Depuis un certain temps, l’arrestation de hauts gradés de notre armée nationale défraie la chronique. Les faits reprochés aux incriminés sont relatifs à la surestimation des effectifs et non le détournement des droits des hommes que sont les salaires et/ou les primes, comme certains esprits mal intentionnés tentent de faire croire à l’opinion nationale. Manipulation de l’opinion ou simple erreur de méconnaissance des terminologies ? La question taraude les esprits dans les rangs de la haute hiérarchie militaire qui commence à s’en inquiéter. Le hic qui fait tilt ici, c’est la vitesse à laquelle les nouvelles sont divulguées par les médias, là où il faut enseigner la discrétion. Car, il y va du maintien de la cohésion au sein de nos troupes sur les théâtres des opérations. Car, ces genres de nouvelles portent en elles les germes d’une déstabilisation de notre Institution militaire et par delà les piliers centraux de l’Etat. Car, nul n’ignore que c’est la rupture de confiance entre la hiérarchie militaire et les hommes sous le règne du président Amadou Toumani Touré qui a entrainé la déconfiture de notre armée au point qu’elle a reculé face à l’ennemi, qui s’est facile emparé des trois grandes villes du septentrion malien.
Malheureusement, l’on a l’impression que quelqu’un tire non seulement les ficelles de cette campagne de déstabilisation, mais en tire des dividendes tant politiques que matériels. Car, les médias sont aussi informés à la seconde près de toutes les opérations de conduite d’officiers à la Direction Générale de la Sécurité d’Etat (DGSE malienne) pour besoin d’enquête. Quand bien même que convocation ne veut pas forcement dire accusation dans la procédure de la manifestation de la vérité. Il est donc normal que la médiatisation outrancière de cette affaire inquiète l’Institution militaire au point qu’elle attire l’attention de l’Autorité de Tutelle. Mais, celle-ci ne semble pas mesurer la gravité de la situation. Sinon, elle ne prendrait pas le risque de trainer les pieds pour réagir afin de mettre fin à ce que certains hauts gradés qualifient de cabale contre les hommes en treillis.
Au fait, il est étonnant de noter une différence de traitement entre les personnels civils et militaires qui sont tous les deux concernés par la même incurie. L’affaire remonte au dernier contrôle physique des agents de la fonction publique. A cette occasion, les contrôleurs ont détecté des cas d’agents fictifs à la fois dans les rangs des FAMa qu’au niveau des différentes directions centrales et organismes spécialisés de l’Administration d’Etat. En son temps, les contrôleurs avaient découvert 900 agents fictifs émargeant sur le Trésor public pour un montant estimé à une soixantaine de milliards FCFA par an. Cette perte de ressources concerne donc à la fois l’Administration militaire que civile. Pourquoi faut-il donc chercher coûte que coûte des poux sur la tête des hauts gradés de notre Armée nationale, si ce n’est pour les humilier, au risque de saper le moral de nos vaillants combattants qui réalisent des victoires sur les théâtres des opérations en ce moment ? Le personnel civil est-il plus propre ou plus compétent que les militaires ? Sinon le revers de ces genres de manipulations peut s’avérer fâcheux. En livrant notre hiérarchie militaire à la vindicte populaire, il y a de forte chance de faire le jeu de ceux ou celles qui ont intérêt à voir nos hommes se tirer dessus inutilement.
Car, la campagne d’intoxication médiatique risque de démobiliser les troupes engagées sur le front. Elles ne voudront plus se donner à la mort en se disant que seuls les chefs tirent profit de leur misère et se foutent du devenir de leurs familles après leur mort. Nul n’ignore les conséquences d’une telle éventualité. Les mouvements d’humeur qui ont conduit à la chute des trois grandes villes du nord à la suite des évènements de mars 2012 sont très récents pour nous obliger à s’y arrêter. En son temps, la chaîne de commandement s’était brisée du fait de la rupture de la confiance entre les hommes et la hiérarchie militaire au motif qu’ATT était de mèche de avec les rebelles. D’autres militaires pointaient du doigt la modestie des droits qui n’étaient que de 600 FCFA par jour avant d’être porté à 1000 FCFA sous la pression des hommes. Après la chute du régime du général président ATT, une prime spéciale a été accordée à tous les hommes engagés sur les théâtres des opérations. C’est ce que les soldats appellent « la prime Haya », elle fait 50 000 FCFA par mois plus la PGA (Prime d’Alimentation Globale) qui fait 35 000 FCFA le mois actuellement au lieu de 30 000 FCFA dans un passé récent. C’est dire que chaque homme sur le front gagne en plus de son salaire 85 000 FCFA de primes cumulées. Aucun chef militaire ne peut don se hasarder de toucher à un centime de ce montant s’il ne veut pas s’attirer la foudre de ses hommes. Comme pour dire qu’il ne s’agit pas des droits des hommes qui est en cause, mais la surestimation des effectifs. Outre, en sus du traitement pécuniaire, les Pouvoirs publics s’emploient à doter nos hommes de moyens conséquents pour mener à bien leur mission. Ce n’est pas le moment de les distraire.
Aujourd’hui, avec les efforts conjugués des plus Hautes Autorités de notre pays à mettre nos hommes dans le minimum de conditions de vie et d’exercice de leur métier et le travail pédagogique (le réarmement moral des hommes) entamé par le commandement auprès des hommes, la confiance sans laquelle rien ne marche commence à revenir dans les rangs. La discipline qui est le socle sans lequel il n’y a point d’armée se reconstruit petit à petit. Et les hommes commencent à reprendre confiance en leurs chefs. Ce n’est donc pas ce moment de semer des troubles entre les miliaires ou de déstabiliser l’Institution militaire pour des raisons inavouées avec pour conséquence : la démobilisation des troupes. Car, ces genres de manipulations de l’opinion, d’où quelles viennent sont de nature à créer le doute dans les esprits des combattants qui vont rechigner à s’engager à fond dans les combats.
A. Diakité