Les Aéroports du Mali vivent depuis quelques temps dans une atmosphère de grogne syndicale latente avec en toile de fond une mauvaise gestion érigée en système et qui fait craindre le pire à certains de ses cadres : mettre à genoux la structure et la faire disparaitre pour de bon. Jusque-là décriée du bout des lèvres, la situation, qui perdure depuis 2012, vient de se manifester par une décision qui risque de devenir la goutte d’eau de trop, pour une boîte où le cumul des illégalités et irrégularités faisaient déjà jaser. En effet, selon des sources bien introduites, le Pdg, qui n’est autre que le Colonel Dembélé, a reçu l’instruction ferme de la tutelle de gonfler les effectifs sans la moindre justification rationnelle. A la grande stupéfaction d’un personnel pléthorique au point de tourner le pouce, une vingtaine de nouveaux collègues va bientôt émarger à l’ADM. Au risque de transformer en bureau de placement une boîte dont les indicateurs affichent le rouge foncé, depuis quelques années. Car, faute de ressources extra-aéroportuaires et d’exploitation en adéquation avec le contexte, les marges bénéficiaires ont connu une chute drastique de plusieurs milliards à 200 millions environ et la structure est frappée de plein fouet par la conjoncture.
En définitive, une décision de recruter est d’autant plus contestable qu’elle intervient à un moment où tous s’accordent à reconnaître que les besoins en ressources humaines sont amoindris par un net ralentissement des activités de la boîte. Selon nos sources, une étude récente a même prouvé que le personnel disponible de l’entreprise lui suffit pour les cinq prochaines années et que l’ADM pourrait tourner avec 30 pour cent de ses effectifs.
Daouda Dembélé, jadis Pdg intérimaire que le ministre a fini par confirmer, a lui-même l’habitude d’insister au demeurant sur les disproportions énormes qu’il y a entre la masse salariale de l’ADM et ses bénéfices, en répétant à l’envi que l’essentiel des tâches au sein de l’entreprise est assuré par 1/5 de son personnel.
Recoupements faits, il nous revient que le recours à un effectif supplémentaire, jusqu’à hauteur de vingt nouveaux travailleurs, tire argument de la mise en service très prochaine de la nouvelle aérogare issue du projet d’extension de Senou. Mais l’explication est d’autant moins convaincante que l’entreprise se trouve dans la mire d’une mesure de concession depuis 2012 et que le dossier y afférent prévoyait même une déflation du personnel de 30 pour cent. Et, la concession étant toujours d’actualité, les cadres, qui risquent d’en payer le tribut par un licenciement, s’interrogent tout naturellement si un recrutement aussi soudain et massif n’est pas motivé par une intention de gonfler le nombre des bénéficiaires des indemnités de départ inhérentes à toute liquidation.
Quoi qu’il en soit, cette nouvelle pomme de discorde s’annonce comme une exacerbation des rapports déjà si tendu entre un directoire assujetti à la tutelle et certains cadres qui se sont jusque-là limités à murmurer leur indignation face à une gestion qu’ils jugent patrimonialistes. Elle découle, selon eux, des rapports d’extrême subordination qui font que l’emprise du département pèse lourdement sur l’optimisation des ressources de l’entreprise et empiètent arrogamment sur les domaines qui lui sont immanentes en tant qu’organisme personnalisé.
Mais de là à envahir la boite par un personnel inutile, les travailleurs ne semblent pas prêts à avaler la couleuvre.