Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aBamako.com NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

35 ans après sa disparition : Djiguiba Kéita dit PPR se souvient de Cabral
Publié le jeudi 17 mars 2016  |  L’Indicateur Renouveau
Rentrée
© aBamako.com par Momo
Rentrée politique du PARENA
Bamako, le 20 février 2016 le PARENA a tenu sa rentrée politique 2016 au Palais de la culture




Abdoul Karim Camara dit Cabral, le leader estudiantin du début des années 1980, fait partie de ces morts qui nourrissent la lutte des peuples, les entraînant souvent jusqu’aux révolutions, qui sont “les locomotives de l’histoire”. Une conviction politique qui reste dans les cœurs de ses camarades comme Djiguiba Kéita alias PPR.



“Parmi les abominables crimes du ‘Boucher de Bamako’ (titre mérité par GMT avec le vendredi noir 22 mars 1991), l’assassinat du leader estudiantin Abdoul Karim Camara dit Cabral reste des plus emblématiques. Il fait partie de ces morts (comme celle de Norbert Zongo en 1998 au Burkina Faso) qui nourrissent la lutte des peuples, les entraînant souvent jusqu’aux révolutions, qui sont ‘les locomotives de l’histoire’.



Le dimanche 17 février 1980, les élèves et étudiants du Mali élisaient Cabral secrétaire général de l’UNEEM, en remplacement de Tiébilé Dramé qui n’était plus étudiant. L’UNEEM vivait dans la ‘semi clandestinité’ parce que dissoute depuis le 5 janvier 1980 par la soldatesque qui dirigeait le Mali depuis le 19 novembre 1968. Dans ces moments de crise, accepter d’être leader en dit toujours long sur ceux qui acceptent la charge.

Cabral en était, bien entendu. Tout dédié à son pays et à l’idéal qui l’a toujours poussé aux côtés des peuples en lutte pour leur émancipation (d’où le nom Cabral emprunté à Amilcar Cabral combattant de la Liberté en Guinée-Bissau et au Cap-Vert, crapuleusement assassiné, comme son homonyme, le 20 janvier 1973), Abdoul Karim Camara était un leader, un homme d’écoute, un partisan du consensus, chaque fois que de besoin, mais à cheval sur les principes.

Elu dans le feu de l’action, il entame un mandat d’un mois sans répit. A l’échec des négociations avec le pouvoir pour la libération de tous les élèves et étudiants arbitrairement détenus dans les cachots de GMT, il va mettre les troupes en alerte à la veille d’un jugement inique d’élèves incarcérés à Ségou.

La condamnation d’Amadou Kané, Macky Touré et autres le jeudi 7 mars dans la Capitale des Balanzans met le feu aux poudres : une gigantesque marche violente de l’UNEEM est organisée le samedi 8 mars. A bras raccourcis, la police et la gendarmerie du régime aux abois s’abattent sur les ‘insurgés’, la direction du mouvement tombe dans la clandestinité. Le soir même, évaluant la situation, le bureau de coordination se donne la tâche d’imprimer des tracts ou d’en rédiger à la main pour dénoncer la persécution et la sauvage répression dont les élèves et étudiants sont l’objet.

Nous nous souviendrons toujours de Cabral, griffonnant avec vigueur sur les tracts manuscrits, pour les rendre illisibles, les expressions ‘les élèves et étudiants torturés à la chilienne, à l’israélienne’. C’était au suivant contrôle des tâches, le mercredi 12 mars, dernière rencontre avec le secrétaire général de l’UNEEM, dans une ruelle de Bozola, non loin de l’INA.

En effet, au prochain rendez-vous fixé au dimanche 16 mars, le ponctuel Cabral n’apparut point… Il était tombé entre les griffes de la soldatesque de Moussa Traoré, torturé à la chilienne et à l’israélienne, par des Maliens, chose que lui Cabral estimait impensable.

Le Mali en ce début 1980 était tout caporalisé par l’absolutisme d’un régime militaire qui s’est accaparé du pouvoir d’Etat et régnait depuis par la terreur. C’est cet hydre que l’UNEEM affrontait en posant ses revendications démocratiques et d’amélioration des conditions d’études de ses militants.

Au moment où tout cela est encore si frais dans nos mémoires, les bénéficiaires de ce régime de dictature, profitant du relâchement, voire du renoncement à la cause dont des acteurs du Mouvement démocratique se sont rendus coupables (rappelez-vous l’assassin de Modibo Kéita et de Cabral qualifié de grand républicain !) non seulement lèvent la tête (alors qu’ils devraient raser les murs par respect envers leur peuple) mais, dans une posture de réécriture de l’Histoire, tentent même de dépeindre le règne de 23 ans de dictature comme l’âge d’or de l’épanouissement du peuple malien martyr. Nous y reviendrons.

Ce dimanche 16 mars 1980 donc, Cabral entre les mains de ses assassins va subir ce que subissaient les patriotes et résistants chiliens sous la dictature de Pinochet ou ce que subissent encore aujourd’hui les combattants palestiniens sous l’occupant sioniste, sous les yeux d’une communauté internationale toute de complaisance envers son enfant gâté : Israël !

C’est ainsi qu’après l’avoir torturé à la chilienne et à l’israélienne, le pouvoir fait lire à Cabral drogué, l’impensable communiqué dans lequel celui qui a passé sa vie à se battre pour son idéal d’un Mali de justice et de progrès dit “la lutte est terminée !”. C’était son adieu à ses camarades, car le lundi 17 mars 1980, il nous passait le flambeau en continuant, outre-tombe, à nous ‘abreuver’ de José Marti, ce penseur et homme politique cubain, grand inspirateur de Cabral : ‘Lorsque l’on meurt dans les bras de la patrie reconnaissante, la mort n’existe plus, la prison est brisée, et renaît avec la mort, la vie’”.

Bréhima Sogoba