À travers sa sortie licencieuse, la minuscule association (à la suite d’une conférence de presse organisée à la Maison de la presse, le 1er mars dernier), le BIPREM-Fasoko (Bloc d’intervention populaire et pacifique pour la réunification entière du Mali), annonce avoir porté plainte contre le président de la République, Chef de l’État, Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA.
Son président, Lacine DIAWARA, exhibe un document qu’il présente comme un accusé de réception de ladite « plainte contre le Président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar KEITA, pour haute trahison et gestion scandaleuse de l’argent public » émanant de la Haute cour de Justice.
Jubilation de courte durée des adversaires et de tous ceux qui caressent le secret vœu de voir destituer, d’une manière ou d’une autre, le Président IBK. En effet, la Haute cour de justice, émanation du parlement, fait la mise au point.
Elle dit ne pas considérer le document reçu à son siège comme une plainte, le document pouvant déclencher une procédure d’impeachment, conformément à l’article 35 de notre Constitution, mais plutôt comme un tract, dans sa présentation. La juridiction politique chargée de juger le président de la République et les ministres mis en accusation devant elle, par l’Assemblée nationale pour haute trahison, estime que le BIPREM n’a pas qualité de déposer une plainte et que les règles de sa saisine n’ont pas été suivies.
Pour un coup de communication, le président du BIPREM qui rumine sa colère et prépare sa vengeance contre le Président IBK et sa famille aura réussi son coup de maître. D’une part, en retenant l’attention des médias, au regard du caractère inédit et singulier de la démarche de l’association ; et, d’autre part, en provoquant une réaction en cascade dans le camp des partisans et alliés du président, mais aussi, au sein de l’intelligentsia malienne. Même la présidence de la République n’est pas restée sans voix face à la démarche provocatrice et aux graves accusations portées contre la première institution du pays.
Examinons la consistance des griefs portés par le BIPREM contre le Président IBK.
1- La violation de la Constitution par le refus de présenter publiquement ses biens.
Par la farfelue argumentation de violation de la Constitution avancée, le BIPREM accuserait-il la Cour suprême d’avoir manqué à sa charge en fermant les yeux et en couvrant une illégalité ? Pour quel motif ? La Constitution du Mali a été respectée dans le fond et dans la forme.
L’article 35 in fine de la Constitution du 25 Février 1992 dispose : « Après la cérémonie d’investiture et dans un délai de 48 heures, le président de la Cour suprême reçoit publiquement la déclaration écrite des biens du président de la République. Cette déclaration fait l’objet d’une mise à jour annuelle ».
Le Président IBK l’a-t-il fait dans les formes et dans les délais ?
Contrairement à l’accusation du BIPREM, sans aucun fondement et sans aucun recoupement préalable, la Cour suprême du Mali a bel et bien reçu, conformément aux prescriptions constitutionnelles, la déclaration écrite des biens du Président IBK.
La plus haute juridiction de notre pays en a donné acte au président élu. Et son président, Monsieur Nouhoum TAPILY, a délivré au Président IBK le récépissé de sa déclaration, sous le N°01/P-CS du 9 septembre 2013.
Pour ce qui est des délais, tout étudiant, en première année de Fac, vous dira que les délais légaux sont en jours francs et en heures franches.
Pour ceux qui savent un jour franc est un jour qui dure de 0 h à 24 h. Un délai calculé en jour franc ne tient pas compte du jour de la décision, à l’origine du délai, ni du jour de l’échéance. Si le délai s’achève un samedi, un dimanche ou jour férié, il est reporté d’un jour. C’est parce que le président a saisi la Cour dans le délai prescrit par la Constitution que celle-ci a reçu sa déclaration des biens, lui en a donné acte et délivré un récépissé.
Que fait-on de l’autorité et de la force de la chose jugée surtout lorsqu’elle émane de la plus haute juridiction du pays qu’est la Cour suprême ?
Quid de la publicité ?
