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Paix et réconciliation nationale: Le gouvernement trimbalé par les marchands d’illusions
Publié le mardi 29 mars 2016  |  Le Reporter
Premier
© aBamako.com par A.S
Premier conseil des ministres du gouvernement Modibo KEITA
Le Conseil des Ministres s`est réuni en session ordinaire, le mercredi 14 janvier 2015 dans sa salle de délibérations au Palais de Koulouba sous la présidence du Président de la République, Monsieur Ibrahim Boubacar KEÏTA.




Comme s’y attendaient de nombreux observateurs, le très attendu forum de Kidal pour la paix et la réconciliation nationale a été reporté «sine die». Initialement prévu du 27 au 30 mars 2016, il n’aura peut-être plus jamais lieu. Même si les Mouvements armés se seraient partagé 400 millions. C’est le Secrétaire général du GATIA, Fahd Ag Almahamoud, qui a eu le courage d’annoncer le report du forum de Kidal (27-30 mars 2016) à la demande du gouvernement malien.
Même si la crainte d’une riposte d’Iyad Ag Ghali peut en partie justifier ce report, qui pourrait être aussi une annulation pure et simple, des raisons objectives ne manquent pas non plus pour l’expliquer. À commencer par celle de la représentativité. Les Mouvements armés ne sont jamais parvenus à s’entendre entre eux sur la qualité des participants qui devaient être environ 300 invités. Selon des informations concordantes, Mme Nina Wallet Intalou, est ainsi déclarée persona non grata par ses sœurs de Kidal, sa ville, alors qu’elle est supposée représenter les mouvements rebelles dans la Commission vérité, justice et réconciliation (CVJR). Sans doute une cuisine interne qui est loin d’être une préoccupation nationale.
Mais, ce qui est réellement révoltant, c’est quand une composante de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) s’oppose à la présence des autorités maliennes dans la capitale de l’Adrar des Ifoghas. Mais, comment les Maliens auraient-ils pu digérer l’absence du président Ibrahim Boubacar Kéita et de son Premier ministre Modibo Kéita (visiblement moins audacieux que Moussa Mara) ? La tentative d’explication de la cellule de communication de la Primature a été un camouflet pour le chef du gouvernement. Si pour le cabinet du PM le forum de Kidal est le parachèvement du processus de réconciliation entamé entre la CMA et la Plateforme à Anéfis, les Maliens lui assignaient un autre objectif plus pertinent : le retour de l’Administration et des Forces armées à Kidal ! Le gouvernement a été tenu écarté du processus d’Anéfis. Tout comme de la récente signature d’un Pacte de cohabitation pacifique entre la CMA et la Plateforme à Kidal. Alors, pourquoi devait-il financer une messe à laquelle la participation du chef du gouvernement n’est pas la bienvenue ? Et curieusement, pendant le séjour du Conseil de sécurité (4-6 mars 2016), le président IBK avait revendiqué ce forum comme une initiative commune pour avancer dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale. Nous savons également que la libre circulation des personnes et des biens ainsi que le retour de l’administration centrale sur l’ensemble du territoire national étaient à l’ordre du jour. Cette incompréhension est aussi en partie l’une des raisons du report de ce rendez-vous flou qui avait pourtant suscité beaucoup d’espoir, notamment par rapport au règlement définitif de la situation de Kidal. Malheureusement, le gouvernement et les rebelles n’ont visiblement jamais réussi à donner un contenu consensuel à ce forum. Sans compter que les dissensions suscitées entre les composantes de la CMA qui se sont affrontées pendant quelques jours à Ber. Quelle était la vraie motivation des groupes armés à vouloir organiser une telle rencontre à Kidal ? C’est la question que nos compatriotes ne cessent de se poser.
