Tombouctou, la cité des 333 saints, est aujourd’hui en proie à l’insécurité. Malgré la présence des forces de sécurité du Mali, des forces de la Minusma et de Barkaane, on assiste à une recrudescence du banditisme. L’enlèvement, le lundi dernier, de l’ambulance du CSref de la ville par des individus armés et non identifiés, est encore dans tous les esprits. Et selon les autorités de la ville, la menace terroriste, caractérisée par des actes de propagandes, est permanente. L’administration malienne reste toujours absente dans beaucoup de localités de la région de Tombouctou. Une visite de terrain avec la Minusma nous a permis de participer aux patrouilles qu’effectuent les casques blues dans la ville sainte. Et si des efforts considérables sont déployés pour sécuriser la région, la situation sécuritaire reste fluctuante.
Du 05 au 07 avril 2016, la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) a organisé une visite de terrain à Tombouctou avec les journalistes. L’objectif de cette visite est de permettre aux journalistes d’avoir un aperçu réel et concret des activités de la mission onusienne au Mali et d’interagir avec les Casques Bleus qui opèrent dans le nord pour la sécurisation et la stabilisation du Mali.
Cette visite était guidée par Piergiorgio Paglialonga de l’information publique au bureau de la Minusma de Tombouctou. Plusieurs activités ont été menées durant ces trois jours dont les patrouilles de nuit et de jour, la rencontre avec l’imam de Tombouctou, Abdrahamane Ben Essayouti et bien d’autres. Au cours de cette visite de 72 heures, la population à travers l’imam Ben Essayouti a fait savoir que l’absence de l’administration malienne dans la région est déplorable.
Le premier acte de cette mission de trois jours fut la visite de l’Imam de la grande Mosquée de Djingareyber de Tombouctou, Abdramane Ben Essayouti, le mardi 05 avril aux environs de 17h. Selon l’imam, l’insécurité persiste dans la citée des 333 saints d’où la nécessité d’équiper l’armée malienne avec des hélicoptères de dernière génération. L’imam a aussi déploré l’absence de l’administration dans certaines localités de la région de Tombouctou. Après cette causerie débat avec l’imam, c’est fut la patrouille de nuit mixte avec UNPOL (Police Minusma), la police malienne et la garde nationale. Commencée à 23h, elle prendra fin à 2h du matin. Durant la patrouille, on apercevait quelques noctambules, regroupés autour du thé, entrain de causer. Certains restaurants et de boutiques de la ville étaient encore à la fin de la patrouille. La patrouille nocturne à bord des véhicules blindés de la Minusma a sillonné quartiers de la ville de Tombouctou.
Patrouilles salutaires
L’un des avantages de ces patrouilles, selon la Minusma, est de dissuader les bandits à commettre des forfaits et de rassurer la population. Selon le Néerlandais Remco Leon de la police Minusma, chaque jour, la patrouille est effectuée. « Auparavant, il y avait des difficultés de langue entre nous et la population mais maintenant, la population apprécie réellement ces patrouilles nocturnes », explique Constant Zanu du contingent Béninois.
La deuxième journée (mercredi 6 avril 2016) de cette visite a débuté par la rencontre avec le commandant de la région militaire de Tombouctou, le Colonel Oumar Diarra qui a fait l’état des lieux de la situation sécuritaire dans sa zone de commandement et ses relations avec la Minusma et la Force Française Barkhane. « La situation est calme à Tombouctou car il n’y a pas de belligérance entre les groupes armés d’une part et d’autre part entre l’armée malienne et les groupes armés. Mais la menace terroriste, caractérisée par des actes de propagande, est présente. La sécurité et la défense nationale est notre mission régalienne. La Minusma et Barkane sont là en appui », a-t-il dit. Avant d’ajouter que la collaboration entre les Forces armées maliennes (Famas) et les forces étrangères (Minusma et Barkane) se passe bien.
A l’en croire, la dernière attaque terroriste dans la ville date du 5 février 2016 au camp de la Minusma où était basé le contingent Nigérian. L’armée malienne a contribué à la neutralisation des terroristes qui s’étaient retranchés dans le camp, a précisé le Commandant Diarra. Il a évoqué l’immensité de la zone non contrôlé, le manque de personnel, la floraison des sites de regroupement des groupes armés qui causent d’énormes problèmes. Selon lui, le cantonnement des groupes armés sera fait sous peu. Et de poursuivre que la mise en œuvre de la loi de programmation militaire est en cours. Le commandant Diarra a souligné quelques acquis dont le redéploiement dans les positions initiales, la tenue des opérations autonomes, la reprise du moral et du professionnalisme des troupes, l’amélioration des conditions de vie des soldats, le soutien de la population. « Tout le monde veut le retour de l’Etat malien au nord », insiste-t-il.
