA Festival, il y a 122 groupes, pour lesquels il y aura une programmation unique. Le tout va se dérouler au Palais de la culture d’Abidjan, qui compte plus de 5 salles de spectacles.
Le MASA va s’ouvrir, selon son directeur, à d’autres localités, avec des scènes. Cet élargissement est le souhait des organisateurs qui veulent partager leur professionnalisme. Il y aura Bouaké et Jacques ville pour donner l’occasion à un tourneur local de faire son travail dans sa localité. Cette question de proximité est, selon Yacouba Konaté, une faveur pour la viabilité des Festivals.
Pour ce qui est de la coordination entre les Festivals de la sous-région, Yacouba Konaté dira qu’elle a porté fruit. «Depuis quelques années, je suis membre du Festival sur le Niger et je suis aussi avec les Nuits Atypiques de Koudougou, Abidjan Festival et bien sûr, plus le MASA. Ces quatre entités ont mis leur effort en commun. Nous avons fait une demande de subvention commune pour acheter du matériel de sonorisation. Le matériel qui a été utilisé au Festival sur le Niger, est une propriété commune.
Ce matériel va être utilisé à Abidjan pour le MASA : c’est qu’on appelle le circuit mandingue ; ça montre qu’il y a des opportunités de financements privé et international. C’est la Fondation DOEN qui nous a facilité cette acquisition. Mais il faut aussi rentabiliser le matériel, parce que s’il aura vieilli, ce sera difficile d’avoir un nouveau», détaille M. Konaté. C’est dire que la mise en synergie des activités culturelles sous-régionales est une nécessité vitale, car pour rentabiliser les investissements, il faut les autres Festivals.
Les conditions et les grands chiffres
Cette 9ème édition va s'intéresser au thème suivant : «Arts de la scène: quels spectacles et quels publics ?» Le directeur du MASA donne l'exemple de la danse contemporaine qui se transforme de plus en plus, pour plaire à la fois à un public local et international. Prendront part à ce grand Festival, 2000 professionnels des arts et 100 troupes. À cela s’ajoutent entre 10.000 et 25 000 spectateurs.
Le village MASA abritera 50 restaurants, 50 stands d’artisans et 100 stands professionnels. Sont éligibles au titre du programme officiel de la 9ème édition du MASA, les créations remplissant les conditions suivantes : les spectacles datant de moins de trois (3) ans de facture patrimoniale moderne ou contemporaine ; les groupes dont l’effectif, y compris l’équipe d’encadrement et le manager, n’excédent pas 2 personnes pour l’humour, 4 personnes pour le conte, 8 personnes pour la danse contemporaine, 10 personnes pour la musique, 10 personnes pour le théâtre et 15 personnes pour la danse patrimoniale.
Aux dires de Yacouba Konaté, au regard de la dernière édition, la Direction générale du MASA a décidé d’impliquer le secteur privé dans le budget du MASA. Parlant des innovations, le directeur de MASA Festival a fait savoir qu’il y a trois (3) grandes innovations dans la 9ème édition, à savoir, le retour aux fondamentaux du MASA. À titre de rappel, il dira qu’au départ, c’était un Marché des arts africains du spectacle. Selon lui, pour cette édition, ils vont assumer cette disjonction en faisant du spectacle pour le grand public et aussi de petits rendez-vous avec les groupes artistiques pour un public réduit de professionnels. Toute chose qui permettra d’éviter la confusion entre le Marché et le Festival.
S’agissant de la 2ème innovation, le conférencier dira que cette édition sera mieux organisée que les précédentes. Pour ce faire, ils ont loué l’expertise de deux grands experts de l’un des grands Festivals au monde: le Festival d’Avignon.
Quant à la 3ème innovation qui se résume à l’économie du MASA, le conférencier a fait savoir qu’ils ont donné carte blanche à une Agence de communication qui est chargée de chercher des financements pour eux.
Parlant du budget prévisionnel du MASA 2016, le Pr. Yacouba Konaté dira qu’il s’élève à un milliard huit cent millions (1 800 000 000 Fcfa), dont 500 millions pour l’Etat de Côte d’Ivoire, 300 millions pour le District d’Abidjan et 200 à 300 millions pour l’OIF.
Il faut signaler que le MASA Arts a été créé en 1993 par l'Agence intergouvernementale de la Francophonie, alors que le Festival du Marché des arts du spectacle africain (MASA) est un Festival des arts vivants africains (théâtre, musique et danse), organisé tous les 2 ans à Abidjan. Notons aussi que le MASA a dû être annulé entre 2007 et 2014, à cause de la crise en Côte d'Ivoire.
Kassim TRAORE