S.E Pierre Buyoya, haut représentant de l’Union africaine pour le Mali et chef de la Misahel, a animé mardi dernier un point de presse dans les locaux de son institution. La rencontre avait pour but de faire connaitre les activités de l’Union africaine et d’échanger avec les hommes de presse sur l’évolution de la situation politico-sécuritaire au Mali et dans la région du Sahel.
Selon le chef de Misahel, même si des voix se sont élevées de tous côtés (les médias, les partenaires et le comité de suivi de l’accord) pour déplorer les lenteurs dans la mise en œuvre de l’accord de paix, des progrès ont été enregistrés. « D’immenses espoirs ont été apportés au plan sécuritaire par le rapprochement et la cessation des hostilités entre les mouvements signataires de l’accord, les premiers sites de cantonnement sont sur le point d’être achevés et les structures devant accueillir le mécanisme opérationnel de coordination (MOC) en charge de mettre en place les patrouilles mixtes sont en cours», a expliqué Mr Buyoya.
Aussi, indique-t-il, le gouvernement a décidé de prendre en charge les combattants en attendant que toutes les dispositions se mettent en place et des décrets présidentiels ont été pris en décembre dernier pour la mise en place du comité national de Désarmement, Démobilisation et Réintégration (DDR), de la commission d’intégration.
« Nous attendons encore les personnalités qui vont piloter ces processus (très importants dans la mise œuvre des dispositions relatives à la sécurité dans le cadre du processus de paix) et le décret de création de la Commission sur la Réforme du secteur de la sécurité » a souligné Mr Buyoyaa, avant d’assurer l’accompagnement de la Misahel tel que prescrit dans l’annexe 2 de l’accord d’Alger.
Pour la sécurisation et la stabilisation de notre pays, le représentant de l’UA dira que son organisation va continuer à maintenir ses efforts de mobilisation. « C’est dans ce contexte que la commission de l’Union africaine a diligenté sous l’égide de la Misahel, une mission d’évaluation conjointe (UA, UE, UN, CEDEAO, Francophonie, Réseau africain du secteur de la sécurité). L’objectif était de s’assurer de la possibilité d’une assistance en matière de la RSS comme contribution de l’UA aux efforts de stabilisation du Mali », a renchéri Mr Buyoya.
Le patron de la Misahel s’est également félicité du règlement de la question de la représentativité des mouvements dans les organes du Comité de Suivi de l’accord, de la nomination des gouverneurs pour les régions de Ménaka et de Taoudéni et l’adoption de la loi de l’installation des autorités intérimaires dans les régions du nord. « La Misahel (co-présidence du sous comité) mettra à la disposition des parties les moyens nécessaires pour obtenir des avancées indispensables dans ce domaine touchant la réforme de l’Etat et la gouvernance », rassure-t-il.
Le droit et l’intégrité physique menacés au Nord
Le représentant de l’UA a aussi profité de l’occasion pour souligner les défis de l’Education, de la Justice et l’offre des services de base nécessaires à la vie de tous les jours, les actes terroristes et le développement du banditisme qui portent sérieusement atteinte au droit à la vie et à l’intégrité physique.
Selon Mr Buyoya, peu de progrès ont été faits en matière de la lutte contre l’impunité dont les violences faites aux femmes continuent d’être rapportées. Parce que dit-il, ‘’en 2015, plus de 716 incidents de violences basées sur le genre ont été rapportés’’.
Mr Buyoya dira également que la Misahel suit avec intérêt la question d’éducation avant d’expliquer qu’à la fin de l’année scolaire 2014-2015, un déficit de 591 enseignants pour les trois régions et environ 500 écoles sont restées fermées dans cette partie du pays et le centre (Mopti et ségou).
« En 2016, les besoins sont estimés à 391 000 enfants à scolariser et 8 500 enseignants à former », a indiqué Mr Buyoya.
Coopération régionale pour lutter contre le terrorisme dans le sahel
Au cours de la rencontre, le chef de la Misahel a souligné que pour donner suite à la conférence des Ministres de la Défense et des Chefs d’état-major tenue à Bamako en septembre 2015, l’UA conjointement avec les Nations Unies vient de réaliser une mission technique d’évaluation. Il s’agit, dit-il, de proposer les conditions et modalités du renforcement des capacités des forces de sécurité maliennes ainsi que la mise en place d’une force régionale voire internationale de lutte contre le terrorisme.
Aussi, souligne le Chef de la Misahel, la situation du Sahel, reste préoccupante malgré la montée progressive de l’armée nigérienne. Parce que, explique Mr Buyoya, les attaques de Boko Haram, ou l’EI en Afrique de l’Ouest, sont de plus en plus orientées vers l’usage de bombes humaines. « Aussi, le Nigeria, le Cameroun et le Tchad continuent d’être affectés. Et, le basculement de la Libye dans l’anarchie avec un ‘’Etat Islamique’’ constitue une terrible menace sur la région du sahel », a renchéri Mr Buyoya.
Enfin dira Mr Buyoya, les risques de jonction entre l’El et l’une ou l’autre des coalitions des groupes jihadistes déjà présents au nord du Mali et dans la région Sahélienne en général, et l’extension de la menace terroriste aux frontières mauritanienne, Burkinabé et ivoiriennes doivent attirer toute l’attention voulue. « Ceci s’illustre par les dernières attaques à Ouagadougou et en Côte d’Ivoire », a conclu Mr Buyoya.
Djibril Kayentao