Le Front de Libération du Macina a choisi les mots qu’il fallait pour réussir sa besogne. Les mots qui composent le nom du mouvement terroriste sont très évocateurs. D’abord, il s’agit d’un front, une zone de guerre qui vise à libérer, c’est-à-dire mettre en liberté un territoire : le Macina. Mais le libérer de quoi ? Certainement de l’emprise « Bambara » et ses « pratiques païennes » qui se seraient substituées à la Charia Islamique chère aux peulhs de la région et instaurée par Sékou Amadou. A cet égard, le leader du Mouvement de KOUFA se veut héritier des idéaux du fondateur de l’empire peulh du Macina, un empire théocratique qui a eu raison des Bambara et peulhs qui s’adonnaient à l’idolâtrie.
Ensuite, en le faisant, KOUFA devait avoir une idée nette de la diversité ethnique et culturelle qui caractérise le centre du Mali et des rapports souvent antagonistes entre les populations, notamment peulhs et Bambara, qui pouvaient être facilement instrumentalisés. Et l’objectif pour le chef djihadiste, fut de ressusciter les vieux conflits communautaires pour leur donner une apparence religieuse afin d’y bâtir son empire.
C’est un peu le cas pendant de Sékou Amadou qui a eu à combattre les Bambara et les marabouts de Djenné avant de fonder un véritable empire peulh sur la base de la Charia. Mais la différence avec KOUFA est que Sékou n’a jamais voulu assimiler son combat au djihad, car sachant que les conditions de la guerre sainte étaient loin d’être remplies. Seulement, il était dans l’obligation de se défendre légitimement contre ses ennemis. Toutes choses qui n’ont pas retenu l’attention de KOUFA.
De l’indépendance à nos jours, les peulhs de la région vivent avec des frustrations, se voyant dépouillés de leurs prérogatives traditionnelles au profit de ceux qu’ils appellent les bambaras, leurs anciens ennemis ! Les fonctionnaires de l’Etat qui sont affectés dans la zone s’illustrent le plus souvent par l’arbitraire contre les bergers. Cette insatisfaction se traduit par la mise en cause de l’ordre établi.
Voilà la plateforme de départ du Front de Libération du Macina qui se veut restaurateur de l’honneur peulh « souillé » par des décennies de gouvernance. Ainsi, l’orgueil et le nationalisme peulh est stimulé.
KOUFA savait pertinemment qu’avec ce subterfuge, il pouvait s’attirer l’onction des frères peulhs d’une part, et d’autre part, créer un amalgame car tous les peulhs de la région seraient assimilés à des terroristes avec toutes ses implications fâcheuses.
C’est effectivement ce qui est en cours à Ténenkou où des affrontements entre peulhs et bambaras ont déjà fait plus de quarante morts. Affrontements qui pourraient s’élargir à d’autres zones car c’est tous les peulhs du Mali qui se sentent meurtris après avoir entendu que les siens ont été victimes d’un pogrom dont sont auteurs les bambaras !
Le constat est amer : après les Touaregs, les barbus, les femmes voilées, ce sont les peulhs qui sont stigmatisés par d’autres frères maliens, jouets de la propagande.
L’esprit de discernement doit prévaloir pour que la propagande de Hamadoune KOUFA ne puisse pas continuer à faire mouche, au grand dam de l’unité nationale.
ABDOUL NIANG