Difficile de donner une indication du nombre des marcheurs. On peut en revanche affirmer que le défi de la mobilisation a été largement relevé par les compagnons de Soumaïla Cissé et de Tiébilé Dramé, mais la réceptivité à une ouverture ou collaboration avec le régime en place semble le disputer à la démonstration de force.
Le moins qu’on puisse dire c’est que l’ajournement de la manif n’a pas eu raison de l’ardeur des organisateurs. Pour le nouveau rendez-vous, les partis politiques de l’opposition ont pu s’associer certaines associations de la société civile pour battre ensemble le pavé, Samedi 21 Mai et choisir la rue pour dénoncer ce qu’ils ont convenu de qualifier de dérives et de mauvaise gouvernance du régime.
Partie de la Place de la Liberté au Boulevard de l’Independence, les manifestants ont ainsi réussi le pari de la mobilisation, tel qu’en attestent une puissante marée humaine ayant déferlé sur l’itinéraire bondé de monde d’un bout jusqu’à l’autre. 20 ou 25 mille personnes, selon les estimations, mais il s’agit pour sûr d’une performante jamais atteinte par un parti ou coalition d’opposition, ont pu se réjouir les initiateurs de la marche qualifiée d’action pacifique de l’opposition républicaine.
Des députes du groupe parlementaire VRD aux cadres des partis de même obédience en passant par les mouvements des femmes et des jeunes, entre autres, tous ont répondu présents à l’appel de leurs leaders respectifs parmi lesquels le chef de file, l’Honorable Soumaila Cisse, aux côtés de Tiébilé Dramé du PARENA ou encore d’Oumar Hammadoun Dicko du PSP.
Quant à Modibo Sidibé, une autre figure emblématique de la même mouvance, il a opté contre toute attente pour une défection que ne saurait combler la présence de l’ancien ministre Souleymane Koné, lequel a également battu le pavé au même titre que son ancien collègue du gouvernement ATT Djibril Tangara du FCD, le président du PIDS Daba Diawara, Sadou Harouna Diallo du PDES, entre autres.
Cette impressionnante brochette d’opposants a parlé d’une même voix pour dire à l’unisson ‘’non’’ à ce qu’ils qualifient de dérive et de mauvaise gouvernance du régime d’IBK, dénonciations qu’ils ont également affichées sur les banderoles brandies en même temps que sont scandés les slogans de contre la ‘’la corruption généralisée’’, ’’la dilapidation des ressources’’, ‘’l’arrogance et le mépris’’ ou encore ‘’la partition du pays’’ et les ‘’coupures d’eau et d’électricité’, ‘’le chômage des jeunes’’, etc.
Selon le président du Parti du Bélier Blanc, Tiebile Dramé, la réussite de la manifestation de l’opposition prouve à suffisance l’état d’esprit d’un peuple visiblement fâché contre le président de la République pour les fiascos qu’il n’a de cesse d’accumuler dans tous les secteurs de la gestion du pays. Et M. Dramé d’exprimer le souhait que le président IBK guérisse de son autisme car, selon lui, le chef de l’Etat malien souffre plus de cette maladie que de la tumeur déclarée au peuple, à en juger par son refus manifeste d’être à l’écoute sur la gestion du Mali.
C’est après avoir fait entonner l’Hymne National par les marcheurs, en signe d’amour et d’attachement de l’opposition pour la patrie, que le président du PARENA a cédé le crachoir au chef de file de l’opposition. Soumaila Cissé, il s’agit de lui, n’a pas tari de reconnaissances envers les militants des partis de l’opposition et des associations de la société civile pour leur adhésion à sa cause ainsi que pour la satisfaction que lui procure leur impressionnante mobilisation.
Il a, par la suite, rendu un vibrant hommage aux Famas et aux forces étrangères tombés pour le Mali, avant de mentionner que la marche signifie que rien ne bouge au Mali : de l’électricité à l’eau en passant par le panier de la ménagère, l’école avec la fermeture des classes dans nombre de localités des régions du centre et du Nord comme Tenenkou, Douentza, Kidal, etc. Bref, c’est le pis-aller, a laissé entendre chef de file de l’opposition, indiquant au passage que «les Maliens veulent un Etat au service du développement et de l’économie, qui soutienne les initiatives des citoyens pour le développement, garantisse la création de richesses par le secteur privé». Au lieu de quoi, a poursuivi le challenger d’IBK en 2013, le peuple attend depuis trente mois en vain que «l’Etat affirme son autorité, qu’il prenne ses responsabilités en matière de sécurité et de défense du territoire ».
Sur toutes ces questions, l’opposition dite républicaine et démocratique a profité de sa manifestation pour prendre à témoin l’opinion nationale et internationale en exigeant du même coup la tenue d’assises nationales de refondation de l’Etat, le retour du Président ATT pour une vraie réconciliation nationale, la fin de la dilapidation des ressources publiques, une meilleure dotation des FAMAs pour la défense de l’intégrité du territoire et la sécurisation des personnes et de leurs biens, une gestion plus transparente des ressources allouées aux secteurs de la défense et de la sécurité, un allégement de la souffrance quotidienne des ménages ainsi que le retour au dialogue pour contenir un malaise social grandissant.
Comme on peut constater, en définitive, la manifestation ainsi que les dénonciations de l’opposition malienne s’apparentent plus à un vecteur de rapprochement que de démarcation, avec un ton parfois assimilables à un appel du pied au détour de pressions probablement destinées à contraindre le pouvoir au dialogue et à l’ouverture. C’est le sens pour le moins apparent des propos de l’opposant le plus acerbe, Tiébilé Dramé, car on a du mal à y faire le distinguo entre l’exigence d’alternance et l’accommodation d’une alternative, en l’écoutant notamment menacer d’imposer au régime les perceptions de l’opposition n termes de gouvernance du pays.
Alhousseini Toure