« Les troupes du IIIe Reich allemand viennent de franchir le Rhin. Les soldats d’Hitler balayaient tout de leur puissant feu. En moins de deux semaines, ils occupaient Paris. La redoutable armée allemande était invincible pour les uns et simplement invaincue pour les autres. Alors la France se divisa en deux : ceux qui capitulaient avec le régime de Vichy du maréchal Pétain (les collabo), et ceux qui optaient pour la résistance avec le général de Gaulle (les résistants).
Il se passa un phénomène extraordinaire qui retint l’attention des historiens et la nôtre aujourd’hui : le nombre de collabo, très élevé, alla en décroissance même avant les premières défaites allemandes. Des collabo devenaient du jour au lendemain des résistants. Ils étaient devenus collabo parce que les tous premiers collabo leur ont fait comprendre que “tout le monde” (leurs voisins, leurs connaissances, leurs parents etc.) est devenu des collabo. “il faut être réaliste. On ne peut rien contre l’occupant. Il est le plus fort. Inutile de s’exposer etc.”, entendait-on. » Ainsi écrivait Nobert Zongo dans l’Indépendant n° 87 du 04 avril 1995.
Cette histoire qui date de la Seconde guerre mondiale est pourtant toujours d’actualité. Nombreux sont les Maliens qui font la promotion de la gabegie et des détournements de fonds publics. Nombreuses sont les Maliennes qui se sont laissées entrainées dans le redoutable engrenage qu’est la corruption. Ces enfants du pays sont convaincus que Tout le monde est corrompu et affairiste. Ils se disent que se lancer sur le chemin de la vertu en refusant de se servir dans les caisses de l’Etat, est périlleux car ils se sentent ‘’seuls et abandonnés’’.
On n’est jamais seul sur le chemin de liberté, de justice et de l’honnêteté. Pour inverser cette tendance, chaque Malien et Malienne doit travailler pour devenir une référence. « Et même si on était seul? Combien de de Gaulle, la France a-t-elle eu pour initier sa libération? » De Gaule symbolise exactement le refus et le patriotisme dans une France envahie par un puissant ennemi : l’Allemagne. Le refus de Gaulle, c’est son sacrifice pour tenter de sauver son pays alors qu’il sait qu’il risque la mort. Le refus des Maliens d’hier, c’est le sacrifice de tous ceux et celles qui sont tombés sous les balles assassines de Moussa Traoré le 26 mars 1991. Et nous, aujourd’hui, quel est notre refus ?
Quel est le refus de ces millions de jeunes maliens dans un pays envahi, traqué, humilié et pillé par des ennemis tant à l’intérieur qu’à l’extérieur ? Le refus d’être collabo ou djihadiste s’impose. Comme la France envahie, le Mali a des Pétain au sommet de l’Etat. Ces Pétain, des maréchaux de la corruption, sont convaincus que l’ennemi est très puissant. Ils ont peur de l’affronter. Ils ont peur de défendre l’intégrité de leurs pays parce qu’ils veulent conserver leurs places : ils refusent le Refus.
« Dans cette défaite économique, nous devons nous démarquer des gouvernements de Vichy. La résistance aujourd’hui est le refus de la misère sous toutes ses formes: matérielle, intellectuelle, psychologique etc., dans laquelle les Pétain sans courage nous plongent. La résistance est l’engagement de se battre nuit et jour, armé de sa seule volonté pour préserver la liberté de son pays et la sienne, pour s’affranchir de la misère créée par la politique de contre-développement de nos Pétain au pouvoir. Comme du temps de la France envahie, la résistance est d’abord un acte individuel, isolé. Le refus est une prise de conscience au niveau de chaque citoyen, patriote, avant que toutes les volontés ne convergent. Sans refus individuel, pas de mouvement d’ensemble, pas de refus général. »
C’est en s’associant que les fourmis ont pu soulever l’os de l’éléphant. Sans refus individuel au sein de chaque homme ou femme de ce pays, pas de sursaut libérateur contre l’ennemi qui a divisé le pays. Sans refus individuel, pas de refus national. Le refus est d’abord individuel et personnel. Il nait de notre volonté de nous battre pour la postérité. Refusons d’être complices du refus de nos Pétain. Aucune guerre des peuples n’est jamais perdue d’avance. Tout dépend de notre refus. Tout dépend de notre engagement.
H.L