Le rôle et la police de l’audience de la Cour ainsi que la publicité des débats et de l’arrêt appartiennent-ils au requérant ou au Président de la Cour ?
La réponse est donnée par l’article 4 de la loi n° 96-071 du 16 décembre 1996 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour suprême et la procédure suivie devant elle (votée par l’Assemblée nationale, le 13 juin 1996 et validée par l’arrêt n° 96-006/CC de la Cour constitutionnelle, en date du 14 novembre 1996) :
« Les audiences de la Cour suprême sont publiques à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l’ordre public ou les mœurs, auquel cas, la Cour le déclare par arrêt préalable.
Les audiences sont tenues au siège de la Juridiction.
Les arrêts en toutes matières sont prononcés publiquement. Ils doivent constater cette publicité. Ils sont motivés. Ils mentionnent les noms des conseillers qui les ont rendus, du représentant du Ministère Public ou du Commissaire du Gouvernement, des avocats qui ont postulé à l’audience, les nom, prénom, profession, domiciles des parties, l’énoncé succinct des moyens et les dispositions légales appliquées.
Ils sont signés du Président et du Greffier.
Le Président a la police de l’audience et dirige les débats ».
La publicité des audiences et des décisions de justice, comme on le voit, appartient à la Justice et non aux justiciables. Tout président qu’il est, IBK ne peut se substituer à la Cour pour tenir l’audience de sa déclaration de Biens au CICB et prendre la décision de la publier à la télévision et sur Internet. Principe de la séparation des pouvoirs exige.
Dès lors, c’est en ignorance affligeante de la loi et de la Constitution à laquelle il fait référence que le BIPREM fait un mauvais procès au Président IBK pour n’avoir pas fait la publicité de cette décision le concernant. Ceci est le rôle de la Cour suprême.
L’article 81 de la Constitution dit très clairement: « le pouvoir judiciaire est indépendant des pouvoirs exécutif et législatif. Il s’exerce par la Cour Suprême et les autres Cours et Tribunaux (….) Il est chargé d’appliquer, dans le domaine qui lui est propre, les lois de la République ».
2- Le détournement de 28 549 901 190 FCFA (selon le BVG 2014), lors des achats de l’avion présidentiel (prix inconnus, entre 8,17 et 21 milliards) et des équipements militaires.
Voici un grossier mensonge de la part du BIPREM qui relève purement et simplement de la dénonciation calomnieuse et de la diffamation.
Dans son rapport 2014, de 241 pages, le Bureau du vérificateur général s’agissant de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires n’utilise le mot détournement qu’une seule fois pour préciser l’infraction et pour préciser le montant en cause. C’est à la page 35, lorsque notamment le Végal dénonce au Procureur de la République un certain nombre d’infractions.
Voici ce que le Bureau du vérificateur général écrit :
« DÉNONCIATION DES FAITS AU PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PAR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL RELATIVEMENT :
-au détournement et complicité de détournement de fonds publics par l’engagement irrégulier des finances publiques ;
-à l’utilisation frauduleuse et au détournement de deniers publics d’un montant de 9.350.120.750 FCFA ;
-au délit de favoritisme ;
-au faux et usage de faux ;
-au trafic d’influence ;
-aux fraudes fiscales portant sur le non-paiement des droits d’enregistrement et des redevances de régulation, en l’absence de toute autorisation légale d’exemption. »
Or, comme on le voit, le montant ici en cause et dénoncé par le Bureau du Vérificateur général au Parquet (neuf milliards trois cent cinquante millions cent vingt mille sept cent cinquante francs – 9.350.120 FCFA) est très en deçà du chiffre brandi par le BOPREM : 28 549 901 190 FCFA.
Un montant qui provient, en réalité, de la mauvaise lecture ou d’une exploitation malhonnête du rapport 2014 du Végal.
Nulle part, le rapport le Végal, ne dit qu’il y a eu 28 49 901 190 FCFA de détournement.
