Ibrahim Boubacar Keïta est aux affaires depuis maintenant deux ans, cinq mois sans la moindre manifestation concrète de l’espoir que son élection avait suscité chez bon nombre de compatriotes. Mais plus curieusement encore, c’est tout l’espoir qui s’effrite en dépit des discours pathétiques prononcés ça et là pour hypnotiser nos masses travailleuses.
Il importe de rappeler qu’en régime démocratique, il est du droit de tout citoyen de critiquer, de désapprouver la gestion de tous ceux qui ont la charge de gérer la chose publique. Le président de la République ne saurait faire exception à ce droit du citoyen. Lorsque celui-ci constate des fautes commises par des responsables de l’Etat, il a toute la latitude de porter plainte contre ledit responsable devant les juridictions indiquées en la matière. C’est donc dans ce contexte qu’il convient de situer la plainte formulée et déposée devant la Haute Cour de justice du Mali par le Bloc d’intervention populaire et pacifique pour la réunification entière du Mali (BIPREM) contre le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). C’était le 02 mars 2016.
Notons au passage que le BIPREM est une association de la société civile avec à sa tête deux journalistes de renom. Il accuse le président IBK de haute trahison, de mauvaise gestion et de mal gouvernance. C’est le lieu de saluer ici leur courage et leur témérité patriotique. Dès cette action, les langues se délient à propos de la gestion des affaires du Mali par celui qui incarnerait la volonté populaire dans notre pays et quant à l’opportunité de la plainte ainsi faite contre lui par cette association. Ainsi :
- Pour certains, la gestion peu satisfaisante des affaires du Mali par IBK, élu avec 77, 66% des suffrages exprimés lors de la présidentielle de 2013, s’expliquerait par le fait qu’il a hérité d’un pays en ruines, en partition entre plusieurs factions rebelles et terroristes. A cela, ajouterait-on le fait que le président déchu n’a pas laissé les caisses de l’Etat malien en bonne posture.
- Pour d’autres, (ils sont de plus en plus les plus nombreux) si IBK, connaissant la situation de partition du Mali et de délabrement économique, savait qu’il n’est pas à la hauteur de la mission qui l’entendait, il n’avait nulle raison de briguer la magistrature suprême du pays quand on sait qu’il n’est pas judicieux de prétendre gérer un pays que l’on ne connaît pas.
En tout cas, d’ores et déjà, la Haute Cour de justice du Mali aurait jugé la plainte du BIPREM contre le président de la République non recevable.
- La première certitude aujourd’hui, c’est que ‘’la démocratie’’ malienne fondée sur la sueur et le sang de plus de 200 fils du pays, est en tout point de vue une farce démocratiste sans queue ni tête, se réduisant à de simples joutes électorales menées généralement par des hommes et des femmes peu crédibles et malveillants. Comme pour dire que l’immense espoir né de la chute de l’apache régime de Moussa Traoré en notre peuple travailleur s’est vite désagrégé du fait de la gestion apatride des affaires par ceux qui se font abusivement appeler démocrates.
Effectivement, notre pays s’est retrouvé dans le gouffre de la ‘’démocratie’’ imposée du dehors en notre peuple travailleur. Comme si les diables, les dieux, Dieu ont jeté le Mali dans le labyrinthe de l’Histoire, IBK, qui fut presque élu par plébiscite, est venu enfoncer le clou dans la plaie déjà suffisamment béante et puante qui ronge douloureusement notre peuple depuis la chute de Modibo Keïta le 19 novembre 1968.
Ibrahim Boubacar Keïta est aux affaires depuis maintenant deux ans, cinq mois sans la moindre manifestation concrète de l’espoir que son élection avait suscité chez bon nombre de compatriotes. Mais plus curieusement encore, c’est tout l’espoir qui s’effrite en dépit des discours pathétiques prononcés ça et là pour hypnotiser nos masses travailleuses.
- La deuxième certitude aujourd’hui, c’est que IBK ne peut réunifier notre pays au bénéfice de notre peuple. Cela d’autant compréhensible que malgré la signature du fameux projet d’accord d’Alger, le Mali reste toujours absent de la région de Kidal tenue par la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) renforcée et réconfortée par une bonne frange de la Plateforme armée jugée proche de Bamako.
- La troisième certitude aujourd’hui, c’est que par la tenue du forum de la CMA et de la Plateforme maquillée par la présence attendue du Premier ministre de la République en la personne de Modibo Keïta, un nouveau soleil se lève dans le ciel de Kidal. Sauf surprise agréable, sinon par ce forum, la réunification semble s’éloigner davantage sous Ibrahim Boubacar Keïta.
- La quatrième certitude, sauf surprise agréable là aussi, la plainte n’aura pas juridiquement d’effet contre IBK tant il est vrai que l’indépendance de la justice reste un vœu pieux dans notre pays. Pour mieux saisir la nature et l’essence de toute juridiction dans une société de classe comme la nôtre, il convient de se rappeler de Jean de la Fontaine qui disait dans sa fable ‘’Les animaux malades de la peste’’ : «Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendrons blanc ou noir.»
- La cinquième certitude est que les finances du Mali sont systématiquement pillées au vu et au su de tous en dépit du traitement du traitement faramineux du Vérificateur général ; la goûte d’eau qui fait déborder le vase c’est la supposée prime que IBK aurait attribuée à tous les Premiers ministres du Mali et ce depuis le régime de Moussa Traoré.
Au lieu, d’autre part, de déménager à Koulouba, IBK préfère louer sa propre résidence à environ 20 millions de F CFA, selon les indiscrétions. Sans compter les autres primes aux nantis, tout ressemble aujourd’hui à un partage du gâteau-Mali sans vergogne : les riches s’enrichissent et les pauvres meurent de misère et d’humiliation aux dépens de ceux qui ont saigné pour l’avènement de la démocratie dans notre pays.
- Si la plainte du BIPREM n’est pas recevable au niveau de la justice malienne, elle a tout le mérite d’alerter l’opinion nationale et internationale sur la grave crise socio- politique qui couve lentement mais sûrement dans notre pays.
Pendant qu’il est temps IBK doit se ressaisir car ne peut se tromper celui qui ne s’agit pas. Comme pour dire que commettre une faute n’est pas grave, mais y persister est tout simplement diabolique. Il faut qu’il se retourne vers le peuple avec la compréhension judicieusement du fait que la France ne peut servir nos intérêts fondamentaux et que quelle que soit l’idéologie qui sous tend sa gouvernance, il est indubitablement plus proche des Maliens que des gouvernants français qui n’ont que faire du devenir radieux du peuple malien.
Une fois encore, IBK doit s’approprier ce sage conseil du sage Hamalite selon lequel : «Le sage désirera plutôt apprendre que d’enseigner. Il ne croira jamais qu’il détient le savoir, la vérité. Il se considérera toujours comme ignorant ; il restera de tout temps élève. Il sera assez conséquent pour respecter la vérité des autres et assez conscient pour reconnaître ses erreurs.»
Fodé KEITA