Depuis la semaine dernière, le Mali fait face pour la première fois à une épidémie de méningite à « méningocoques C » et cela dans le district sanitaire de Ouéléssebougou avec à la clé 6 décès. Une situation face à laquelle, les autorités sanitaires de notre pays ont pris les mesures qui s’imposent, afin de mettre fin à cette épidémie, qui semble être maitrisée pour le moment. Selon des sources, cette épidémie de méningite a été déclarée dans cinq villages à savoir : M’Pièbougou, Tamala, Djitoumou, Dialakoro et Sikoro. Face à la menace, le Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique a lancé une campagne de vaccination contre cette maladie, afin d’éviter sa propagation. Dans ce dossier, nous vous proposons la riposte nationale qui s’est organisée contre cette épidémie meurtrière. Il s’agit aussi pour nous de revenir sur les causes, le diagnostic, les symptômes de la transmission et de la prévention de cette maladie. Lisez plutôt !
Soulignons tout d’abord que, pour faire le point sur la situation de cette épidémie de méningite, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a animé, le lundi 7 mars dernier une conférence de presse, au cours de laquelle les organisateurs ont établit que la prise en charge de cette maladie était bien gérée. Le directeur national de la santé, le Dr Mama Koumaré, a indiqué que notre pays disposait de médicaments, de vaccins, d’un laboratoire d’analyse qui fonctionne 24h sur 24 et d’un personnel permanent et qualifié pour organiser la riposte. Il ajoutera que la vaccination a ainsi été assurée dans les localités de Ouéléssébougou et les zones adjacentes, dont 13 villages. Il faut en outre rappeler que la prise en charge médicale est gratuite. «Le bilan total à ce jour est de 20 cas présumés, 9 cas confirmés, 6 décès et 9 hospitalisés en traitement» a indiqué le Dr Koumaré. Un total de 23.064 personnes avait été vacciné à la date du lundi 7 mars 2016.
Les mesures de riposte
Le département de la Santé rassure la population sur l’application des mesures adéquates pour accélérer l’interruption de la chaine de transmission. En plus, il faut préciser que toute la prise en charge de l’épidémie est basée sur la nouvelle version du guide de l’OMS. Ce guide permet de donner des directives non seulement sur les conditions de prélèvement, mais aussi sur le traitement. Le département a aussi pris des mesures de riposte comme le déploiement d’une équipe médicale d’intervention rapide sur le terrain, l’investigation des cas cliniques, le prélèvement, l’analyse de laboratoire, le regroupement des cas présumés au centre de santé de référence de Ouéléssébougou pour une meilleure prise en charge. Il y a aussi le renforcement des stocks en vaccin, médicaments et autres intrants à tous les niveaux, en collaboration avec l’OMS. A tout ceci, il faut ajouter l’élaboration et la diffusion de messages d’information et de sensibilisation à destination des populations à tous les niveaux et en plusieurs langues, et la diffusion des directives de prise en charge dans toutes structures nationales y compris le secteur privé et traditionnel.
Indiquons que la méningite à méningocoques C est une forme de méningite bactérienne, avec une grave infection des fines membranes qui enveloppent le cerveau et la moelle épinière. Elle se manifeste le plus souvent par l’apparition d’une fièvre soudaine, des céphalées, la raideur de la nuque et le bombement de la fontanelle chez les nourrissons. Le Mali fait partie des pays du Sahel situés dans la ceinture méningitique et la saison sèche est propice aux épidémies. Et au directeur du Centre national d’appui à la lutte contre la maladie (CNAM), le professeur Samba Sow, de noter que notre pays n’avait pas connu jusqu’ici une épidémie de méningite à méningocoque C. Mais il avait, par contre, connu une épidémie de méningite A. Ainsi, avant 2010, les campagnes de vaccination préventive de masse, le méningocoque du sérogroupe A était responsable d’environ 80 à 85% des cas dans la ceinture de la méningite, où des épidémies survenaient tous les 7 à 14 ans. Et, au cours de la saison épidémique de 2014, 19 pays africains dont le Mali ont mis en œuvre une surveillance renforcée, qui a permis d’enregistrer un total de 11 908 cas suspectés, dont 1146 décès. On dispose de vaccins anti-méningococciques polyosidiques pour lutter contre cette maladie. Il s’agit du vaccin anti-méningococcique conjugué A, des vaccins conjugués C, des vaccins quadrivalents A, C, Y et W conjugués et des vaccins anti-méningococciques polyosidiques.
