Le processus de paix est en marche dans les zones géographiques du Macina et du Séno dont les populations peuvent dire, enfin, « Dieu merci ! ». Grâce à l’implication des cadres peuls et touaregs des régions de Mopti et Tombouctou et du collectif des députés de la 5ème région, au moins 500 disciplines du lugubre Amadou Koufa qui sèment la mort et la terreur sont en passe de déposer les armes et de rejoindre le processus DDR et de paix. Les leaders des djihadistes et les médiateurs ont rencontré les plus hautes autorités de défense et de sécurité du pays, à Bamako, pour poser les jalons de ce retour salutaire des tueurs silencieux dans le giron de la paix.
Les autorités et la nation maliennes doivent une fière chandelle à un général de l’armée. Il n’est pas l’initiateur du projet de retour des djihadistes égarés, mais il est au centre des discussions et de tout le processus pour le faire aboutir.
Ses atouts ? Il connait la mentalité des jeunes ; il connait leurs leaders dont il parle la langue ; il maîtrise leurs zones d’action ; il réalise les conséquences humaines des représailles et tous les risques et dangers de laisser la situation perdurer. C’est pourquoi, l’officier supérieur, très effacé et dont nous taisons le nom, a pris l’affaire à bras le corps dès que les communautés concernées ont décidé de solliciter leurs parents vivant à Bamako.
De quoi s’agit-il ?
La situation sécuritaire dans les zones inondée et exondée du Macina, le Séno, le Méma, le Guimballa, le Farimaké, jusqu’à la frontière burkinabé et la région de Tombouctou, est caractérisée par des attaques tous azimuts perpétrées par des jeunes taxés (à tort ou à raison) d’être des disciples de Amadou Koufa (chef du Front de libération du Macina), lui-même reconnu proche de Iyad Ag Ghali (chef rebelle d’Ançardine) qui a fait allégeance à Aqmi.
Les jeunes sont majoritairement des peuls, mais aussi des dogons, des Bellah, des bambaras et même quelques tamasheq. Ils ont été instrumentalisés par des leaders, proches d’Amadou Koufa. Tous les assassinats commis çà et là dans les zones susmentionnées sont de leur fait. Ils s’attaquent surtout aux villageois qu’ils qualifient de collaborateurs des « cafres » (mécréants) qu’ils accusent de lutter contre l’islam. Mais aussi à tous les porteurs d’uniforme et agents de l’Etat « qui sucent le sang des populations).
A leur actif, on peut noter l’assassinat à Boni du chef du chef de village ; de deux gendarmes dans une commune de Djenné ; de trois autres gendarmes près de Kakagna ; d’un agent des eaux et forêts à Diafarabé ; de deux personnes dans la commune de Dallah, cercle de Youvarou. Ils ont menacé de représailles le chef de village de Mourdiah. Ils revendiquent l’attaque du camp militaire de Léré où ils ont tué deux soldats et emporté un véhicule.
Tout récemment, ils ont décapité le fils du chef de village de Tielloy, dans la commune de Wouro Mody.
Tabital Pulaku s’implique…
Dans le Séno, les djihadistes ont exécuté des agents de l’Etat mais aussi des maires qui ont refusé de fuir leur poste. Bref, la liste est très longue. Et beaucoup de chef de village avaient fui pour échapper au courroux des illuminés.
Au vu de tous ces assassinats ciblés, des patrouilles sont organisées par les Famas et les forces françaises de Barkhane. Et c’est l’hécatombe. Les représailles sont disproportionnées. Mais surtout, il y a eu beaucoup d’amalgames de la part des militaires maliens et français qui tiraient sans discernement sur toute personne rencontrée en brousse.
Qu’ils soient motocyclistes en voyage, ramasseurs de fagots de bois, promeneurs solitaires, ou même bergers avec des animaux, ils sont tous exécutés, quasiment sans contrôle. Coupables ou innocents Les peuples de la zone étaient quasiment en passe d’être décimés quand les communautés décidèrent de « se lever » pour chercher la solution.
Ainsi, les chefs de village et notabilités (en abandon de domicile par peur de se voir exécutés un jour) viennent à Bamako pour rencontrer leurs parents afin de voir ce qu’il y a lieu de faire pour arrêter ce carnage.
Sur place, à Bamako, l’Association Tabital Pulaku, informée de la situation exacte sur le terrain, met sur pied un comité restreint de réflexion présidé par notre héros, le général de l’armée et comprenant un leader religieux et quelques hautes personnalités de l’Association. Plus tard, le comité fut élargi aux députés et à certains cadres peuls et touaregs de la région de Mopti. Le comité s’est donné pour mission de sensibiliser le maximum de jeunes djihadistes dans les deux zones pour qu’ils mettent fin à leur ignoble entreprise, déposent les armes, rejoignent le processus DDR et de paix.
Dans ce cadre, le comité a pu faire rallier à sa cause à ce jour, plus de 300 jeunes de la zone inondée. Ceux-ci s’apprêtent à rejoindre les camps de regroupement avec armes et bagages. En plus, environ 200 jeunes de la zone exondée sont saisis pour déposer les armes. Les négociations sont en très bonne voie.
Grâce à notre général, les deux leaders de la zone inondée (HFD et AG) et les trois de la zone exondée (ID, OD et AD) ont été reçus par les autorités en charge de la Défense et de la sécurité pour convenir des modalités du ralliement des jeunes djihadistes. De même, le collectif des élus de la région de Mopti ont été reçus par le Premier ministre, Modibo Kéïta.
Durant leur séjour à Bamako, les leaders djihadistes ont été mis dans toutes les bonnes conditions possibles : hôtels huppés, voitures de luxe etc.
Si les cadres peuls et touaregs de la région de Mopti ont décidé de s’impliquer dans ce dossier d’intérêt national, c’est non seulement pour mettre fin aux assassinats, et surtout exactions commis çà et là, mais aussi pour sauver la transhumance vers le Mena, le Séno jusqu’à la frontière du Burkina et qui est la raison d’être des populations.
Sékou Tamboura