Il s’agit en fait d’un chiffre pris dans le « Tableau des irrégularités financières en FCFA » qui se compose comme suit : 12.422.063.092 FCFA (Fraude) et 25.477.958.848 FCFA (Mauvaise gestion) -(Annexe 2, page 46 du Rapport 2014)-.
Une irrégularité n’étant pas un détournement (la loi en la matière est d’interprétation stricte, sinon le Végal aurait déféré au Procureur le montant en question), il s’agit donc de la part du BIPREM d’une accusation mensongère et malhonnête.
Par exemple : un agent de l’État peut être coupable de mauvaise gestion pour avoir utilisé les deniers de l’État à l’objet de leur affectation en violation des règles de procédures (articles 49-bis), mais on ne peut pas le poursuivre pour détournement de deniers publics. Parce que simplement il a commis une irrégularité financière, mais n’a rien détourné et n’a rien carotté à l’État.
Pour ce qui est du montant de l’Avion, chacun sait la chapelle de mauvaise foi dans laquelle le BIPREM prêche.
« Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose.
La roue de l’histoire tourne. Et ceux qui veulent vernir leur mauvaise conscience d’honorabilité à coup de mensonge feront bien de lire entre les lignes le dernier communiqué du FMI quant à ses rapports avec le Mali :
« les autorités maliennes ont continué de prendre les mesures nécessaires pour que les objectifs établis pour leur programme appuyé par le FMI soient atteints. Les résultats du programme, jusqu’en fin juin, ont été solides, ce qui a permis aux autorités de renforcer leur programme budgétaire pour 2015 (…).
Les efforts que les autorités continuent de déployer pour améliorer la gestion des finances publiques sont encourageants aussi (…).
La décentralisation budgétaire devrait améliorer la responsabilisation en matière de dépenses publiques et accroitre l’aide accordée aux régions moins favorables du pays (…).
Les administrateurs félicitent les autorités des résultats macroéconomiques solides qui ont été enregistrés récemment, telles qu’une croissance économique robuste, une inflation faible et une position budgétaire viable (…).
Les administrateurs saluent l’accord de paix qui a été conclu récemment entre le gouvernement et les groupes rebelles (…).
Les administrateurs saluent la volonté des autorités de mettre en œuvre une politique économique visant à préserver la stabilité macroéconomique et à promouvoir une croissance solidaire. En particulier, ils souscrivent aux efforts déployés pour accroître les recettes fiscales et améliorer la qualité et l’efficience des dépenses sociales (…).
Les administrateurs souscrivent aux plans des autorités visant à mettre en œuvre progressivement la décentralisation budgétaire en vue d’améliorer la responsabilisation sur le plan des dépenses tout en augmentant l’aide accordée aux régions moins favorisées du pays ».
3- La dilapidation du denier public dans l’acquisition des engrais agricoles dits frelatés et 1000 tracteurs pour les agriculteurs maliens.
Dans un monde de compétitivité (et d’excellence sans fioriture dirait l’autre), décider de maintenir la subvention sur les intrants agricoles et les outils de production (tracteurs), n’est pas une « dilapidation du denier public », mais au contraire une décision pragmatique, rationnelle qui procède d’une volonté politique constante au Mali ou à ailleurs (Afrique, Europe, USA). Quel pays du monde ne subventionne pas son agriculture ?
Avant l’élection du Président IBK, les engrais étaient bien subventionnés au Mali et l’État octroyait bel et bien des tracteurs aux agriculteurs maliens. Le BIPREM et ses maîtres de conscience avaient-ils parlé de dilapidation de denier public ? Délit de faciès quand tu nous tiens dans une chapelle de haine et de mauvaise foi ! En effet, subventionner les engrais et les tracteurs qui n’étaient pas hier de la dilapidation du denier public le devient aujourd’hui. Parce que le Président IBK est au pouvoir, parce qu’on a des comptes à rendre avec le Président IBK !
Là, le BIPREM qui ne se résume qu’à son président (le vice-président ayant d’autres chats à fouetter) jette et étale au grand jour le masque de la vengeance maladroite.
