L’ancien Ministre de la Défense, M. Soumeylou Boubèye Maïga, n’avait rien à voir dans ce que l’on pourrait appeler la ” débâcle de Kidal “. En bon responsable, et fort d’informations crédibles, il avait estimé que la visite programmée du Premier ministre Moussa Mara était inopportune.
Cela, compte tenu des risques élevés d’attaques armées dans la région occupée par les groupes rebelles. C’est ce qui ressort du Rapport de synthèse de la Commission d’enquête parlementaire.
Par contre, Moussa Mara et le Général Mahamane Touré sont sérieusement chargés.
Faut – il rappeler que ces malheureux évènements de Kidal avaient occasionné d’énormes pertes en vies humaines. Des bilans font état d’au moins 56 morts, plus de 80 blessés graves. Les images de corps calcinés, de pauvres administrateurs civils aux mains nues éventrés, continuent de hanter les esprits. Par finir, ces évènements que l’on qualifierait de ” débâcle de Kidal ” ont fini par sonner le glas de l’invincibilité de l’armée malienne. Après mai 2014, date des évènements, la région de Kidal cessa d’exister dans le giron de la République. A qui la faute ?
Pour en savoir quelque chose, l’Assemblée Nationale mit sur place une commission d’enquête rapidement. Dirigée par l’Inspecteur Général de Police, membre de l’Assemblée, Niamé Keïta, cette commission a rendu son Rapport de synthèse. Des bribes d’informations ont commencé à circuler en fin de semaine dernière. Ont été entendus naturellement, pour des besoins d’enquêtes, l’ancien Premier ministre, M. Moussa Mara, le Ministre de la Défense de l’époque, M. Soumeylou Boubèye Maïga (SBM), et le Général Mahamane Touré, Chef d’Etat – Major Général des Armées.
D’entrée de jeu, constate t -on, l’ancien PM se trouve épinglé dans le Rapport. Pour les députés, ” l’administration publique avait été démesurément utilisée à des fins inavouées par un Premier ministre inexpérimenté ” Mieux, ils indiquent que la visite à Kidal relevait plus d’une ” action préméditée de bravoure dictée par des intérêts politiques ” que ” l’expression d’un besoin de vérifier le bon fonctionnement de l’administration dans l’Adar des Ifoghas “.
Dans le même sens, le Rapport précise que des ” alertes et mises en garde formelles dont certaines provenaient du Ministre de la Défense (SBM), autorité administrative et politique en contact direct avec les troupes militaires sur le terrain, dissuadaient ce déplacement ” dans la zone de guerre de Kidal.
Moussa Mara s’était – il entêté alors ? Pour les députés, en tout cas, ” l’exercice de hautes responsabilités au sommet de l’administration publique requiert un homme prudent et avisé qui, s’appuyant sur des décisions dans l’intérêt supérieur de la Nation, sauvegarde sa vie et celle des autres “. Parait -il d’ailleurs que le commandement des forces armées maliennes basé à Kidal, avait été informé par la MINUSMA et SERVAL (forces onusienne et française) qu’il y avait une ” tension perceptible, marquée par le renforcement d’effectifs des groupes rebelles dans la localité pour afficher une hostilité à la mission du Premier ministre “.
Qu’en était – il du Ministre de la Défense ? La réponse est donnée par Moussa Mara en personne.
” J’ai demandé à M. Soumeylou Boubèye Maïga, qui était souffrant, de retourner à Bamako, compte tenu de son état de santé “.
A sa suite, les députés ont relevé que le Ministre de la Défense avait informé son Premier ministre sur le risque élevé des attaques armées à Kidal. En bon responsable, au fait des réalités sur le terrain, il avait même jugé cette visite d’inopportune. Tout cela ressort bien sûr du Rapport d’enquêtes.
Comme on le voit, les charges qui pèsent sur l’ancien PM sont lourdes. S’il avait un tout petit peu écouté son ministre de la Défense, il n’y aurait pas tant de morts, de gâchis. Et le Mali ne perdait pas le contrôle de la région.
