Détournement, blanchiment aggrave, extorsion et association de malfaiteurs dans une affaire de 200 kilos d’or. L’ancien Président de la République du Mali (1992 – 2002) Alpha Oumar Konaré, doit en principe comparaitre, le 14 avril prochain, devant la Chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris, siégeant au Palais de justice. L’ex- président du Mali est poursuivi pour une affaire de 200 kilos d’or courant son mandat, en 1999, suite à une plainte déposée par Moussa Diallo, un Malien résidant en France depuis plusieurs années. Il est reproché à Alpha d’avoir contribué à la libération de malfaiteurs, notamment Ibrahim Bah (beau-frère du Président Konaré) Toriba Diarra (son chauffeur à l’époque) Doussou Doumbia et Salim Doucouré alors qu’ils avaient été arrêtés et mis en prison à Conakry. Pour la même affaire, ces personnes ont été déjà condamnées chacun par le Tribunal de Première instance de la Commune V à deux ans d’emprisonnement ferme et au payement de 969 millions de FCFA. Malheureusement, cette décision n’a jamais été exécutée par la justice malienne.
L’ancien président de la République du Mali (1992 – 2002), Alpha Oumar Konaré est cité dans une affaire d’or par un Malien résidant depuis plusieurs années en France. Il se nomme Moussa Diallo, né en 1946 à Fanga. Cet ingénieur fut un haut cadre de l’administration française. C’est ainsi qu’il avait créé une société dénommée “Etablissement Général Bâtiment Diallo & Fils” dont le sigle est “Egbdf”.
Ce Malien qui met en avant le développement socio-économique de son pays, a séjourné à Bamako courant décembre 1999. C’était dans le souci de contribuer à l’essor du Mali. Pour ce faire, Moussa Diallo était accompagné par l’un de ses amis du nom de Wolfgang Scholz. Ce dernier fut l’un des dirigeants de la société Système Immatriculée en France. Malheureusement, ces deux personnalités sont tombées dans le piège des hommes de mains des dirigeants du pays sous le régime du Président Alpha Oumar Konaré.
“Ces personnes prétendaient vendre 4 tonnes d’or appartenant aux dirigeants de l’époque. Il s’agit d’Ibrahim Bah, l’un des frères d’Adam Bah Konaré, épouse d’Alpha, Toriba Diarra, chauffeur du Président Alpha, Doussou Doumbia et Salim Doucouré. Ils nous ont montré 200 kilos d’or à mettre à notre disposition à un coût très abordable. J’ai pourtant déconseillé mon ami Scholz de ne pas succomber à la tentation. Mais tous les soirs, ils venaient chez lui et ont fini par nous convaincre. Nous avions conclu des protocoles d’accord.
Une fois arrivé à Paris, j’ai dit à Scholz de chercher une société française spécialisée dans le domaine de l’or. C’est ainsi que nous avions contacté la société L.T.D. Finalement, nous étions retournés à Bamako. A trois cette fois-ci. Moi, Michel Meunier et Scholz Wolfgang. Nous avions exigé un garant pour la transaction. Malheureusement, cette condition ne plaisant aux bandits, ils décidèrent que la transaction fût faite à Conakry, en Guinée. Finalement, le représentant de la société minière L.T.D, Michel Meunier, s’était retiré” nous a confié le plaignant, Moussa Diallo.
Un coup bien préparé
Notre compatriote de poursuivre ainsi : “Wolfgang Scholz nous avait conduits, avec eux, pour effectuer la transaction vers l’Allemagne (Koln). Arrivée à Conakry, nous avions cherché des visas pour Madou Traoré et Sano Mohamed à l’Ambassade de France et nous avions payé le Transitaire Ibrahim Bah, le beau-frère de Alpha Oumar Konaré.
Entre temps, Wolfgang m’avait laissé à Conakry pour aller préparer la réception en France. Vingt-quatre heures avant notre voyage, la gendarmerie guinéenne débarqua à mon hôtel et m’interpella pour trafic illicite d’or sur le territoire guinéen. En fait, ce fut un coup bien préparé. Heureusement, après explication bien détaillée, le chef de cette unité, un certain Moussa Sangaré, et ses hommes, avaient décidé d’arrêter le groupe des hommes de mains des dirigeants maliens. C’est ainsi que le chauffeur d’Alpha Oumar Konaré, Toriba Diarra, fut arrêté et mis en prison. Là, la proie était devenue un prédateur. La chasse aux malfaiteurs fut engagée à Conakry pendant trois jours. Finalement, Madou Traoré, Doussou Doumbia, Mohamed Traoré et Ibrahim Bah furent arrêtés “, raconte Moussa Diallo.
