C’est par un communiqué de la présidence que les Maliens ont appris la maladie du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta. Qui était hospitalisé à Paris pour se soigner. Il n’est pas le seul à prendre cette option. Beaucoup de nos compatriotes choisissent l’Europe ou le Maghreb, pour se soigner. Quelles en sont les raisons ? Analyse.
Tout le monde n’a pas les mêmes moyens que le président de la République. Quel sort réserve-t-on à des malades, moins nantis, atteints de l’adénome de la parathyroïde, une tumeur bénigne ? Une question qui soulève l’impérieuse nécessité de revoir la gestion et les moyens mis à la disposition des hôpitaux du Mali.
Il est connu que les chefs d’Etat du continent, à quelques exceptions, se font tous soigner en Europe. C’est vrai, ces pays sont plus développés que les nôtres et ce, dans plusieurs domaines dont celui de la médecine. Mais malheureusement les soins de ces hôpitaux ne profitent qu’à nos gouvernants et quelques opérateurs économiques. L’écrasante majorité de la population est obligée de se contenter des soins au rabais fournis par nos hôpitaux. Dès lors se pose la question d’une catégorisation de la société de la part de personnes censées garantir les mêmes chances aux citoyens dans une société qui se veut démocratique.
Cette propension des élites et des fortunés à recourir aux soins d’ailleurs pose l’inéluctable débat de la « fréquentabilité » de nos centres de santé et hôpitaux de référence. La presse locale a fini par étaler à la lumière du jour les insuffisances de nos hôpitaux. Rien n’y fit. Malgré les moyens conséquents mis à la disposition de ces hôpitaux, ils sont incapables de fournir un plateau technique digne de ce nom. Combien de fois, des patients se sont entendus dire que le scanner de l’hôpital Gabriel Touré était en panne ? Combien de fois des patients se sont saignés à blanc pour se rendre au Maghreb pour des analyses cardiovasculaires ? Combien sont ces familles qui, impuissantes, ont assisté à une mort lente d’un proche ignorant de quoi il souffrait ? La liste des questions est exhaustive.
Même pour conserver des morts, nos hôpitaux peinent à assurer souvent le service minimum. Faites un tour des morgues de Bamako, vous rendez compte de l’état de putréfaction des installations et du conditionnement. Quid des soins les plus élémentaires ? Aucune prestation dans nos hôpitaux n’échappe au « trafic ». Tout est rare. Et ce qui est rare devient cher. C’est la politique de l’appât du gain. Consulter, soigner, analyser et même laver les morts, tout est inclus dans le business des affairistes. C’est, entre autres, le mal des hôpitaux maliens. Un mal qui s’accentue jour après jour malgré les dénonciations de la presse et des réseaux sociaux. Un mal qui vient d’être remis sur la place publique. Car l’opération du président de la République à Paris est une mauvaise publicité pour les hôpitaux de référence de notre pays.
Dans ces conditions,
A son retour de Paris, le président de la République se doit d’instruire au gouvernement au moins un rapport sur la gestion des hôpitaux du Mali. Certes, des efforts non négligeables sont fournis par l’Etat, à travers différentes politiques de santé en faveur des hôpitaux de référence du pays. Mais le constat reste préoccupant. Les hauts fonctionnaires et les opérateurs économiques du Mai choisissent, sans hésiter, de se faire traiter dans des hôpitaux à l’extérieur du pays, notamment en France, au Maroc, en Tunisie ou souvent en Turquie. Cela doit changer pour le bonheur de nos populations.
Abouba Fofana