En janvier 2015, plus de 217 millions de personnes avaient reçu le vaccin anti-méningococcique A conjugué dans 15 pays de la ceinture africaine. Cette forme de méningite peut causer de graves lésions cérébrales et se révéler mortelle dans 50% des cas si elle n’est pas traitée.
Les causes
La méningite est classiquement causée par une infection, le plus souvent virale. Ensuite viennent les causes bactériennes, fongiques et protozoaires. L’expression «méningite aseptique» est parfois utilisée dans ce type de cas, bien qu’elle puisse également désigner une méningite virale, ou une méningite bactérienne avec un examen du LCR négatif du fait d’un traitement antibiotique préalable. Il peut s’agir aussi d’une présence bactérienne faible en cas de méningite secondaire dû à une endocardite d’une bactérie difficilement identifiable comme dans le cas de la syphilis ou de la maladie de Lyme. La méningite peut être due au paludisme ou à l’amœbose. Différentes bactéries peuvent causer une méningite. Il y a le Neisseria meningitidis qui est la plus susceptible de provoquer des épidémies importantes. On a recensé 12 sérogroupes de Neisseria meningitidis, dont 6 à savoir les types A, B, C, W135, X et Y sont connus pour provoquer des épidémies.
Transmission
Selon la note de l’OMS, la transmission par bactérie se produit de personne à personne par des gouttelettes de sécrétions respiratoires ou pharyngées. Un contact étroit et prolongé comme les baisers, les éternuements et les toux rapprochées, ou la promiscuité avec une personne infectée, vie en dortoir, mise en commun des couverts ou des verres, favorise la propagation de la maladie. La période d’incubation est en moyenne de quatre jours mais elle peut être comprise entre 2 et 10 jours. Le Neisseria meningitidis ne s’attaque qu’aux humains, comme quoi, il n’y a pas de réservoir animal. Les bactéries peuvent être présentes dans le pharynx et, pour des raisons non encore complètement élucidées, submergent parfois les défenses de l’organisme, permettant ainsi à l’infection de se propager dans la circulation sanguine et d’atteindre le cerveau. On estime qu’entre 10 et 20% des gens sont porteurs de Neisseria meningitidis en temps normal. Mais ce taux peut être plus élevé en cas d’épidémie.
Symptômes
Les symptômes les plus fréquents sont la raideur de la nuque, la fièvre élevée, la photophobie, l’état confusionnel, les céphalées et les vomissements. Même lorsque la maladie est diagnostiquée très tôt et qu’un traitement approprié est institué, entre 5 et 10% des malades décèdent, en général dans les 24 à 48 heures qui suivent l’apparition des symptômes. La méningite bactérienne peut entraîner des lésions cérébrales, une perte auditive ou des troubles de l’apprentissage chez 10 à 20% des survivants. La septicémie méningococcique est une forme rare mais plus grave de la méningococcie qui se caractérise par une éruption hémorragique et un collapsus circulatoire rapide.
Diagnostic
Le diagnostic initial de la méningite à méningocoques peut être posé par un examen clinique suivi d’une ponction lombaire montrant un liquide céphalorachidien purulent. Les bactéries sont parfois visibles à l’examen microscopique du liquide céphalorachidien. Le diagnostic est confirmé par la mise en culture de prélèvements de liquide céphalorachidien ou de sang, par des tests d’agglutination ou par amplification génétique. Il est important d’identifier les sérogroupes et de déterminer la susceptibilité aux antibiotiques pour établir les mesures à prendre.
Traitement
La méningococcie peut être mortelle et doit toujours être considérée comme une urgence médicale. L’admission à l’hôpital ou dans un centre de santé est nécessaire, mais le malade ne doit pas nécessairement être isolé. Un traitement antimicrobien approprié doit être appliqué le plus vite possible, de préférence dès que la ponction lombaire a été pratiquée, si on a pu le faire immédiatement. Si le traitement est entamé avant la ponction, il peut être difficile de cultiver les bactéries sur le liquide céphalorachidien et donc de confirmer le diagnostic. On peut aussi utiliser toute une série d’antibiotiques pour traiter l’infection, notamment la pénicilline, l’ampicilline, le chloramphénicol et la ceftriaxone. En Afrique, en cas d’épidémie dans des régions disposant d’une infrastructure et de ressources sanitaires limitées, la ceftriaxone est le médicament de choix.