Parce qu’elle est l’arme des humiliés, et impulsive elle est mauvaise conseillère et une justice sauvage, les dieux de la vengeance l’exercent en silence. N’est pas Andromaque qui veut ; puisque Lacine DIAWARA ignore que la vengeance déguisée en justice n’est et ne peut être qu’une affreuse et piteuse comédie, alors passons.
4- La diminution indue du budget des Forces Armées de 281 milliards en 2015 à 213 milliards en 2016 et l’augmentation incongrue du budget de la Présidence de la République de 9.3 milliards en 2014 (14.6 milliards en 2015) à 19.3 milliards en 2016
Si les griefs du BIPREM sont une succédanée des accusations démagogiques véhiculées jusqu’ici par les adversaires d’IBK, ils sont un catalogue insipide de dénonciations calomnieuses et malveillantes.
Et pour cause ! Soutenir et insinuer que le Président IBK a diminué le budget de nos forces armées et de sécurité pour augmenter celui de la présidence ne procède pas seulement d’un mensonge affabulateur, ça participe aussi d’une stratégie de dénigrement et de diabolisation, d’une désinformation machiavélique et d’une subversion que nul patriote objectif ne doit laisser passer.
En effet, à la suite de ceux qui officient dans sa chapelle, le BIPREM, de manière désespérante, tente de convaincre les Maliens que pendant que le pays fait face au péril terroriste et à l’insécurité grandissante, l’homme qu’ils ont élu pour son propre confort est en train de diminuer le budget de l’armée. Au-delà du grotesque, l’improbité morale de l’accusation est déconcertante.
On peut vouloir salir un homme, encore faudrait-il choisir les bons arguments. La légèreté de ces griefs s’étale devant tous les Maliens.
Depuis l’affaire de l’achat d’armes et d’équipements militaires pour laquelle ceux qui ne veulent pas voir notre armée rénovée et rééquipée ont tout entrepris et tout tenté pour rendre gorge au Président IBK (au point de mentir et d’induire en erreur des partenaires financiers comme le FMI), chacun peut constater et témoigner que :
-les soldats maliens engagés sur le front, quel que soit l’ennemi (séparatiste ou djihadiste), ont pu l’être en violation de la Convention de Genève, lâchement et froidement assassinés à la suite d’attaques, mourir dans des embuscades lâches et traitresses ou dans l’explosion de mines posées par les ennemis de l’accord de paix,
-mais qu’ils ne reculent ni devant la mission ni devant l’ennemi,
-c’est bien désormais un triste souvenir, les replis stratégiques auxquels le BIPREM et ses coreligionnaires ont assisté, en spectateurs, sans aucune émotion.
Trou de mémoire sûrement.
Mais les Maliens ont en mémoire le projet herculéen et l’effort titanesque engagé par leur président, chef suprême des armées, dans le cadre de la Loi d’orientation et de programmation militaire : un investissement financier de 1.230.563.972.349 Fcfa (mille deux cent trente milliards cinq cent soixante-trois millions neuf cent soixante-douze mille trois cent quarante-neuf) pour la période 2015 à 2019.
Adoptée, le vendredi 20 février 2015, par l’Assemblée nationale à l’unanimité des députés présents, toutes tendances confondues, la loi d’orientation et de programmation militaire est un contrat opérationnel avec des axes d’efforts sur :
a) L’amélioration de la capacité opérationnelle des unités combattantes ;
– l’acquisition d’aéronefs et de matériels de soutien technique de l’armée de l’air pour un montant d’environ 200 milliards FCFA ;
– l’acquisition de véhicules de combat et de transport de troupes modernes pour un montant d’environ 100 milliards FCFA ;
– la réalisation de matériels spécifiques pour les forces de sécurité, notamment pour la garde nationale et la gendarmerie nationale pour un montant d’environ 70 milliards FCFA ;
– la réalisation de matériels spécifiques pour le renseignement et les transmissions pour un montant d’environ 20 milliards FCFA.
b) Le Soutien logistique et l’appui à la mobilité et contre-mobilité ;
– l’amélioration du soutien, de l’appui à la mobilité et contre-mobilité au profit des unités opérationnelles pour un montant d’environ 100 milliards FCFA.
c) L’amélioration du cadre de vie et de travail du personnel ainsi que du commandement.