Quand le gouvernement se plaît à être le dindon de la farce
Une interrogation devenue encore pertinente avec ce report discrètement annoncé alors qu’on avait eu recours à une campagne médiatique tous azimuts pour porter l’organisation à la connaissance de l’opinion nationale et internationale. Notre analyse est que l’idée du forum n’était qu’un subterfuge pour donner satisfaction à la CMA sur l’une des revendications qui lui tiennent à cœur : l’installation des autorités transitoires ou intérimaires ! Le gouvernement a d’ailleurs donné le ton mercredi en nommant un nouveau gouverneur à Kidal pistonné par la CMA et acolytes. Mais, pour ce qui est des conseils communaux et de cercles ainsi que des Assemblées régionales, il faut le quitus de l’Assemblée nationale.
Une fois n’est pas coutume, le Parlement ne veut pas être une caisse de résonnance pour le gouvernement. Il joue à la prudence sur ce dossier qui est en fait une patate chaude. Cela est d’autant raisonnable que cette question est vraiment sensible. Non seulement presque tous les élus du nord voire du pays sont contre ce projet de loi, pour lequel les rebelles et la médiation nationale ainsi que la Minusma mettent la pression sur les autorités de Bamako. D’ailleurs, pour beaucoup d’observateurs, Mohamed Ag Erlaf est mandaté par les groupes armés, tendance CMA, pour créer les conditions de l’autonomie de la supposée Azawad. En tout cas, notre petite enquête sur la question nous a permis de comprendre pourquoi le Département d’Abdoulaye Idrissa Maïga, présentement ministre de l’Administration territoriale), a été amputé de la Décentralisation. Réputé pour son intégrité et son intransigeance quand la patrie est menacée, ce consultant et rigoureux leader politique atypique s’était montré intraitable sur la question des autorités intérimaires exigées pour affaiblir l’Etat dans le septentrion malien. Formées de la CMA, de la Plateforme et de l’administration d’Etat, celle-ci est en fait le dindon de la farce car elle n’aura presque pas de marge manœuvre, car pouvant vite être mise en minorité. Si c’est une disposition de l’Accord signé à Bamako en mai et juin derniers, elle apporte de l’eau au moulin de ceux qui pensent que celui-ci porte les germes du fédéralisme à travers l’autonomie de l’Azawad. Aller dans ce sens est en tout cas une preuve de l’irresponsabilité de nos dirigeants actuels. Comment peut-ont mettre à la touche politique des élus qui sont restés avec la République au profit de ceux qui ont pris les armes pour menacer son intégrité ? Comment imposer à tout le nord du Mali le diktat des rebelles qui revendiquent leur Azawad ? À quoi aurait alors servi la résistance de la jeunesse de Gao, une cité qui n’a jamais courbé l’échine ni devant les terroristes ni face aux rebelles ? Pourquoi modifier uniquement la loi en défaveur des élus du septentrion ? Autant de questions auxquelles les députés doivent objectivement répondre avant de voter cette loi absurde. Opposé à la mise en place des autorités transitoires, le ministre de l’Administration territoriale pense qu’il faut plutôt vite aller aux élections. Et pourquoi les mouvements armés ne déposent-ils pas définitivement les armes pour créer les conditions de l’organisation des élections communales et régionales ?
La paix, mais à tout prix !
Avant de voter cette réforme, les élus de la nation doivent être capables d’expliquer aux Maliens pourquoi ces groupes armés, qui ont commis toutes ces forfaitures dans ce même nord du Mali et qu'ils ont livré à Aqmi et aux autres réseaux criminels, doivent aujourd’hui constituer les délégations spéciales qui géreront les institutions locales en attendant des élections ? En tant que représentation directe du peuple, l’Assemblée nationale n’a pas intérêt à jouer avec la vie de cette nation comme ce gouvernement trimbalé dans tous les sens par des renégats. Les élus de la nation ne doivent surtout pas oublier que la paix est une aspiration légitime de tous les Maliens, mais que ce peuple pacifique ne veut pas non plus cette paix à tout prix. Aujourd’hui, il est clair que ce sont les mouvements rebelles qui tirent tout le monde par le bout du nez. Sentant qu’ils ne serviront plus à rien et surtout qu’ils ne pourront même plus servir de marionnettes à leurs parrains sans leurs armes, les leaders jouent à la prolongation afin de mieux positionner leurs pions et surtout assurer financièrement leurs arrières. «Je ne pense pas que le gouvernement est en train de se laisser faire, mais je crois qu'il est acteur à part entière de cette ignominie», écrivait récemment sur les réseaux sociaux un compatriote dépité par la capitulation de l’exécutif malien. Un avis que partagent de nombreux observateurs interrogés sur la question.