Prévention
Pour les cas de préventions contre cette maladie, l’OMS retient trois types de vaccins. Ainsi, on a les vaccins polyosidiques qui sont disponibles depuis plus de 30 ans pour prévenir la maladie, les vaccins anti-méningococciques polyosidiques existant sous forme soit bivalente pour les groupe A et C, soit trivalente pour les groupes A, C et W) et soit tétravalente concernant les groupes A, C, Y et W135 pour lutter contre la maladie. En ce qui concerne le sérogroupe B, il n’est pas possible de préparer des vaccins polyosidiques en raison d’une homotypie antigénique avec les polyosides présents dans les tissus nerveux humains. Le premier vaccin contre «Neisseria meningitidis » du groupe B, composé de quatre protéines, a été mis sur le marché en 2014. Depuis 1999 des vaccines anti-méningococciques conjugués sont disponibles et largement utilisés contre le groupe C. Des vaccins conjugués tétravalents contre les sérogroupes A, C, Y et W135 sont homologués depuis 2005 pour utilisation chez les enfants et les adultes aux États-Unis d’Amérique et au Canada et en Europe.
La méningococcie frappe le plus lourdement une zone de l’Afrique subsaharienne connue pour être la «ceinture de la méningite», qui s’étend du Sénégal à l’ouest jusqu’à l’Éthiopie, à l’est dans 26 pays africains, dont le Mali.
En décembre 2010, un nouveau vaccin anti-méningococcique A conjugué a été introduit au Burkina Faso et dans certaines régions du Mali et du Niger, ciblant les personnes de 1 à 29 ans. En janvier 2015, 217 millions de personnes avaient été vaccinées au moyen de ce nouveau vaccin dans 15 pays. Pour l’Organisation mondiale de la Santé, le vaccin anti-méningococcique A conjugué présente plusieurs avantages par rapport aux vaccins polyosidiques existants. Ainsi, il provoque une réponse immunitaire plus forte et plus durable contre le méningocoque du groupe A, il réduit le portage de la bactérie dans la gorge et donc sa transmission. Il a aussi d’autres avantages de conférer une protection à long terme non seulement aux personnes vaccinées, mais aussi aux membres de leur famille et autres personnes qui auraient sinon été exposées à la méningite. Son coût qui tourne autour de 0,60 dollar la dose est par ailleurs plus faible que celui des autres vaccins anti-méningococciques contre les autres vaccins anti-méningococciques étant compris entre 2,50 et 117 dollars la dose. Enfin, ce vaccin devrait être particulièrement efficace pour protéger les enfants de moins de deux ans chez lesquels les vaccins polyosidiques classiques ne provoquent aucune réponse.
Toujours pour l’OMS, la méningite à méningocoques apparaît sporadiquement dans le monde entier sous forme de petits groupes de cas, avec des variations saisonnières, et représente une proportion variable de la méningite bactérienne épidémique.
Pendant la saison sèche, entre décembre et juin, les vents chargés de poussières, les nuits froides et les infections des voies respiratoires supérieures se conjuguent pour endommager la muqueuse rhino-pharyngienne, augmentant ainsi le risque de méningococcie.
Par ailleurs, la transmission de Neisseria meningitidis est favorisée par la promiscuité et les grands déplacements de population qu’engendrent les pèlerinages et les marchés traditionnels régionaux. Cette conjonction de facteurs explique les grandes épidémies qui se produisent au cours de cette saison dans la ceinture de la méningitique.
Notons que l’OMS encourage une stratégie qui comprend la préparation aux épidémies, la prévention et la riposte. La préparation se concentre sur la surveillance, depuis le dépistage des cas à l’investigation et à la confirmation en laboratoire.
La prévention consiste à vacciner toutes les personnes âgées de 1 à 29 ans dans la ceinture africaine de la méningite avec ce vaccin. La lutte contre les flambées épidémiques consiste à prendre les cas en charge de manière rapide et appropriée en les traitant à l’aide de ceftriaxone, ainsi qu’à procéder à des campagnes réactives chez les personnes qui ne sont pas encore protégées par la vaccination.
Alors toute personne présentant un ou plusieurs des signes mentionnés plus haut, est invitée à se présenter sans délai au centre de santé le plus proche. Car la détection et le traitement précoce donnent plus de chance de guérison sans séquelle. Le département invite également le personnel de santé à un surcroit de vigilance.
Dieudonné Tembely