Cet aspect comprend : la condition militaire, le recrutement, la revalorisation indiciaire, l’indemnité compensatrice de logement, le salaire du personnel existant, le fonctionnement ordinaire et l’opération MALIBA pour un montant d’environ 20 milliards FCFA.
L’effort financier pour la mise en œuvre de Loi d’orientation et programmation militaire se chiffre comme suit :
-pour 2015 à 104.098.958.122 FCFA
-pour 2016 à 109.489.958.134 FCFA
-pour 2017 à 97.282.269.381 FCFA
-pour 2018 à 110.921.994.129 FCFA
-pour 2019 à 92.898.865.082 FCFA.
Le président de la République ne fait pas la loi, il ne fait que l’appliquer. La loi, c’est loi. Dura lex, sed lex. Dès lors, c’est une hérésie de dire que le Président IBK a réduit le budget de l’armée.
Lassine DIAWARA sait-il que le budget de la présidence est chiffré : en Côte-d’Ivoire à 80 Milliards de FCFA, soit 1,37 % du budget national ; au Sénégal à 72 Milliards de FCFA, soit 2,4 % du budget national ; au Burkina Faso : 48 Milliards de FCFA, soit 4,69 % du Budget national ; en Guinée –Conakry à 30 Milliards de FCFA, soit 2,14 % du budget national ; tandis qu’au Mali il est à 19, 7 Milliards de CFA, soit 0,98 % du budget national ?
Les présidents de ces pays font-ils face à plus de défis que le nôtre ?
5- La sortie dramatique de Kidal du giron malien avec ses lots de morts aussi bien militaires que civils due à la visite improvisée d’un Premier Ministre envoyé, par son Patron, en mission dans cette région qui est le bastion des rebelles.
L’escapade du Premier ministre Moussa MARA, à Kidal, a été un épisode douloureux, dramatique, pour toute la Nation malienne. Le Mali continue encore de pleurer ses enfants sauvagement massacrés, les familles endeuillées fières du sacrifice des leurs pour la nation s’interrogent encore.
N’est-ce pas bien pour cette raison qu’en toute responsabilité, après le limogeage du Ministre de la Défense, une enquête parlementaire a été ouverte pour en connaître et situer les responsabilités, toutes les responsabilités.
Le Président IBK n’étant ni député pour être membre de la Commission parlementaire, saisie au fond, n’ayant ni été entendu, à quel que titre que ce soit, devant cette commission (séparation des pouvoirs oblige), peut-il et doit extrapoler sur le sujet ?
La démocratie est une exigence et non un fantasme. Dans une République, chaque pouvoir a ses prérogatives. À partir du moment où l’Assemblée nationale a choisi d’enquêter, et jusqu’à ce qu’elle rende public son rapport, et le président de la République et le BIPREM, se trouvent liés, obligés d’attendre.
Une attente qui ne va plus durer, car ce n’est plus un secret (c’est dans la presse) que l’Assemblée va rendre bientôt public son rapport. Alors, pourquoi le BIPREM veut-il enfoncer une porte déjà ouverte ?
6- L’incapacité avérée de mettre en application un Accord d’Alger trop impopulaire et infructueux signé depuis plus de 10 mois (en mai 2015).
Que le BIPREM et ses amis de l’Opposition qui passent leur temps à vilipender l’Accord pour la paix ne le partagent pas est un fait « avéré », mais qu’il s’agisse d’un Accord « impopulaire et infructueux » procède d’un procès en sorcellerie à l’endroit des signataires.
