Entre les retards dans l’exécution des travaux ou le décaissement de fonds et les défauts de construction, le ministre Dramane Dembélé n’a pas trop eu le sourire dans la capitale des Rails
Le ministre de l’Urbanisme et l’Habitat, Dramane Dembélé, a visité les travaux de construction du marché Djoni-Djoni (« vite fait » en langue nationale peulh), des caniveaux et collecteurs de Lafiabougou nord et Sud, et de quarante logements sociaux. C’était vendredi dans la commune urbaine de Kayes, en compagnie du maire Abdoulaye Camara, du conseiller aux affaires économiques et financières du gouverneur de région, Moussa Ali Maïga, et de représentants des services techniques.
En inspectant ces trois sites, le ministre Dembélé voulait vérifier de visu le niveau de progression des chantiers en cours. Il venait aussi discuter avec les acteurs locaux (représentants de l’Etat et de la collectivité) dans le but de cerner les difficultés rencontrées dans l’exécution de ces projets, les amener à créer une synergie d’action débouchant sur des solutions participatives pérennes.
Il faisait déjà près de 40°C à 8 heures du matin quand la délégation conduite par le ministre Dembélé est arrivée au marché Djoni-Djoni, sis au quartier Liberté. Sur les ruines de ce souk consumé par un incendie gigantesque le 27 mars 2013, pousse un marché moderne construit en R+2 comprenant 57 magasins et 9 toilettes au rez-de-chaussée, 26 boutiques au premier et le même nombre au second. Ce nouveau marché abritera 250 tailleurs et 71 vendeurs de tissus ou de mercerie. Sa réalisation coûte près de 300 millions Fcfa financés par le Projet d’appui aux communes urbaines du Mali (PACUM). La structure renforcera les capacités financières de la collectivité grâce aux taxes et frais de location que les boutiques vont générer.
Après la visite des locaux, Dramane Dembélé s’est étonné du retard pris par les travaux confiés au groupement d’entreprise DES-Sarl/EKS. « Démarrés le 25 novembre 2014 pour un délai contractuel initial de 6 mois, le taux d’avancement physique des travaux est de 42% pour un délai consommé de 273,33% », lit-on dans une note produite par le coordinateur par intérim du PACUM, Abdoulaye Bamba, qui a annoncé au ministre que la date d’achèvement est prorogée au 25 mai prochain.
Après ce constat peu reluisant, la délégation ministérielle a mis le cap sur Lafiabougou nord puis sur Kayes Ba. A Lafiabougou nord, une partie des travaux de construction des 5,2 km de caniveaux et collecteurs est en cours. Ces ouvrages coûteront au PACUM plus de 200 millions de Fcfa. Le délai contractuel est de 4 mois, à compter du 11 février dernier, date de démarrage des travaux.
A moins de deux mois de la fin du délai initial, l’entreprise Sidiki Cissé (ESC) est à 52% de taux de réalisation pour un délai consommée à 57%, et zéro décaissement de fonds pour son compte. Le chef de la mission de contrôle du Bureau technique d’ingénierie de construction, Baki Sacko, a imputé ce retard de paiement à un blocage des fonds par le trésorier payeur de la région qui a argué de la péremption de certains documents déposés à son niveau. Le trésorier payeur, assure-t-il, a pris cette décision « sans tenir compte des dates de réception » des documents.
Tout en évitant de spéculer sur un problème relevant d’un autre département, Dramane Dembélé a salué les efforts consentis par l’ESC pour être dans le délai et l’a invitée à améliorer la teneur en ciment des ouvrages.
La visite des sites accueillant les 40 logements sociaux de types F3 pour un coût total de près de 400 millions Fcfa, a été la dernière étape de la visite du ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat. La commission urbanisme et habitat de l’Assemblée nationale avait décelé des anomalies dans le plan de construction des maisons, lors d’une mission de contrôle dans la région il y a quelques semaines. « Il est difficile de se réjouir au regard de ce que nous venons de constater ce matin », a confirmé Dramane Dembélé, à la fin de sa visite. « Le département, a-t-il rappelé, a été accusé d’avoir fait des salons avec des murs mitoyens ».
Il se référait aux appréciations des députés à l’issue de leur visite. Pour le ministre, les techniciens de la direction régionale de l’urbanisme auraient dû constater et rectifier cette malformation. « Ce qui n’a pas été le cas », a déploré Dramane Dembélé qui a annoncé avoir relevé de ses fonctions le directeur régional de l’urbanisme et de l’habitat de Kayes.
Le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, après avoir écouté les uns et les autres, a insisté sur nécessité d’une collaboration franche et désintéressée entre les services déconcentrés de l’Etat et ceux des collectivités territoriales. Une coopération qui fait défaut, a-t-il déploré en prenant l’exemple du retard de trois mois accusé dans le démarrage des travaux du marché Djoni-Djoni à cause de la délivrance tardive du permis de construire par les services de l’urbanisme et du gouvernorat. Le blocage supposé des fonds pour la réalisation des travaux de voirie, relève aussi, de son point de vue, du manque de collaboration entre les différents services.
Une habitante de la capitale des rails épingle là des comportements « au mépris des populations bénéficiaires, quand on sait que la ville de Kayes est confrontée à un sérieux problème d’écoulement des eaux de pluies ».
Dramane Dembélé a regretté le faible niveau de décaissement des 2,5 milliards de Fcfa alloués à la commune de Kayes. A la date de la visite du ministre, seulement 500 millions Fcfa avaient été décaissés, à moins d’un an et demi de la fin du projet.
Le maire de Kayes a promis de s’investir davantage dans une appropriation régionale du projet. Abdoulaye Camara s’est aussi engagé à travailler de concert avec tous les services techniques afin d’absorber à date échue les 2,5 milliards alloués par le PACUM à la commune de Kayes.
C. M. TRAORE