De l’avis du président Burkinabé Roch Kaboré, le déploiement du GIGN (unité d’élite de la Gendarmerie) fièrement annoncé par le Ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, n’est nullement d’actualité. «Nous ne nous sentons pas concernés» a—t-il dit. Et le Mouvement burkinabé des droits de l’homme et des peuples (MBDHP), d’évoquer «le départ des troupes étrangères sur nos sols» non sans faire allusion à leur inefficacité. Qu’en pense Bamako ? Ici, c’est le Directeur Général de la Gendarmerie qui a tenté de donner un début de réponse à la question qui taraude désormais l’esprit de nombre d’Africains dans cette partie du continent.
«Pour faire face à toute nouvelle crise de terrorisme, des éléments du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) seront déployés à Ouagadougou».
L’annonce a été faite à Abidjan, le 15 mars dernier soit deux jours après les attentats de Grand-Bassam qui ont tué 19 personnes, par le ministre français de l’intérieur, Bernard Cazeneuve.
La déclaration n’a pas été du goût des autorités et de la société civile Burkinabés.
«Nous ne nous sentons pas concernés»
En réponse, le président Roch Kaboré a, à la faveur d’un point de presse le 03 avril dernier à Bobo Dioulasso, clarifié la position de son pays : «Concernant le déploiement du GIGN, nous avons eu cette information comme vous sur France Inter (…). Nous avons considéré que nous ne nous sentons pas concernés. Le minimum dans cette matière, c’est d’informer les plus hautes autorités du pays et de voir s’il y a la possibilité ou non de le faire… Toute information que nous apprenons par la radio n’engage que ceux qui font leurs déclarations et ne nous engagent pas, puisque de façon officielle, nous n’avons pas été saisis sur ce déploiement… Et nous avons d’ailleurs le même jour, dit à l’ambassadeur de France tout notre mécontentement sur cette procédure».
En marge de l’incident diplomatique évident entre les autorités des deux pays, la société civile Burkina a, elle aussi, vivement réagi. «Une telle annonce aurait dû être faite par les autorités [burkinabé]. On ne peut pas se dire souverain et continuer à être le poussin d’une grande puissance», a laissé entendre Chrysogone Zougmore, président du Mouvement burkinabé des droits de l’homme et des peuples (MBDHP).
Le même, quelques instants auparavant a fait publier un communiqué demandant «le départ des troupes étrangères sur nos sols». «En l’espace de quatre mois, il y a eu trois attaques dans la sous-région: Bamako, Ouagadougou, et maintenant Grand-Bassam. Force est de constater que la présence des troupes étrangères sur nos sols n’a pas empêché les djihadistes d’attaquer. Cette présence nous crée plus de problèmes qu’autre chose».
Dans le même registre, les autres organisations de la société civile Burkina s’interrogent sur la présence des troupes françaises au Faso. N’est-est-elle de nature à exposer à exposer davantage le pays à la menace terroriste ? Ce, d’autant qu’AQMI menace de s’en prendre aux pays participant, aux côtés de la France, à l’opération militaire «Barkhane».
Au-delà de la menace de représailles, il faut dire que les troupes étrangères au Mali ne sont pas encore parvenues à convaincre les opinions africaines de l’efficacité de leur présence. La preuve !
Belmoktar, Iyad, les attentats…
Plusieurs fois annoncé pour mort, Belmoktar est toujours réapparu plus fort et plus meurtrier que jamais. Avec Iyad Ag Ghali, ils ont revendiqué la quasi-totalité des attentats commis en 2015 – 2016 dans cette partie du continent. Pis, ils sont parvenus à étendre leurs tentacules dans les régions sud jusque-là épargnée.
Et pourtant, sont censées opérationnelles et à leur traque, Barkhane ainsi que les forces onusiennes. C’est donc à leurs nez et barbe qu’évoluent les terroristes avec une facilité déconcertante. En somme, l’on est en droit de douter de leur efficacité et surtout, de craindre un enlisement. A propos, le président Obama a récemment rappelé à juste titre la nécessité de combattre le terrorisme mais aussi dénoncé le «merdier» libyen à l’origine de la présente situation en Afrique. Et de comparer l’ancien président français d’«excité» qui cherchait à «claironner ses succès…». Et voilà le résultat !
Serions en présence d’un scénario similaire avec le déploiement à outrance des troupes française sur le continent ? Reste à savoir !
B.S. Diarra