Parce que le Mali pour eux se résume à eux. Tout ce qui n’est pas d’eux est par conséquent impopulaire ! Dans un pays post-crise comme le nôtre, en phase de reconstruction, cette démarche exclusive n’est pas seulement du nihilisme, nombrilisme et du sectarisme, c’est aussi une forme de terrorisme qu’il faut combattre. Parce que le Mali, dans cette posture, n’a pas besoin d’exclusion, mais d’inclusivité et de réconciliation.
Quid de l’incapacité servie comme une sérénade ?
N’est pas et est loin d’être incapacité, un retard non imputable à l’État dans la mise en œuvre l’Accord pour la paix et la réconciliation autour duquel il y a toujours eu un large consensus et partagé de toutes les composantes de la nation. À part bien évidemment le biprem et ses coreligionnaires.
En tout cas, au terme d’une visite de deux jours, le week-end dernier, dans notre pays, les 15 membres du Conseil de sécurité des Nations unies qui ont rencontré tous les signataires, la classe politique, les élus et la société civile émettent un avis contraire. Ils estiment que l’Accord est « une opportunité historique » pour notre pays « pour concrétiser, accélérer encore cette dynamique positive, fragile bien sûr, mais positive que nous voyons à l’œuvre dans l’ensemble des domaines ». Le président du Conseil de sécurité de l’ONU, satisfait, de conclure : « nous repartons les uns et les autres plus encouragés encore, plus engagés encore à soutenir les efforts du Mali ». Non sans suggérer que « ceux qui sont contre le processus de paix, les groupes terroristes (ndlr : et leurs complices), soient combattus le plus efficacement possible ».
Alors, le BIPREM doit faire attention pour ne pas être déclaré par le CS-ONU ennemi de la paix et inscrit sur une des listes de personnes sanctionnées.
7- Le record de l’instabilité gouvernementale par les tâtonnements de 3 Premiers ministres et 6 gouvernements en 28 mois prouvant le manque d’efficacité et de perspicacité d’un Président de la République pourtant bien élu, mais qui a bien déçu bien de maliens.
Dans la prose du BIPREM, on croirait notre pays devenu la Belgique, Israël ou l’Espagne ! Comparaison n’est pas raison. Du record de l’instabilité gouvernementale, qu’en est-il ?
Mais qu’on nous permette de faire le parallèle entre les trois (3) Premiers ministres d’Alpha Oumar KONARE entre Juin 1992 et février 1994 et ceux d’Ibrahim Boubacar KEITA entre septembre 2013 et Janvier 2014. Presque la même situation de crise et la même fourchette de temps à 4 petits mois près.
Donc, il n’y a rien de nouveau et d’exceptionnel sous le ciel du grand Mali : les hommes passent, la nation demeure.
Pour faire de la satire, il faut en avoir les ressources, intellectuelles et morales. Quand on veut faire des calembours, il faut bien s’attendre à des reparties.
À une bonne table parisienne, un jour, l’écrivain Nicolas Boileau joutait (intellectuellement parlant) avec le cardinal de Jeanson.
Ce dernier, quelques verres dans le nez, dit à son convive : Dis, mon cher, Boileau n’est pas un nom digne qui rend hommage à ton intelligence. On devrait t’appeler Bois-vin.
Avec une cinglante repartie, l’écrivain répond au cardinal : sauf respect pour Votre Éminence, je trouve plus noble « Jean-farine » que « Jeanson ».
Le BIPREM sait-il seulement ce qu’est une instabilité gouvernementale ? Ce n’est pas le nombre de Premiers ministres ou de ministres alignés qui définit l’instabilité gouvernementale.
Parlant d’instabilité, le père fondateur du système constitutionnel qui nous régit (celui de la Vème République), le Général Charles De Gaule a dit : « notre pays a vu bouleverser les bases de l’État et les règles de son fonctionnement. Ce qu’ont été les conséquences d’une pareille instabilité, quant à la sécurité extérieure, au développement intérieur, à l’unité morale du pays, six invasions, plusieurs guerres civiles, de multiples émeutes, désordres et coups d’État, n’en ont que trop témoigné » (de Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 584).
Voilà les raisons qui ont poussé le Général à changer de régime, à faire passer la France de la IVe à la Ve République où le système était parlementaire.
