L’Alliance pour la Démocratie au Mali (ADEMA-Pasj) était, avant les élections de 2013, le premier parti politique du pays et le second en Afrique après l’ANC de Nelson Mandela. Aujourd’hui, elle est la troisième force politique, après le RPM de Ibrahim Boubacar Keïta et l’URD de Soumaïla Cissé. Cette dégringolade a provoqué beaucoup de remous au sein de l’instance dirigeante du parti. Les démissions en cascade et autres « guerres » de leadership, ont heurté la cohésion et irrité les militants de l’ancien parti majoritaire. Pour recoller les morceaux et espérer figurer parmi les prétendants de Koulouba 2018, le président de l’Adema, Tiémoko Sangaré, a engagé une véritable course contre la montre pour rétablir la cohésion au sein du parti.
La dernière sortie sur le terrain des cadres de l’Adema avec à leur tête son président, le Pr Tiémoko Sangaré, date du 07 Mars 2016. C’était à Ségou. Au cours de cette rencontre dans la capitale des Balanzans, un accent particulier a été mis sur les valeurs d’honneur et de militantisme. Il s’agissait de sonner la mobilisation en prélude aux élections communales et régionales qui se profilent à l’horizon.
Si les dates ne sont pas encore connues, l’Adema a tout intérêt à se lever avant les autres. Car la machine de guerre électorale que fut l’Adema, est grippée pour ne pas dire en panne. Même si le parti boxe dans quatuor de tête, il est devancé de loin par ses rejetons du Rassemblement Pour le Mali (RPM) et l’Union pour la République et la Démocratie (URD). Ayant géré le pays pendant dix longues années, donc habitués aux délices du pouvoir, les dirigeants du parti n’ont jamais pris la distance nécessaire avec le pouvoir, pour se consacrer à la reconstruction du parti, corriger les manquements et aller de nouveau à l’assaut de Koulouba. Au lieu de ce travail d’introspection, on a, pour des besoins de gloire et de postes juteux, préféré s’aligner dans le « consensus », après sa défaite à la présidentielle de 2002.
L’alignement a contribué à la démobilisation de la base, à la déstructuration du parti et la transhumance de cadres et militants qui pouvaient trouver leur compte ailleurs. Le réveil fut brutal. A la veille de la présidentielle de 2007, se rendant compte de la forte saignée dans ses rangs, l’ADEMA fera contre mauvaise fortune bon cœur, s’abstiendra de présenter un candidat.
Au terme des dix ans de mandat d’ATT, écourté par un putsch, le parti ayant fait du suivisme beat, se retrouvait en mauvaise posture.
L’establishment étant décrié et voué aux gémonies par les putschistes et alliés, il devenait improbable pour les partis, comme l’ADEMA qui ont été présents dans les différents gouvernements pendant les 20 ans de démocratie de se refaire une virginité avant la présidentielle. Sans compter que l’effet de changement suscité par ce coup d’Etat, voulait que la vieille garde disparaisse pour de bon. Dioncounda Traoré, qui était le candidat pour 2012, du fait du coup d’Etat, s’est retrouvé, en tant que président de l’Assemblée Nationale, à gérer la transition. Il était donc disqualifié de la course à la présidentielle de juillet 2013. Il fallait trouver un autre candidat.
La commission des sages a jeté son dévolu sur Dramane Dembélé sur les 20 candidats en course. Cette décision provoqua un tremblement de terre au sein de la ruche. Pour certains cadres et responsables du parti, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Avant même la présidentielle, des leaders et des militants prennent leur responsabilité et claquent la porte. Soumeylou Boubèye Maïga et Sékou Diakité, tous des vice-présidents du parti, en font parti. La contradiction entre le président et le candidat de l’Adema à la présidentielle, dans le choix du candidat à soutenir au second tour de la présidentielle de 2013, a fini par mettre le parti à terre. Une longue traversée du désert commença pour le parti d’Alpha Oumar Konaré et de Dioncounda Traoré.
Le parti a été davantage affaibli. Aux dernières législatives, il se retrouve en troisième position avec 16 députés. Du jamais vu à l’Adema. Car, le parti comptait jusqu’en 2012, 51 députés. Un état de fait qui traduit la déliquescence de ce parti jadis craint et respecté. La démission de cadres de la trempe d’Iba N’Diaye et Oumarou Ag Ibrahim n’ont fait qu’affaiblir de plus le parti.
Il aura fallu tout le savoir faire d’un Dioncounda pour arracher un consensus autour du Pr Tiémoko Sangaré, lors du congrès de mai 2015. Malgré tout, au lendemain de son élection, des militants de Kita migrèrent vers la CODEM ; celle qu’on appelle Mama Adema à Kayes a rejoint avec de nombreuses femmes l’URD. Ironie du sort, Mama Adema a été accueilli à l’URD par Iba N’Diaye.
Nostalgique de son passé, l’Adema cherche aujourd’hui désespérément son chemin, celui de la cohésion, de l’entente, de la suprématie.
Abouba Fofana