Je l’aime bien, et même que je l’adore. Mais je n’aimerais pas être à la place de mon cousin, par ces temps nuageux qui courent sous nos cieux. La clameur vient de partout, de la société civile en passant par la classe politique. Bien sûr, il est des exceptions : ceux qui se lèchent les babines avec mon cousin. Ils sont tout heureux et même bienheureux.
J’ai donc peur, pour mon cousin, qui se remet d’une opération, fusse-t-elle bénigne. Peut-être que ma peur est injustifiée rapportée au constat que mon cousin cherche par tous les moyens, au risque de paraître comme un môme aux yeux de ses compatriotes, à leur montrer qu’il se porte comme un charme.
On l’a vu descendre, au trot, les marches de la passerelle de l’avion qui le ramenait de Paris, après son opération. Auparavant, il s’était tenu debout durant des minutes aux Invalides, pour rendre hommage aux soldats français tués au Nord de notre pays. Il avait enchaîné les visites et autres déplacements pour nous confirmer sa santé physique. C’est normal, on ne réprouverait pas la volonté d’un mort ressuscité à vouloir croquer la vie à pleines dents. Il revient de loin.
C’est devenu une telle obsession chez mon cousin adoré qu’il faillât nous faire une de ces glisses légendaires, si on ne l’avait pas aidé à se tenir debout. Je ne vous dirai ni où ni quand, ça s’est passé. En tous cas, bravo à celui qui l’a aidé à se tenir débout. Quel coup de chaud, j’en transpire encore, ô !
Pendant que nous y sommes, cousin, mieux que de sautiller, tu pourrais nous faire une roue. Encore mieux, une pirouette. Tes compatriotes seraient rassurés, moi, non ; je crains que tu ne fasses une dépression en raison des complaintes de tes compatriotes. Pardon, j’avais oublié, il paraît que tu es insensible aux aboiements des chiens. Ils peuvent aboyer, mais n’empêcheront jamais la caravane de faire son chemin. Alors, tu ne crains rien.
C’est moi, l’impénitent oiseau de mauvais augure, qui m’inquiète pour toi, au point de penser que tu puisses faire une dépression. Quelle idée saugrenue, cousin, puisses-tu pardonner ma naïveté. On ne m’y prendra plus !
Issiaka SISSOKO