Si la rumeur venait à se confirmer, M. Soumeylou Boubèye Maiga sera le 4e premier ministre d’IBK à moins de 3 ans de pouvoir. IBK deviendra ainsi le premier Président malien depuis l’indépendance à battre le record de l’instabilité gouvernementale en un si peu de temps. Ce qui dénote sans nul doute d’un certain malaise au sommet de l’Etat. M. Maiga, dont le coefficient personnel est très appréciable, réussira-t-il à se faire écouter là où Oumar Tatam Ly, Moussa Mara et Modibo Keita ont échoué ? Le RPM qui détient les clés de la stabilité dans cette affaire, acceptera-t-il d’avaler cette quatrième couleuvre sans coup férir ? Les bailleurs de fonds accepteront-ils un Premier ministre trainant encore des casseroles aussi bruyantes dans l’achat de l’avion Présidentiel et des équipements militaires ? Que pensera l’opinion nationale du retour d’un fidèle, parmi les fidèles, qualifié à tort ou à raison d’avoir été l’une des pièces maitresses des régimes d’AOK et d’ATT ? Analysons ici les atouts et les faiblesses du bon choix de M. Maiga.
Les atouts de Soumeylou Boubèye Maiga
Ancien directeur de la sécurité d’Etat, ancien ministre de la défense et ancien ministre des affaires étrangères du Mali, M. Soumeylou Boubèye Maiga a un bon profil pour être le premier ministre d’un Mali en crise politico-sécuritaire. Son parcours plaide très largement en sa faveur malgré les différentes erreurs politiques qu’il a pu commettre. Parmi ses atouts il a une grande connaissance des questions sécuritaires, militaires et de géostratégies régionales et internationales. Homme du sérail pour avoir été le tout puissant directeur de la SE sous Alpha, il est un homme de réseau. Ne dit-on pas qu’il vaut mieux avoir Boubèye avec soi plutôt que de l’avoir contre soi ? Il a géré beaucoup de dossiers sulfureux et a un carnet d’adresses des plus étoffés. On dit de lui qu’il est l’homme de l’Algérie et de la France, les deux partenaires incontournables dans la résolution de la crise actuelle au septentrion du Mali. Pour avoir fait partie du mouvement démocratique et membre signataire de la Lettre ouverte du 07 Août, M. Maiga a une expérience politique qui pourrait faire de lui le grand rassembleur de la classe politique et un homme de dialogue et de consensus.
Ses faiblesses :
Mais en dépit de toutes ses qualités, Soumeylou Boubéye Maiga, passe aux yeux de certains de ses détracteurs, comme un « homme sournois et aux ambitions démesurées ». On lui reproche un parcours trop entaché de zones d’ombres. Sous IBK, il est reproché à Boubèye d’avoir été l’un des acteurs clés de la destruction des missiles sol air de l’Armée malienne anéantissant du coup l’une de nos meilleures armes de défense. L’opinion retient également de lui d’avoir été un complice actif en tant que ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale sous ATT dont il fut l’un des meilleurs conseillers, pour l’installation des groupes armés venus de la Libye. Cet acte qui serait à la base de l’occupation du Mali en est beaucoup de la chute du régime d’ATT et de l’annexion par la coalition Djihado-indépendantiste des 2/3 du territoire malien. Autres taches noires du parcours politique de Soumeylou seraient sans nul doute la gestion de la crise du nord et surtout de cette scabreuse affaire d’achat d’équipements militaires et du Boeing présidentiel. Pour l’opinion publique nationale il y a eu corruption, ce qui nous a valu une sanction des institutions de Breton Woods. Mais sa plus grande faiblesse vient du côté politique. Il n’appartient pas au parti majoritaire, le RPM qui a le plus grand nombre de députés à l’Assemblée nationale. Sa nomination, si elle venait à être confirmée serait une énième violation des principes sacro-saints de toute démocratie civilisée qui voudrait que le premier ministre soit issu du parti majoritaire à l’AN pour éviter la probabilité de motion de censure et de blocages dans le travail de l’action gouvernementale. Il est donc fort à parier que Soumeylou Boubèye Maiga, comme Moussa Mara aura tout d’abord le réflexe de renforcer son parti pour avoir un ancrage véritablement national. Dans cette entreprise, il pourrait manquer de temps pour se consacrer aux missions de sa charge de Premier ministre. Ce qui risque de provoquer l’ire des tisserands qui ne tarderont pas de monter au créneau pour demander son départ. Comme pour dire que la stabilité gouvernementale n’est pas pour demain. De toute évidence, il semble être le moindre mal de tous les premiers ministrables.
Youssouf Sissoko
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