Les séries de scandales qui se révèlent au grand jour, démontrent que les pratiques mafieuses n’ont pas changé au Mali. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta le dit et le répète : « Je ne protégerai personne ».
L’opposition dénonce des séries de « scandales » qui n’honorent pas le Mali. Et elle a raison. Mais, il se trouve que le phénomène n’est pas nouveau. Il date et a pris de l’ampleur, est-on tenté d’affirmer, sous les régimes démocratiquement élus. C’est-à-dire, à partir de 1992.
Les partisans de la démocratie qui ont combattu le régime « dictatorial » du président Moussa Traoré, avançaient le motif que les richesses du pays n’étaient pas équitablement distribuées ; que les libertés individuelles et même collectives étaient trop restreintes. Soit ! Le régime de Moussa Traoré a été renversé dans le sang et des « élus démocrates » ont été installés pour gérer les affaires du pays.
En dix ans (1992-1997 – 1997-2002), les statistiques de la corruption étaient déjà assez alarmantes pour comprendre que les nouveaux seigneurs de la République se « servaient » pour combler le retard qu’ils avaient accusé sous le régime précédent. Pire, c’est à travers les rapports nationaux et internationaux que les Maliens découvraient l’ampleur de la chose. Autrement dit, il devrait y avoir une sorte de « protection » voire de « solidarité » dans la corruption qui pouvait faire que tout scandale était vite étouffé dans l’œuf.
2002-2007 et 2007 jusqu’en 2012, ils n’ont pas vu meilleur. Le soldat héros de la révolution de mars 1991, qui a décidé de prendre les choses en main pour rectifier le tir, s’est empêtré, lui-même, dans les affaires sombres.
Pour calmer les esprits politiciens de ceux qui pensaient avoir leur mot à dire, parce qu’ils étaient là quand on renversait Moussa Traoré, le « Général » inventa, de nouveau, la roue en décrétant le « consensus politique » qui n’était autre que le « partage du gâteau » et la solidarité dans le faux. C’est dans les rapports que de tels défauts étaient révélés sans effet majeur. Voilà pour l’historique.
L’ampleur du soutien populaire au coup d’Etat de mars 2012, révèle le ras-le-bol des masses populaires qui en ont assez d’être toujours bernées par les « politiciens ». Ça, il faut le dire. Seule la classe politique, a dénoncé et combattu les acteurs du coup d’Etat de 2012.
L’homme, installé à la tête du pays à la faveur de ce coup d’Etat, se nomme IBK. Jusqu’à son installation comme président de la République, il était réputé comme quelqu’un qui ne s’installe pas dans la compromission et qui regarde la corruption comme une peste. Réputé également homme de parole, IBK a nourri tous les espoirs. C’est avec plus de 70% des suffrages qu’il remporta l’élection présidentielle de 2013. Très vite, il déclara qu’il allait faire de la lutte contre la corruption, son cheval de bataille. L’année 2014 a été décrétée celle de la lutte contre la corruption. L’espoir suscité n’aura été que de courte durée. Les populations qui ont élu le président IBK, sont restées sur leur faim. Aucun bilan, aucune arrestation pendant cette période. Les scandales financiers, les malversations, les détournements de fonds, les blanchissements d’argent animent les causeries à tous les niveaux. Qu’est ce qui empêche le déclanchement de cette lutte tant souhaitée par le bas peuple ? Malgré les articles de presse, malgré les sorties de l’opposition, la corruption s’installe confortablement au Mali ?
Ah ! Corruption quand tu nous tiens, ce n’est pas facile de se sortir de tes griffes.
Mais, peut-on changer en un seul jour une habitude qui s’est installée plusieurs décennies ? La réponse, est évidemment non. Et le nouveau président de la République en est conscient. Dans un environnement où les voleurs crient au voleur et dénoncent le « gendarme » de laxisme, la lutte ne sera pas facile. Mais, pour le chef de l’Etat, la lutte contre le phénomène de corruption, est avant tout un changement de comportement individuel. Pour sa part, il garantit de rester bon exemple. Peut-il se porter garant pour ses proches dont les noms sont cités à tort ou à raison ? La réponse est encore, une fois, non !
Par contre, IBK a promis qu’il ne protégera personne de la justice encore moins faire ombrage à la justice. Ce qui justifie l’éclatement des séries de scandales sous son pouvoir. Autrefois, il était difficile d’inculper ou même de soupçonner l’entourage du pouvoir. Aujourd’hui, si l’opposition et même nous de la presse, pouvons dénoncer des cas de corruption et de blanchissement d’argent même présumés, c’est que les verrous ont sauté et qu’il n’y a plus de « protection », de « solidarité dans la corruption ».
Aujourd’hui, chacun doit répondre de ses actes et en les justifiants aux yeux du citoyen lambda. A quelques encablures de 2018, le président, pour avoir un nouveau contrat de confiance se doit de frapper fort en laissant la justice faire son travail. Les sangsues du peuple doivent recevoir le traitement qu’il mérite. Et c’est une bonne chose non seulement pour la démocratie mais aussi pour le système de gouvernance actuelle, en rendant effective cette lutte attendue dans le Mali profond.
Tièmoko Traoré