À cruelle ignorance du BIPREM et de son président, les constitutionnalistes définissent l’instabilité gouvernementale, comme une situation politique où les pouvoirs ne se pondèrent ni ne se contiennent mutuellement, où ils tendent chacun à prédominer, faisant courir le risque d’une crise, d’un renversement gouvernemental, ministériel.
L’instabilité gouvernementale ne se caractérise pas par le nombre élevé de gouvernements, mais par le renversement (par le parlement) de plusieurs gouvernements dans un certain laps de temps. Or, de septembre 2013 à nos jours, aucun gouvernement du Mali n’a été renversé par l’Assemblée nationale.
À requête inédite, traitement inédit.
Le débat s’est jusqu’ici focalisé sur les desseins inavouables du BIPREM et de son président et leur qualité d’ester contre le président de la République ainsi que la recevabilité ou non de la plainte devant la Haute cour de justice pour Haute trahison et les chances ou non du BIPREM d’obtenir au bout la destitution.
En effet, par sa plainte « contre le Président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar KEITA, pour haute trahison et gestion scandaleuse de l’argent public » le BIPREM-fasoko ne veut pas d’un impeachment, l’association poussant un peu trop loin la liberté d’expression et d’action « exige (simplement, mais) rigoureusement (la) comparution (du Président IBK) pour donner au peuple malien des explications simplifiées sur des dérapages qui font embourber et obstruer la souveraineté et la prospérité nationales ».
Est-ce possible, en démocratie pour une association, de traîner un chef d’État devant une tribune et l’obliger à s’expliquer ?
Toute requête visant le Chef de l’État pour haute trahison devant la Haute Cour de justice n’a pour finalité que sa destitution.
Clé de voûte des institutions, le président de la République est à l’abri de l’agitation politique, du verbiage politicien.
Au-dessus de la mêlée politique, le président de la République ne peut donc, en aucun, cas être assigné et comparaître pour s’expliquer sur des faits relevant de ses gestions devant nulle tribune ou nul tribunal ; nulle Cour quelle que soit sa hauteur.
La Haute Cour de justice, qui n’est qu’une émanation du Parlement, ne peut en aucun cas entendre le président sur des faits relevant de sa gestion, sa compétence se limite au seul cadre de l’article 95 de la Constitution.
S’il est du bon vouloir du président de la République de s’expliquer, il le fait devant la nation par une adresse et devant l’Assemblée nationale par message, sans jamais comparaître.
« Le Président de la République communique avec l’Assemblée nationale et le Haut Conseil des Collectivités par des messages qu’il fait lire par le Président de l’Assemblée nationale ou par celui du Haut Conseil des Collectivités. Hors session, l’Assemblée nationale ou le Haut Conseil des Collectivités se réunit spécialement à cet effet », ainsi, énonce l’article 43 de notre Constitution.
La République donne-t-elle le droit à un citoyen ou un groupe de citoyens d’ester contre le président ?
Aucune interprétation de l’article 35 de la Constitution ne permet de conclure ou même d’induire qu’un citoyen ou un groupe de citoyens puisse porter plainte contre un Chef de l’État.
Voici ce que dit cet article textuellement : « la Haute Cour de Justice est compétente pour juger le Président de la République et les Ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée nationale pour haute trahison ou à raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’État.
La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des 2/3 des Députés composant l’Assemblée nationale.
La Haute Cour de justice est liée par la définition des crimes et délits par la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits compris dans la poursuite. »
Le président de la République peut-il être poursuivi ?
En dehors du cas prévu à l’article 95 de la Constitution, le président de la République n’est pas judiciairement responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions. Il ne peut, durant son mandat, être requis de témoigner ni faire l’objet d’une quelconque action devant aucune juridiction nationale. La loi est dure, mais c’est la loi.
Est-ce la première fois qu’un président malien en fonction est poursuivi pour haute trahison ?