Comme perspective, il envisage un redéploiement encore plus large sur le terrain. Enfin, le Colonel Diarra s’est réjoui des formations initiées par la Minusma au profit de ses hommes en vue du renforcement de leur capacité. Dans un entretien a bâton rompu avec Piergiorgio Paglialonga et sa collègue, Oumou Maïga de l’information publique au bureau de la Minusma de Tombouctou, les journalistes ont appris que beaucoup de sites ont été réhabilités par la Minusma à Tombouctou. Parmi ces sites, on peut citer: le marché de poisson et de bétail, la gendarmerie nationale, le stade, l’électrification de Korioumé. Il a aussi mis l’accent sur 155 projets à impact rapide dont certains sont en cours de mise en œuvre.
En outre, Piergiorgio a rappelé que le mandat de la Minusma ne l’autorise pas à lutter contre les terroristes. Comme des soldats, les journalistes ont participé à la patrouille de Korioumé et de Kabara, deux villages situés à quelques kilomètres de Tombouctou. Ces patrouilles effectuées entre midi et 14h étaient dirigées par Constant Zanu du contingent Béninois secondé par Matias du contingent Allemand. A Korioumé, le sergent de l’armée malienne, Amadi Kanté affirme que la Minusma patrouille le secteur deux fois par jours. A Kabara, le chef de village, Amadou Maïga a apprécié le concours de la Minusma.
Après une pause, les hommes de medias ont été briefés par le contingent Salvadorien sur le rôle des trois hélicoptères pré- positionnés sur le tarmac de Tombouctou. Selon le Major Aleman et son adjoint Barrera du Salvador, ces hélicoptères ont pour mission de conduire des opérations dans le secteur ouest (Tombouctou). Ils (les hélicoptères) sont prêt, dit-il, à mettre le feu, à faire des escortes et à évacuer des blessés. A l’en croire, les hélicoptères ont fait 350 sorties pour soutenir les opérations. A ses dires, ces vols peuvent faire près de 3h de vol. Au cours de ce briefing, une projection a été faite pour démontrer la capacité d’opération de ces hélicoptères visités par les journalistes.
Axe Goudam-Tombouctou : un véritable casse tête à banditisme récurrent
De briefing en briefing, cette fois-ci Sylvain du Pontavice, l’un des chefs militaires Minusma à Tombouctou de nationalité Française a développé la situation sécuritaire sur le terrain, le déploiement des unités et les différentes opérations menées ou en cours d’êtres menées par ces hommes.
Pour Sylvain, la situation sécuritaire est fluctuante caractérisée par une certaine stabilité. Puis, il a cité les différents contingents qui opèrent dans le secteur ouest dont le contingent Burkinabé, Togolais, libérien, Cambodgien, Egyptien, le contingent de Bengladesh. « On a un peu tous les pays du monde ici », a-t-il dit. Avant d’ajouter que ces hommes mènent des opérations de sécurisation des sites de la Minusma, des sites de cantonnement. En outre, dit-il, les casques bleus font des escortes de convois, des escortes de personnalités, des patrouilles de longue ou de courte durée et d’autres opérations au profit du secteur. Aux dires de Sylvain, la collaboration avec les autres forces se passe bien car chaque samedi à 10h, il y a la rencontre au camp des Famas entre la Minusma, les Famas, la Cma (Coordination des mouvements de l’Azawad) et la Plateforme.
En réponse aux questions, l’orateur a affirmé que la route Goundam-Tombouctou est un véritable casse tête du fait du banditisme récurrent sur l’axe. La journée de marathon a pris fin par l’entretien avec le Commandant du secteur Ouest, le Colonel Suédois Larsson. Selon le Commandant Larsson, l’ONU est un cadre où tous les pays du monde peuvent se retrouver et travailler ensemble. Avant d’ajouter que la Minusma compte 11 000 Casques Bleus dont 1,7% sont des femmes. A l’en croire, le contingent Suédois détient des drones non armés, sans pilote avec des cameras qui leurs permettent de faire des opérations de reconnaissances et d’autres missions de renseignement. Ces trois jours de mission ont permis aux hommes de medias de voire de visu le travail abattu pas les différentes forces pour maintenir la paix et la quiétude dans la sixième région administrative du Mali.
Aguibou Sogodogo, envoyé spécial à Tombouctou