A Bamako, les sotrama ne sont désormais plus les seuls à faire du transport en commun. Il y a aussi les taxis. Contrairement à sa vocation première, celle de transporter l’unique client jusqu’à destination après marchandage, les taxis bamakois font désormais dans le transport en commun.
En effet, il n’est plus rare, de voir plusieurs clients embarqués dans un même taxi. Les chauffeurs expliquent cette nouvelle tendance par la rareté des clients et le souci de faire la recette. « Si nous ne prenons pas beaucoup de clients en même temps, il nous serait difficile de faire la recette journalière, car, le propriétaire de la voiture attend sa recette à tout prix », explique ce chauffeur de taxi.
Au Sénégal et dans d’autres capitales sous régionales, les chauffeurs de taxis, après marchandage, conduisent le client à destination avant d’embarquer un autre. Ça, Moussa Diop, sénégalais, le savait. Mais exerçant à Bamako depuis quelques mois, il s’est fondu dans le moule. « C’est vrai qu’à Dakar les clients n’acceptent pas qu’on prenne d’autres clients quand ils ont déjà discuté le prix. Quand je suis venu exercer au Mali, je ne le faisais pas au départ, mais voyant les autres le faire et les clients qui acceptaient, je m’y suis mis », précise-t-il, sourire aux lèvres. Naturellement, c’est tout bénéfice pour lui. « Il arrive que j’ai plus de recettes, alors le reste, logiquement, m’appartient ».
Pour Aly Traoré, propriétaire de taxi, n’est nullement dérangé par cette pratique dans la mesure où il reçoit sa recette journalière. « Après tout le taxi comporte cinq places », dit-il avec ironie. Cette nouvelle pratique est encouragée par certains clients dont le seul objectif est d’arriver à destination.
Cependant, une autre frange de la clientèle, fait des misères aux chauffeurs en refusant d’être transporté en même temps que d’autres clients. C’est le cas d’Aminata Sanogo. « Je n’aime pas trop le fait d’être dans un taxi avec quelqu’un d’autre. Quand je consens à payer plus de dix fois la somme qui aurait pu me permettre de prendre une sotrama, c’est pour, en plus d’aller vite, être à l’aise. », disait-elle.
Cette pratique qui est à ses débuts, est en passe de s’installer dans les habitudes des Maliens. Même si certains clients tentent, à leur façon, de combattre cette forme de concurrence « déloyale » des chauffeurs de taxis à leurs collègues des Sotrama. Camerounaise en séjour à Bamako, Antoinette Diabang est catégorique : « si je prends un taxi c’est pour moi seul. Si le chauffeur s’avise de prendre un autre client, je descends ».
Les chauffeurs de Sotrama et de dourouni ironisent en évoquant cette pratique des chauffeurs de taxis. « Je ne comprend pas comment un taxi peut se permettre de ramasser (sic) les clients au bord des routes comme nous autres le faisons. J’ai des amis chauffeurs de taxi, il arrive qu’on en parle, ils me disent que c’est parce que les temps sont durs et que les clients se font rares. C’est pourquoi, ils le font. Mais s’ils (les chauffeurs de taxis) aiment prendre beaucoup de clients, qu’ils optent pour les Sotrama et bus », suggère Moussa Sidibé, chauffeur de Sotrama. Ce qui est sûr, le luxe de se retrouver seul dans un taxi, appartient désormais au passé dans la ville des trois caïmans.
Abouba Fofana