C’est avec gravité et émotion que je m’exprime aujourd’hui, comme responsable politique, comme démocrate et républicain, mais avant tout comme Malien.
Notre pays connaît une situation de crise d’une extrême gravité. La prise du pouvoir par des soldats mutins et l’annonce de la suspension des institutions de la République n’est rien d’autre qu’un coup d’État militaire.
Je veux le dire aujourd’hui avec force et solennité : je condamne ce coup d’Etat avec la plus grande fermeté.
À quelques jours de la commémoration de l’anniversaire de notre démocratie le 26 mars, ce coup de force ternit l’honneur du Mali, et entache gravement l’image de notre pays, jusqu’ici considéré comme un exemple en Afrique.
À quelques semaines d’une élection où le peuple Malien s’apprête à choisir librement et démocratiquement son avenir, nul ne saurait légitimement se substituer par la force à la souveraineté populaire.
Ce coup d’État est en réalité un coup d’arrêt à notre projet commun de changement pour un développement démocratique, auquel le peuple malien adhère dans son écrasante majorité.
Seul un pouvoir démocratiquement élu, puisant sa force et son autorité dans la légitimité de la souveraineté populaire, sera à même de garantir l’unité nationale, de rétablir l’ordre sur l’ensemble du territoire, et de mener à bien l’indispensable redressement économique et social du pays.
En concertation avec les principaux acteurs civils et politiques, l’ordre constitutionnel doit être immédiatement rétabli. Le calendrier électoral doit être maintenu, et les élections se tenir à la date prévue, le 29 avril, pour rendre possible le vrai changement. Un changement que seul un pouvoir porté par les urnes et non usurpé par les armes peut porter et mettre en oeuvre.
Chers Compatriotes,
Depuis plusieurs années, je n’ai cessé de dénoncer la situation dans le Nord-Mali, et en particulier régulièrement appelé à un renforcement des moyens accordés à nos forces de sécurité pour lutter contre les rebelles et les bandits qui font régner la terreur dans notre pays.
Je comprends donc le désarroi et la colère des soldats. Mais l’armée doit, en toute circonstance, garantir l’ordre constitutionnel. Soldats du Mali, c’est l’honneur de votre engagement et de votre mission.
Par conséquent, je demande l’arrêt immédiat de toute violence, de tout tir, de toute arrestation, et de tout acte de vandalisme.
Officiers,
Sous-Officiers,
Militaires du Rang,
Forces Armées et de Sécurité,
Je vous demande de préserver à tout prix la vie de nos concitoyens, civils et militaires, sans exclusion.
Je vous demande de libérer dans les meilleures conditions les personnalités arrêtées.
Je vous demande de faire confiance au Peuple du Mali, pour que le changement que vous avez souhaité, que nous souhaitons tous, se fasse dans un cadre démocratique.
Je vous demande d’aider le Mali à sauver son honneur !
Chers Compatriotes,
Dans ces moments douloureux de la vie du Mali, il est très important que chacun d’entre nous garde son calme, que chacun d’entre nous reste digne. Il est indispensable que nous préservions l’essentiel : l’unité et la cohésion de notre Nation.
C’est parce que nous serons unis que nous pourrons, tous ensemble, tenir des élections, mettre fin à la rébellion, améliorer les conditions de notre armée, et développer le Mali pour le bien-être de tous les maliens. Inch’Allah !
Vive la République !
Vive la Démocratie !
Vive le Mali !
Je vous remercie.
Ibrahim Boubacar Keïta
Ancien Premier ministre Ancien Président de l’Assemblée nationale Président du Rassemblement pour le Mali