Depuis deux mois, la population de Nioro du Sahel, comme celles d’autres parties du pays, vit dans une véritable chaudière. Selon des spécialistes, la température dépasse souvent les 50 degrés. Les effets de la canicule se font sentir partout. Au-delà de midi, impossible de rester plus de deux minutes dans une chambre. Dans les familles, les marchés, les gens passent toute la journée à se désaltérer avec de l’eau fraîche ou glacée. A
Aujourd’hui, le produit le plus demandé est la glace. Un morceau de glace peut se vendre jusqu’à 100 Fcfa dans la ville de Nioro du Sahel. Dans les autres localités du cercle, il faut débourser 300 Fcfa pour se procurer le même morceau de glace.
Les activités tournent au ralenti à partir de 11 heures, chacun limitant au maximum ses déplacements. Les autorités scolaires, sachant que les enfants et les personnes âgées sont les plus vulnérables aux effets de la canicule, ont été obligées de réaménager les horaires des classes. Désormais les cours de l’après-midi commencent à 16 heures au lieu de 15 heures.
La température caniculaire accentue évidemment la pression sur l’eau. Les femmes auxquelles la corvée d’eau revient sont obligées de se lever très tôt le matin. D’autres se déplacent de village en village avec des charrettes à la recherche du plus que précieux liquide. Partout, l’on s’agglutine autour des points d’eau. Les disputes sont fréquentes. Elles peuvent même aller jusqu’à l’affrontement physique.
Dans la ville de Nioro, la situation est moins dure. Le problème de l’eau et de l’électricité est en passe d’être réglé avec de nouvelles installations. Mais dans les autres localités du cercle, la bataille pour l’eau fait rage. Les points d’eau (forages et puits) sont pris d’assaut par des centaines de femmes à longueur de journée. Les animaux ne sont pas en reste. Eux aussi ont chaud et soif. Ils passent les journées à rôder autour des points d’eau.
Sur les antennes des radios locales, des messages de sensibilisation invitent les parents à surveiller de près les enfants et à leur donner constamment à boire. La même précaution vaut pour les personnes âgées. Mais que l’on soit adulte ou enfant, il est conseillé de boire un minimum de 1,5 litre d’eau par jour. Un autre message invite tous à dormir hors des maisons.
De mémoire de Niorois, la vieille cité religieuse n’avait pas connu une si grande chaleur en 80 ans. Il y a des jours où le vent semble s’arrêter de souffler. Situé au cœur de la zone sahélienne, Nioro ne dispose pas d’assez d’arbres pour atténuer la chaleur et offrir de l’ombre où s’abriter. L’eau de la jarre se boit difficilement. Il faut utiliser avec précaution l’eau de la bouilloire même posée à l’ombre.
Les murs des maisons, le sol, les pierres dégagent une chaleur insupportable, même la nuit, obligeant tout le monde à dormir à la belle étoile. Les personnes âgées, qui d’ordinaire sont des couche-tôt, veillent tard la nuit devant les concession, éventail à la main.
Mme Kadiatou Bah est commerçante au marché de Nioro depuis 40 ans. Agée de 75 ans, elle est formelle : c’est la première fois qu’elle vit une chaleur d’une telle férocité.
Le doyen Djadjé Diallo est âgé de 90 ans. Il habite dans le quartier Diaka avec ses enfants et petits-enfants. Il confirme les dires de Mme Kadiatou Bah, assurant n’avoir pas souvenir d’une telle chaleur aussi loin que peuvent remonter ses souvenirs.
A Nioro, comme dans d’autres parties du pays, le nombre de décès a fortement augmenté ces dernières semaines. S’il n’existe aucune preuve établissant un lien entre le nombre de décès et la canicule, beaucoup de gens estiment que la chaleur n’y est pas pour rien.
Si comme le disent les experts, la chaleur exceptionnelle de cette année est l’une des conséquences des changements climatiques, il temps d’agir et de changer nos habitudes et comportements si nous voulons laisser à nos descendants une terre vivable.
M. DIAKITE