Dr ANASSER AG RHISSA, Expert TIC, Gouvernance et Sécurité
L’accord de Bamako, pour la paix et pour la réconciliation au Mali, prévoit le cantonnement des ex combattants et le processus DDR (Démobilisation, Désarmement et Réinsertion) assure la démobilisation, le désarmement et l’intégration/réinsertion des ex combattants soit dans les forces de défense et sécurité du Mali en fonction des critères soit dans la société civile au sein des projets ou des services.
Au Mali, comment rendre le DDR utile, efficace et équitable ?
1. DDR : Critères pour l’intégration des ex combattants dans les forces de défense et sécurité du Mali
Lors de la validation de la dernière étape du processus inclusif d’Alger, pour la paix et la réconciliation au Mali, par les forces vives, les partis politiques et la société civile, il a été organisé, à l’appel du gouvernement, à Bamako, au CICB, pour ce faire, un atelier d’une durée d’un jour.
Des groupes ont été formés pour faire des propositions.
J’étais le Président du groupe 2 dédié aux problématiques concernant la défense et la sécurité, en particulier, à la défense et sécurité globales du Mali intégrées dans celles de la sous-région et aux niveaux régional et international, à l’intégration des ex combattants dans les forces de défense et sécurité du Mali mais aussi au DDR.
Nous avions proposé que cette intégration devra se faire à travers des critères, dont la nationalité, le grade, ce qui a été retenu dans l’accord final d’Alger, devenu accord de Bamako.
Du 07 au 10 avril 2016, a eu lieu, à Bamako, au CICB, sous la Présidence du Ministre de la Défense Malien et en présence du secrétaire permanant du comité national de coordination de la mise en œuvre de l’accord de Bamako (CNCA), un atelier de réflexion sur l’intégration des ex combattants dans les forces de défense et sécurité du Mali.
Parmi les critères retenus pour cette intégration, on peut citer : la nationalité, le grade, l’aptitude, l’appartenance à une unité combattante d’un mouvement signataire de l’accord de Bamako, la définition de l’emploi au sein de cette unité combattante, la limite d’âge, l’expérience professionnelle, les exemptions de mandats de dépôt, …
La difficulté sera de renseigner, avec précision, tous ces critères, par les ex combattants des mouvements armés signataires de l’accord, en particulier, l’appartenance à une unité combattante et la définition de l’emploi au sein de cette dernière.
Dans certaines unités de petite, voire de moyenne, taille, les postes ne sont-ils pas banalisés et assurés par tous les membres de l’unité en fonction des besoins ?
Dans ce cas, comment différencier leurs grades ?
Mais, un examen minutieux de chaque situation permettra de trouver la solution idoine.
Cet examen est indispensable car il y a une grande attente des retombées du DDR (son utilité) de la part des populations civiles, des groupes armés et du pays tout entier.
En effet, une partie importante de la jeunesse de tout le Mali est partie au Nord à la recherche d’intégration dans les groupes armés (malgré une certaine résistance de la part de ces derniers) dès qu’ils ont appris que le DDR peut offrir aux membres des groupes armés une situation soit dans les forces de défense et sécurité soit dans la société civile.
Ainsi, la commission nationale DDR (CN-DDR) risque d’être une sorte d’agence nationale de placement.
En allant dans le sens de la régionalisation, à travers le DDR, nous devons répartir, autant que possible équitablement, les ressources (humaines, moyens, financières, …) entre les communes d’une région donnée, entre certaines régions du Mali, et permettre surtout une mutualisation de ces ressources entre communes d’une région ou même entre régions.
Exemple, compte-tenu des ressources limitées et de l’étendue du pays, certaines unités spécialisées des forces de défense et sécurité du Mali, pouvant intégrer des ex combattants, pourront être communes à plusieurs régions.
2. Banaliser les sites de cantonnement et y cantonner ceux qui sont prêts en tenant compte de l’équité entre regroupements
Comme vous le savez, vingt quatre (24) sites de cantonnement seront viabilisés par la MINUSMA : douze proposés par la CMA et douze proposés par la Plateforme.
