Conformément à sa mission de sauvegarde du fleuve Niger, l’Agence du bassin du fleuve Niger (ABFN) mène une mission de sensibilisation et d’échanges dans les localités de Koulikoro, Bamako et Kangaba. Le mercredi 11 mai, une mission conduite par le Directeur général de l’Agence, Abdramane Oumarou TOURE, s’est rendue à Koulikoro pour prendre langue avec les autorités administratives et les usagers de cet important cours d’eau.
Cette mission de trois jours a pour but de constater de visu les phénomènes et activités dégradantes de l’environnement du fleuve et de référencer les points névralgiques de dégradation du fleuve pour des besoins de suivi dans le futur.
Pour ce faire, les responsables de l’ABFN ont adopté la méthode qui consiste à échanger avec les usagers du fleuve que sont les pêcheurs, orpailleurs, agriculteurs, piroguiers, exploitants de sable et les autorités administratives et traditionnelles en vue d’aborder avec eux les principales préoccupations, en la matière.
Après cette mission de trois jours, toutes les interventions, difficultés évoquées et propositions de solutions faites par les autorités locales et les usagers feront l’objet d’un magazine qui devrait alimenter les débats publics sur l’état de dégradation du fleuve Niger et sa gestion dans notre pays
La caution des autorités administratives
Dans la cité du Méguetan, la délégation s’est rendue au gouvernorat où elle a échangé avec le gouverneur, El Hadj Sékou COULIBALY, et toute son équipe. Le chef de la mission, M. TOURE, a expliqué qu’à travers cette mission sa structure entendait identifier l’ensemble des difficultés qui font que le fleuve Niger ne remplit plus son caractère d’utilité d’antan.
Le gouverneur de la région de Koulikoro a jugé l’initiative très pertinence avant de rassurer de sa disponibilité à aider l’ABFN pour la réussite de cette mission noble.
À la mairie également, le message de la délégation était le même pour le responsable de l’ABFN.
Après avoir écouté le DG de l’ABFN, le maire de Koulikoro n’est pas allé avec le dos de la cuillère pour expliquer combien le fleuve est important dans la survie des populations de Koulikoro et environs. Il a témoigné que c’est le fleuve qui fait vivre en grande partie la population de Koulikoro, depuis la fermeture de l’HUICOMA.
« Le fleuve apporte une manne financière très importante pour la ville. Nous allons faire tout notre possible pour accompagner l’ABFN en vue de réussir ce combat dans lequel il vient de s’engager », a rassuré le maire Youssouf Papa TRAORE.
La délégation s’est également rendue à la COMANAV (Compagnie malienne de navigation), où elle s’est entretenue avec le PDG de cette structure, Sory Ibrahim KEITA. Là, également le PDG de la COMANAV a salué l’initiative de l’ABFN et a saisi l’occasion pour exposer les projets dont la compagnie a l’intention de mettre en œuvre avec l’État et ses partenaires pour rendre la navigation plus facile. Le cri de cœur du PDG de la COMANAV était sans ambages. Selon lui, si rien n’est fait pour sauvegarder le fleuve Niger, la navigation sera un triste souvenir comme cela est déjà une réalité dans certaine partie où le fleuve est en voie de disparaitre.
La mairie indexée
Le point d’orgue de cette étape de Koulikoro a été l’entretien avec les usagers, principalement les exploitants de sable et de gravier. Au niveau de chaque site au bord du fleuve occupé par les exploitants de sable et de gravier, le directeur général de l’ABFN a largement expliqué les missions qui sont assignées à sa structure et l’objectif de cette visite qui s’inscrit dans un cadre de sensibilisation et d’échanges sur la situation des berges du fleuve, à Koulikoro.
Partout où la délégation s’est rendue, les exploitants de sable et de gravier, regroupés en différentes associations ont exposé leurs préoccupations aux responsables de l’ABFN qui est chargée de la protection du fleuve. Les interlocuteurs ont soutenu qu’ils participaient, à leur façon, à la sauvegarde du fleuve, dans l’exécution de leurs tâches quotidiennes, qui contribuent à élargir le lit du fleuve. Aussi, veillent-ils à la sauvegarde de l’environnement, en empêchant que les bordures du fleuve ne soient transformées en dépotoir d’ordures.
Malgré ce combat contre la pollution du fleuve, les visiteurs du jour ont été agacés de constater que des parties de la berge et même du lit du fleuve sont transformées en dépotoirs d’ordures ménagères. Interroger sur la question, les interlocuteurs ont indexé la mairie qui ne pas joue pas, selon eux, son rôle. Cela, malgré que la municipalité perçoive des taxes quotidiennes et annuelles aux exploitants de sable et de gravier. En plus des taxes payées à la mairie, les exploitants ont affirmé qu’ils payent aussi des impôts qui s’élèvent à 300 000 FCFA par an.
En effet, cette mission se justifie par le fait que depuis quelque année, la question de la pollution des eaux du fleuve Niger se pose avec acuité. Cela, par le fait que cette ressource, dans le subconscient de beaucoup de nos compatriotes, est assimilée à un vaste égout collectif capable de recevoir et de recycler toutes sortes de déchets.
Ainsi, au niveau des grandes agglomérations riveraines, le fleuve Niger et ses abords immédiats constituent le réceptacle des déchets domestiques et le repère d’activités polluantes artisanales et industrielles comme la teinturerie, la tannerie, la savonnerie, l’exploitation de matériaux de construction, orpaillage, vidange auto-moto, résidus abattoir… En sommes, un décor insalubre et nauséabond qui est propice aux maladies et aux souillures des ressources naturelles (eaux, terre, herbes, poissons…).
Cette situation inquiétante ne semble pas préoccuper les décideurs, les usagers et le citoyen ordinaire. Et pourtant, leur indifférence peut conduire notre pays dans une impasse regrettable. Fort de cette réalité, l’ABFN, conformément à sa mission de sauvegarde du fleuve Niger, sur le territoire national, a initié cette mission pour prospecter le fleuve Niger dans sa partie supérieure.
PAR MODIBO KONE, envoyé spécial à Koulikoro