À notre avis, la complicité du gouvernement ne doit même pas faire l’objet de doute d’autant plus qu’il est signataire de cet accord qui cautionne les autorités intérimaires ou transitoires. Comment des dirigeants d’un Etat souverain peuvent-ils accepter de signer n’importe quoi comme des bandits signeraient leur reddition avec un pistolet braqué sur la tempe ? Nous savons déjà que, conformément aux vœux des indépendantistes, l’Accord autorise une intégration des ex-combattants qui seront représentés à plus de 50% dans les forces chargées de la sécurisation du nord. Autrement, les rebelles assureront «légalement la sécurité du nord et l’armée loyaliste au sud». Avec ces autorités intérimaires, c’est aussi l’administration qui leur revient. Que restera alors comme symbole de l’autorité de l’Etat dans le septentrion malien ? Comme l’ont toujours défendu certains compatriotes, «cela relève de la trahison vis-à-vis de la nation Malienne». Les regards sont tournés sur la Mouvance présidentielle pour un sursaut d’orgueil.
Jusqu’à quand ce gouvernement va-t-il refuser d’être trimbalé par les rebelles et leurs alliés de la communauté internationale pour se soucier réellement des préoccupations des Maliens ? Jusqu'à quand va-t-il refuser d’être mené par le nez par des leaders de la CMA qui le font chanter pour s’enrichir alors qu’ils ont tous fait allégeance à Iyad Ag Ghali afin de pouvoir continuer également à profiter de leurs trafics ? Notre constat est que le gouvernement s’est déjà embourbé dans la mise en œuvre d’un Accord dont les failles deviennent de plus en plus évidentes avec sa mise en œuvre. D’où la nécessité pour le peuple malien de se remobiliser pour redresser le tir, pour contraindre le pouvoir à reprendre connaissance et conscience qu’il conduit cette nation au chaos en bradant sa souveraineté dans le septentrion.
Et pour ce faire, les patriotes ont besoin de leaders. Peut-on compter sur la société civile et l’opposition politique pour mener la contestation ? Ce n’est pas évident parce qu’une grande partie de ces forces (société civile) sont déjà à la solde du gouvernement et le soutiennent dans son aveuglement. Peut-être alors que le salut viendra des élus de la majorité présidentielle qui, dans un sursaut national, peuvent rejeter cette loi soumise à leur approbation par le ministre de la Décentralisation et des Réformes de l’Etat. Pour une fois, nous espérons que les intérêts de la nation vont l’emporter sur les considérations politiques. Le meilleur service qu’ils puissent rendre à IBK aujourd’hui, c’est de dire non à ce texte aux multiples risques. Nous espérons que les députés ne voudront pas être jugés par l’histoire comme complices d’un gouvernement qui a «vendu» le septentrion ? Toute chose que les dirigeants actuels reprochaient au Général-président Amadou Toumani Touré pendant leurs campagnes visant à discréditer ce dernier et se faire passer pour l’homme de la situation aux yeux des Maliens. Un piège dans lequel nous sommes tombés à plus de 77,6 % en 2013. Sentinelles de la démocratie et de l’intégrité territoriale, notre devoir est de sonner l’alerte. Et aujourd’hui, personne ne dira qu’il n’a pas été averti à temps du péril que le président de la République et son gouvernement font courir à notre nation ! En la matière, le silence et l’inaction ont valeur de complicité !
Hamady TAMBA
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