Oui, si l’on considère que le BIPREM a qualité de mettre le président en accusation pour ses fantasmes. Puisque sa requête est constitutionnellement improductive, il faut dire que jamais dans l’histoire un président en exercice au Mali n’a fait l’objet d’une procédure de destitution devant la Haute Cour de justice.
Est-il arrivé ailleurs, dans d’autres pays, qu’un citoyen ou un groupe de citoyens mette le président en accusation ?
Oui, le Président Thomas Yayi Boni du Bénin a fait l’objet de plainte de citoyens auprès des députés et non de la Haute Cour de justice de Porto-Novo. Avant lui, les Présidents Nixon et Bill Clinton ont fait l’objet d’impeachment. Mais dans le cas du Mali, s’agit-il d’une procédure visant à la destitution du Président IBK ? Le biprem dit qu’il veut simplement des explications.
Le Président de la République serait-il au-dessus des lois de la République ?
Le président de la République n’est pas au-dessus de la loi (nul ne pouvant l’être dans une République visant sous le règne du droit), mais c’est un principe universellement acquis en droit que le président en exercice ne puisse faire l’objet de poursuite ; en dehors du cas énoncé à l’article 95 de la Constitution malienne.
Il ne s’agit pas de la responsabilité politique qui est clairement définie par la Constitution. Ce dont il est question, c’est l’engagement de la responsabilité pénale du chef de l’État. Si au Mali on est en retard, la France a légiféré en la matière.
En France, c’est la loi organique du 24 novembre 2014, portant application de l’article 68 de la Constitution, qui fixe dans le marbre la responsabilité juridictionnelle du chef de l’État. Elle précise le régime de responsabilité constitutionnelle du président de la République et détaille les modalités de la procédure pouvant entraîner sa destitution. Il parachève ainsi le processus de mise en œuvre de la révision constitutionnelle du 23 février 2007.
La révision constitutionnelle de 2007 prévoit notamment que le chef de l’État ne peut être destitué qu’en cas de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ». Ainsi, en vertu de l’article 68 de la Constitution modifié, « quel que soit l’acte commis par le chef de l’État, cet acte ne doit pas nuire à sa fonction ». La procédure de destitution ne peut être enclenchée que par le Parlement, constitué en Haute Cour.
La loi organique précise notamment les conditions présidant à la réunion de la Haute Cour : proposition de résolution motivée, signée par un dixième des députés ou des sénateurs et ne pouvant être adoptée qu’à la majorité des deux tiers de chacune des deux assemblées.
Il détermine également la composition du bureau de la Haute Cour, ainsi que l’organisation des débats devant la Haute Cour.
Jusqu’où va l’immunité du président ?
Le principe d’immunité du Chef de l’État, pour les actes accomplis, en cette qualité et de son inviolabilité, durant son mandat est réaffirmé par la constitutionnelle n° 2007-238 du 23 février 2007, portant modification du titre IX de la Constitution française qui nous sert de balise.
En cours de mandat, seuls des «manquements à ses devoirs» incompatibles avec l’exercice de sa fonction pourront être poursuivis, selon une procédure spécifique.
Pour des actes commis avant la prise de ses fonctions ou pour ceux qui sont sans rapport avec l’exercice de ses fonctions, le Président de la République jouit d’une immunité temporaire durant l’exercice de son mandat, les procédures pouvant être engagées ou reprises un mois après l’expiration de ce mandat.
Voici ce que dit l’article 67 de cette loi française : « le Président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des dispositions des articles 53-2 et 68.
Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu.
Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions. »
De ce qui précède, on peut dire à la suite des constitutionnalistes que « le Président de la République bénéficie d’une inviolabilité temporaire jusqu’à la fin de son mandat, justifiée par la protection de celui-ci. Il n’est protégé par aucun privilège de juridiction, mais par une inviolabilité liée a sa fonction qui entraîne la suspension des poursuites (et de la prescription jusqu’à la fin du mandat) » (in Hugues PORTELLI, Droit Constitutionnel, P.200).
Réalisé par Sambi TOURÉ