Certains sites ont déjà été viabilisés.
Dans combien de temps seront-ils tous viabilisés ?
Chaque localité n’aura pas son site de cantonnement, il y aura sûrement des regroupements et des mutualisations (mise en commun) de sites de cantonnement entre certaines localités d’une même région ou de régions différentes.
Qu’un site soit proposé par tel ou tel regroupement (par la CMA ou bien la Plateforme), on doit y cantonner tous les ex combattants prêts à être cantonnés, qu’ils soient de la CMA ou de la Plateforme, jusqu’à la limite de sa capacité.
Le cantonnement tarde à se faire malgré le fait que depuis le 22 décembre 2015, le Ministre de la défense Malien, Tiéman Hubert Coulibaly, lors d’un entretien avec son homologue Néerlandaise, a appelé à un cantonnement urgent des groupes armés Maliens.
Afin de ne pas retarder le processus complet DDR, on pourra procéder au cantonnement par phases successives : à chaque phase, demander à chaque regroupement de remettre une partie de sa liste d’ex combattants si la liste complète n’est pas disponible.
Ainsi, par soucis d’équité, à chaque phase, on pourra cantonner le même pourcentage du total pour chaque regroupement.
3. Conclusion : Peu importe l’endroit où sera cantonné tel ou tel ex combattant, l’essentiel, c’est l’efficacité du DDR
De toute façon, peu importe l’endroit où sera cantonné tel ou tel ex combattant, d’autant plus qu’il est censé n’y passé qu’un temps, qu’on souhaite le plus limité possible : le temps, après désarmement, que le processus DDR (Démobilisation, Désarmement et Réinsertion) analyse son cas en fonction des critères et lui trouve une situation : l’intégrer, soit dans les forces de défense et sécurité du Mali ou bien le réinsérer dans la société civile (au sein des projets ou des services).
L’essentiel, c’est l’efficacité du DDR et des commissions nationale DDR et d’intégration.
Ce point critique, dont tout dépend, doit requérir une attention particulière de la part de tous les acteurs.
Finalement, l’essentiel est que chaque ex combattant puisse trouver une situation dans les meilleurs délais : ce que doit lui garantir le processus DDR intégré, dans l’accord de Bamako, et mis en œuvre à travers les commissions nationale DDR et d’intégration.
Une fois, la situation trouvée, l’ex combattant pourra travailler là où il aura été intégré ou réinséré : c’est-à-dire dans la localité où il aura été cantonné ou bien ailleurs, dans une autre localité de la même région, ou bien aux niveaux régional (dans une autre région) et national.
Tous les ex combattants doivent être cantonnés, déposer les armes et trouver une situation, via le DDR, dans les meilleurs délais au risque de découragement ce qui peut entrainer des blocages du processus et son inefficacité.
De même, il ne faut pas oublier la jeunesse, cas de la jeunesse de GAO, qui s’est sacrifiée pour le Mali. Ses membres ne possèdent pas des armes mais ont lutté avec bravoure contre l’ennemi.
Malgré leur mérite, quels grades présenteront-ils ?
Comment les intégrer ou bien les réinsérer ?
Ce processus étant inclusif, pour faire front contre le terrorisme et l’insécurité aux niveaux national, régional et international, personne ne doit être mis à l’écart même les Djihadistes Maliens repentis sincèrement ou les enfants Maliens enrôlés de force par les Djihadistes.
Dans toutes les régions du Mali, des mécanismes innovants, en liaison avec la régionalisation doivent être mis sur pieds pour que tous les chômeurs puissent être intégrés dans la fonction publique régionale et dans des projets et services régionaux et locaux.
Personne ne doit être laissé de côté au risque que dans d’autres régions ne soit exigé des mécanismes ressemblant au DDR pour le placement des citoyens qui ne sont pas membres des groupes armés.
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