En ce moment, l’opposition malienne, qui a crié trop vite à la victoire, après sa marche hétéroclite qu’elle a réussie, il y a quelques jours, sur divers sujets entassés, est subitement rattrapée par les démons de la déchirure. L’un de ses animateurs les plus virevoltants, le très déterminé leader du PS Yeleen Koura, Amadou Koïta, l’a quittée, non sans dévoiler ses griefs. Les tares qu’il a décrites, loin des propos de circonstances, constituent les stigmates d’une opposition peu encline à s’amender aux vertus démocratiques…
Si un ténor de l’opposition abandonne le navire, comme ce fut le cas récemment pour le leader du PS Yeleen Koura, Amadou Koïta, qui a quitté sans regret ses anciens camarades de l’opposition malienne, il est de bon ton de lui couvrir d’opprobre. Le jeune président du PS Yeleen Koura et ses collaborateurs politiques, qui ont pris cette lourde responsabilité de s’écarter de la logique vengeresse de l’opposition, n’ont pas échappé à un schéma de liquidation politique, ourdi dans l’ombre, destiné à les faire regretter leur option, en les faisant passer comme des indécis politiques, toujours prêts à trahir la cause. Ce tableau, dépeint à grands traits médiatique, a été relayé dans les milieux de l’opposition, dès que l’annonce des responsables du PS fut faite, pour assombrir la portée politique de leur action en faveur de la majorité présidentielle, d’où ils ont rejoint les rangs.
Mais en fait, ce n’est que réducteur, simplement caricatural, de s’arrêter à ce prisme de l’opposition sur l’un de ses anciens partenaires politiques, celui-là même qui en était devenu, en si peu de temps, l’une des voix les plus fortes et les plus écoutées. L’itinéraire, au sein de l’opposition de ce jeune leader politique, aux dents longues, connu pour son habilité et son ouverture politiques prononcées, est symptomatique du malaise chronique qui habite l’opposition malienne et qui fait d’elle habituellement le creuset d’une injustice politique mal agencée, sur fond d’un clientélisme mal camouflé, régentant les relations politiques entre les différents bords concernés. Pour le cas qui nous concerne, la partie de ce jeune leader du PS n’était pas aisée au milieu des dinosaures politiques, de plus en plus dominateurs, et qui laissent finalement aux « petits poissons » que des portions congrues.
Ici, l’idée de partage politique, entre alliés politiques qui s’estiment, politiquement parlant, relève de la chimère politique : les droits politiques entre alliés ne sont jamais les mêmes, selon qu’il s’agit de mastodonte politique, dont les parts sont toujours revues à la hausse, et les autres, à qui il est dévolu le menu fretin. Voilà pendant longtemps ce qu’a souffert, au sein de l’opposition politique, ce jeune leader politique, Amadou Keïta, et son parti, le PS Yeleen Koura, sorti tout droit des entrailles de l’UMAM de l’ancien président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (CCIM), Jeamille Bittar, avec qui, il a été un redoutable partisan de l’émulation politique dans le pays. Ayant pris une part active à la houleuse bataille politique, contre la junte militaire au pouvoir, en faveur du retour à une vie constitutionnelle normale, à la suite du coup d’Etat perpétré contre le régime d’ATT, il était donc normale, pour ce jeune dirigeant politique, résolument engagé au compte de l’opposition politique, de peser de tout son poids politiques sur les nouvelles institutions politiques, après l’élection écrasante du président IBK à la magistrature suprême.
Il n’en fut rien : le leader du PS Yeleen Koura aura du mal à cheminer avec son attelage politique oppositionnel dont certains ténors, pour disposer des élus, lui préférons les listes communes avec la majorité présidentielle, soit le RPM ou l’Adéma. Ce fut le cas pour les dernières législatives où les sollicitations d’ouverture du PS Yeleen sur les listes de candidatures des partis de l’opposition resteront lettres mortes, la convoitise des responsables de l’opposition, pour un grand nombre d’entre eux, étant focalisé sur les combinaisons politiques avec les partis de la majorité présidentielle ? S’il lui a été reproché, à l’époque, qu’il ne s’en est pas pris à temps pour une telle configuration politique, pour les législatives, l’amertume politique du jeune leader du PS a été d’autant plus grand qu’il n’a pu obtenir aucune solidarité de ces mêmes amis de l’opposition, lesquels lui ont semblé barrer la route pour les élections communes à venir.
C’était un manque de solidarité politique de trop pour le responsable de ce jeune politique qui sait bien que dès lors qu’il s’agit de grignoter quelques élus, çà et là, histoire de se donner une certaine maturité politique sur le terrain, des leaders de l’opposition, devant qui il a peiné à trouver un écho favorable, n’ont eu aucune gêne politique à aller s’accoupler avec la majorité présidentielle. S’il s’agit du PS, membre à part entière de l’opposition, les leaders de l’opposition, eux, se s’empressent pas pour composer des listes compétitives, car préoccupés qu’ils sont par ce jeu d’alliance contre-nature avec la majorité présidentielle, susceptible de les octroyer quelques menus fretins politiques. Une majorité présidentielle, sur laquelle d’ailleurs ils n’hésitent pas à décrocher des feux roulants de critiques de toutes sortes. Ce jeu de dupe politique a fini par agacer le jeune leader politique du PS qui a compris très tôt qu’il ne pouvait plus continuer à être le dindon d’une farce politique qui se jouait à plusieurs échelons.
Manque de sincérité. Manque de solidarité agissante. Absence de vertu de partage politique. Les maux de l’opposition malienne sont presque systémiques et pernicieux pour permettre à un tel leader du PS, Amadou Keïta, affichant plutôt dans le pragmatisme politique, de s’y accommoder. À la suite de cette défection, et non des moindres, les ténors de l’opposition ont beau crier à la trahison politique, ils ne pourront pas arrêter l’hémorragie politique en leur sein aussi longtemps que l’opposition n’apparaitra qu’un réceptacle politique vide de vertus démocratiques, où les règles du jeu politique ne sont pas préalablement cryptées.
« C’est n’est pas une camisole de force, l’opposition », s’accorde-t-on à dire. La belle démonstration en a été fournie par le chef de file de l’opposition lui-même, Soumaïla Cissé, qui a fait acheminer une lettre en bonne et due forme au parti héritier du président ATT, le Pdes, en l’exhortant de préciser sa position face à la doctrine de l’opposition. Si les pendules politiques ont été à l’heure du diktat oppositionnel, dans cette affaire, il n’en demeure pas moins que la démarche soit hasardeuse et équivoque, en ce sens que le choix de l’opposition, ou de toute autre coloration politique, est avant un engagement politique conscient et responsable de ceux s’y accordent. Et non le fruit d’un colmatage politique quelconque.
par Sékouba Samaké