En milieu bambara, on ne peut pas parler de dozo (chasseur) sans faire allusion à Kontonron et Saanè.
Alors, que représente ces personnages pour les dozos ?
En effet, c’est à la suite de la grande sécheresse d’Ouagadou que sont nées les notions de Kontonron et Saanè. Auparavant, on les appelait chasseurs de l’arc ‘’bolomafilèlaw’’. Ainsi, la légende raconte qu’il y avait deux amis chasseurs qui ont décidé de traverser la capitale d’Ouagadou pour aller à l’Ouest, à cause de la sécheresse ; qui avait chassé les animaux. Pour cela, chacun était accompagné de son chien et il y avait une femme qui avait décidé d’aller à l’Est avec son bébé au dos.
Donc, les chasseurs et la femme se sont croisés et ils lui ont demandé de l’eau, qui était contenue dans une calebasse couverte de van. Cette bonne dame refusa de leur offrir son eau, car la distance qu’elle avait à parcourir était considérable. Les deux chasseurs ont finalement utilisé la force pour boire l’eau en question et ont eu même à verser le reste pour leurs chiens.
La femme, remontée, commença à les insulter gravement. Et par la suite, les deux chasseurs ont tué l’enfant que portait cette bonne dame au dos avec une hache ‘’Sènè kala’’. Ils ont ensuite mangé la viande du bébé. C’est dans ces conditions que Dieu a maudit les chasseurs et dans cette malédiction, le gros chien a tué le petit chien et ainsi de suite : le propriétaire du petit chien a tué celui du gros chien, ensuite, il retourna son arme contre lui-même et se suicida.
Après tous ces morts, la femme continua à vociférer. Ce qui amena Dieu à ramener les deux chasseurs et leurs chiens à la vie. Mais l’enfant resta toujours mort. C’est dans ces conditions que la femme et les deux chasseurs vont entreprendre un pacte dont le respect consistera au fait que les deux chasseurs travailleront pour la femme jusqu’à leur mort : C’est ainsi que sont venues les notions de Saanè (Femme) et Kontonron (les chasseurs).
Et pour valider le pacte, après la mort des deux chasseurs, ils ont rassemblé certains éléments des corps des trois personnes : les oreilles de l’enfant, la matière fécale des chasseurs, les feuilles d’arbre utilisés pour laver leurs cadavres, les morceaux de calebasse et le van (Lèfè) qu’ils ont enfoui dans une termitière pour que ce pacte ne disparaisse plus jamais. Et le véritable nom qui lui a été donné est le ‘’Dankoun’’ (Le dankoun n’est jamais vide) ; cela signifie : l’endroit où deux chemins se rencontrent. C’est pour toutes ces raisons qu’on rencontre toujours les termes Kontonron, Saanè et Dankoun chez les dozos.
Pour être initié à la chasse, il suffit de fournir deux colas rouges, deux coqs rouges, une gourde de dolo, une calebasse de crème et une calebasse de mil écrasé (moukou fara), qu’on dépose sur le dankoun à la suite d’un sacrifice et l’initiation prend effet.
Les interdits
- Un chasseur ne courtise jamais la femme d’autrui ; c’est prohibé et c’est du ‘’faden to’’ ;
- Il ne vole jamais ;
- Il ne calomnie pas …
C’est dire que le peuple bambara connaissait les 10 commandements bien avant l’histoire des religions révélées. Tout ce qui est interdit par la Bible et le Coran l’est aussi dans la communauté des chasseurs, excepté l’hydromel dont l’abus est condamné.
Comment devient-on chef des chasseurs ?
Les éléments qui comptent ici sont : l’âge, la sagesse, l’humilité, l’honneur, la dignité, la citoyenneté et l’habitat. Les chasseurs construisent une résidence pour leur chef, si ce dernier n’en possède pas. Un étranger ne peut être chef des chasseurs d’une contrée donnée. C’est un élu dont le mandat prend fin à sa mort. On ne dit jamais en milieu bambara l’expression ‘’ancien chef des chasseurs’’.
Bourama Coulibaly, animateur-producteur ORTM Mopti