Enfin, pour avoir conduit des opérations militaires non préparées, le CEMGA, Général Mahamane Touré, devrait s’expliquer. De toutes les façons, les observateurs étaient unanimes, bien avant le Rapport d’enquêtes, sur le fait que l’ancien Ministre de la Défense n’entreprendrait aucune aventure militaire sans maîtriser les tenants et aboutissants. Son honneur demeure donc intact.
Notons que c’était sur instructiuon de M. Soumeylou Boubèye Maïga, que son parti (ASMA-CFP) a demandé à leur groupe parlementaire, qui à son tour avait adressé une correspondance à tous les autres groupes parlementaires, l’ouverture d’une enquête parlementaire sur les massacres de Kidal. Bien avant l’ouverture de cette enquête, certains députés l’opposition parlementaire avaient revélé le rôle de Sapeur Pompier joué par M. Maïga, alors Ministre de la Défense et des Anciens Combattants à l’époque des faits pour éviter cette situation. Membre de la délégation du Premier ministre M. Moussa Mara, Soumeylou Boubèye Maïga a émis tout d’abord le souhait d’aller tâter le terrain à Kidal avant l’arrivée du Premier ministre. C’est ainsi qu’il a été confronté à toutes les difficultés du monde et il avait même failli laisser sa peau n’eut été la présence des forces étrangères. Une fois arrivé à Gao où l’attendait le Premier ministre et les autres membres de la délégation, le Ministre de la Défense a fait un compte rendu fidèle de la situation et a même demandé à Moussa Mara de surseoir à cette visite car les conditions n’étaient pas réunies à Kidal pour une visite apaisée.
Malgré tout, Moussa Mara, décidé à effectuer cette visite, restera sur sa position. Ainsi, lorsque les membres de la délégation s’apprêtaient à quitter Gao pour Kidal, M. Soumeylou Boubèye Maïga, malgré son état de santé très fragile, était prêt à faire le voyage. Mais c’est sur insistance de Moussa Mara que M. Maïga resta à Gao pour recevoir des soins. Et à Kidal, on connait la suite.
Dans aucune partie du rapport de la Commission ad’hoc chargée d’enquêter sur les massacres de Kidal en Mai 2014 n’a parlé de Soumeylou Boubèye Maïga. Ce rapport a épinglé M. Moussa Mara et le Chef d’Etat-Major Général des Armées, le Général Mahaname Touré. Préssenti pour remplacer le vieux Modibo Kéïta à la Primature, M. Soumeylou Boubèye Maïga est aujourd’hui victime d’une campagne d’intoxication qui ne dit pas son nom. Et le doigt est même pointé sur le RPM qui souhaiterait que le futur locataire de la Primature soit issu de son rang. Même si le Mali devrait s’écrouler après par manque d’incompétences.
Aujourd’hui, la connaissance du Mali et les expériences accumulées plaident largement en faveur de M. Soumeylou Boubèye Maïga. On se souvient encore les services rendus par l’homme sous le régime des Présidents Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré. En tant que Ministre de la Défense et des Anciens combattants, il s’est battu pour mettre les militaires dans les meilleures conditions de vie et de défense de l’intégrité territoriale. D’ailleurs la réforme en cours au sein des Forces Armées Maliennes (FAMAs) porte, à n’en pas douter, son empreinte. Aussi, au Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, la diplomatie malienne avait atteint un niveau jamais égalé au cours des trente dernières années. Pour preuve, la mobilisation de plusieurs bailleurs autour du Mali. Ce qui ne surprend guère car l’homme est un journaliste couplé de diplomate. Aujourd’hui, on se pose la question à savoir à qui profite cette campagne d’intoxication ? En tout cas pas le Mali. Le Mali, sous le Président Ibrahim Boubacar Kéïta, doit pouvoir récompenser ses fils pour services rendus. Une manière aussi de pousser d’autres sur le chemin de l’excellence.
Commentaires d’un vieux notable du quartier populaire de Médina – Coura qui l’a côtoyé depuis de longues dates : ” Je le connais parfaitement. Je sais que sa foi musulmane lui recommande de respecter les vies humaines. En aucun moment, je n’aurais imaginé qu’il prendrait le risque d’envoyer des innocents à la mort. Le Rapport des députés ne m’a guère étonné. ”
B. Koné- Y. Sangaré