Et il continue son récit avec force détails : “Ce qu’il faut savoir dans cette affaire, c’est que nous avions dépensé des centaines de millions de Fcfa. Pour le recouvrement de nos dépenses, le juge Condé fut chargé du dossier à Conakry. Les malfaiteurs furent mis en prison. C’est le 6 février 2001 que le président malien, Alpha Oumar Konaré, s’était rendu en catimini à Conakry pour une visite éclair de trois heures seulement où il a rencontré l’ancien président guinéen, Lassana Conté.
On ne sait pas pourquoi un Président de la République s’intéresse à ce genre d’affaire. Il est intervenu pour que ces hommes puissent être libérés. Le soir, la gendarmerie m’apporta la promesse de nous rembourser toutes les dépenses par le biais du ministère des Affaires Etrangères du Mali. Cela, par la voix de son antenne basée à Conakry. Ce qui expliquait l’ingérence de l’Exécutif guinéen dans sa justice. Ces hommes furent finalement libérés. Sur cette promesse, deux de leurs agents, à savoir Moussa Konaté et Charles Bouadou, avaient pris contact avec moi pour me payer” précise Moussa Diallo.
“Dans la foulée, ils ont organisé la vente de ma maison à 120 000 euros, soit 80 millions de Fcfa “
Selon toujours Moussa Diallo : “Les hommes de mains de Alpha Oumar Konaré, aux multiples identités, m’avaient remis deux chèques. Lesquels furent déposés, l’un sur le compte de ma société Egbdf et l’autre sur le compte B.O.A. Seize jours après avoir déposé ces chèques, ils retournèrent impayés avec la mention opposition de l’émetteur. C’est ainsi que j’ai porté plainte pour recouvrer mon argent. J’ai chargé Me Pierre Mairat de diligenter la procédure. Une semaine après, j’ai reçu une lettre de la Banque de France m’indiquant que ma société était mise en liquidation et un certain Yannick Mandin était désigné liquidateur. J’ai reçus de lui une sommation de remettre toutes les factures en cours de règlement. C’est dans la foulée qu’ils ont organisé la vente de ma maison à 120 000 euros, soit 80 millions de Fcfa. Alors que j’avais acheté cette maison à 274 000 Euros, soit 180 millions de nos francs. J’ai travaillé pendant 20 ans pour payer cette maison. Aujourd’hui, je vis chez ma fille. Mais une partie de ma famille se trouve à Bamako.
Et Moussa de rappeler : “Le premier faux acquéreur s’appelle Jean Charles Louis Meichel. Alors qu’il n’avait aucun droit de vendre un bien qui ne lui appartenait pas, il a pourtant vendu mon pavillon avec la complicité des agences Laforêt. En six mois, il y a eu une transaction de vente pour un pavillon dans la région parisienne. Je souhaiterais comprendre la provenance et la destination des fonds et savoir quel est le notaire qui a pu établir ces actes notariaux, alors que j’étais propriétaire de mon pavillon puisque c’est moi qui continuais à payer le Crédit foncier de France” nous confie Moussa Diallo qui se trouve dans une situation déplorable.
Plainte contre Alpha devant la Chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris
Notons que cette affaire d’or avait été déjà jugée par le Tribunal de Première Instance de la Commune V, en avril 2015. Cette juridiction avait déclaré les prévenus coupables des faits à eux reprochés. Il s’agit de Toriba Diarra, Doussou Doumbia et Salim Doucouré poursuivis pour escroquerie et complicité et condamnés, chacun, à deux ans d’emprisonnement ferme. Le tribunal les avait aussi condamnés au payement de plus de 969 millions de Fcfa pour toutes causes confondues. Malheureusement, cette décision n’a jamais été exécutée par la justice malienne.
Cette affaire vient donc de connaitre un nouveau rebondissement. En effet, notre compatriote Moussa Diallo a porté plainte contre l’ancien président de la République du Mali, Alpha Oumar Konaré, devant la Chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris, siégeant au Palais de Justice. L’ancien président de la République doit se présenter devant le juge, le jeudi 14 avril prochain. Ce qu’on lui reproche : recel, abus de confiance, détournement, blanchiment aggravé, extorsion, association des malfaiteurs…
Le nommé Moussa Diallo affirme vouloir tout simplement être remis dans ses droits par la justice française. Pour cela, il réclame 20 millions d’euros, soit plus de 13 milliards de Fcfa de dommages et intérêts à Alpha Oumar Konaré et Charles Bouadou.
Affaire à suivre !
Alou B. HAÏDARA
Source: Aujourd’hui-Mali