Jeûne : Ce qu’en disent les medecins

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Publié le vendredi 10 juin 2016 | L’Essor

© aBamako.com par A S
Pière pour la paix à la grande mosquée de Bamako
Bamako, 21 Mai 2015, la grande mosquée a abrité la prière pour la paix en présence du Président de la république SEM Ibrahim Boubacar KEITA.

Jeûner permet de maintenir une bonne santé et d’avoir l’esprit clair. Mais la pratique est déconseillée aux personnes souffrant de certaines maladies

Le jeûne est l’abstention volontaire totale ou partielle de toute nourriture pendant une période déterminée. Pendant le mois de Ramadan, les musulmans doivent s’abstenir de manger, de boire et d’avoir des relations sexuelles pendant la journée. Selon le Dr Anselme Konaté, gastroentérologue au CHU Gabriel Touré, le jeûne a un double intérêt : médical et religieux. Le premier permet de maintenir une bonne santé en reposant l’organisme, en le détoxiquant et en favorisant sa régénération.

Le jeûne permet de perdre du poids, ce qui est indiqué pour la bonne santé. Il permet d’améliorer la qualité du sommeil et de la sexualité. Le jeûne évite d’être trop stressé. Sur le système cardio-vasculaire, il permet en cas d’hypertension artérielle de baisser les chiffres de la tension. Sur le plan digestif, il faut éviter le reflux gastro-œsophagien, diminuer et traiter les douleurs liées à la pancréatite. Le fait de jeûner agit positivement sur les troubles fonctionnels intestinaux ou les syndromes de l’intestin irritable. Il diminue également les méfaits de la stéato-hépatite non alcoolique du foie. Sur le plan articulaire, cette abstention à la nourriture participe à l’amélioration des douleurs de l’arthrite rhumatoïde. Par ailleurs, le jeûne peut induire le sevrage tabagique ou alcoolique.

Le bienfait spirituel et religieux du jeûne se traduit par un sentiment de clarté d’esprit. Quand on jeûne, on a l’esprit beaucoup plus clair parce que le système digestif n’est pas envahi par une surabondance alimentaire. Ce qui permet à une personne de mieux réfléchir, de penser à son prochain et de se soumettre à certaines réalités de la vie telle que la faim.

La religion autorise les personnes en mauvaise santé à ne pas jeûner. C’est pourquoi le docteur précise qu’avant d’entamer le jeûne, il est recommandé d’effectuer une visite médicale afin de savoir si on peut jeuner ou pas. Cette recommandation formelle ne peut être validée que par le corps médical.

Le Dr Anselme Konaté explique que la préparation et l’adaptation de l’organisme au jeûne passe par plusieurs phases. Il y a tout d’abord la phase dite préparatoire. Quatre à 5 jours avant le jeûne, le jeûneur doit éviter toute consommation de protéine animale, tout ce qui est lait et produit laitier et se mettre à la consommation de légumes et fruits ou jus de fruits. Pendant cette phase, il doit absorber 2 litres d’eau entre les repas. Ensuite, vient la phase proprement dite du jeûne. Au moment de l’entamer, il faut commencer par la consommation de liquide, de bouillon, d’aliments mixés et non pas consommer des aliments solides parce que l’organisme a besoin de plus d’eau que d’aliment. L’organisme a suffisamment de réserves, on peut se passer d’aliment en surabondance.

A la rupture du jeûne, l’estomac étant au repos pendant des heures, il faut le stimuler progressivement, sans l’encombrer ou le surcharger. Pour cela, il faut consommer des tisanes, ses dattes qui sont plus digestes et ensuite passer aux aliments mixés ou moulinés. Et c’est après que l’on peut passer à quelques aliments légèrement solides telle qu’une soupe de poisson ou de volaille. Mais il faut éviter de surcharger l’estomac. La dernière étape est la phase de réintégration alimentaire. Pendant cette phase, le docteur conseille de continuer à respecter la consommation de façon graduelle.

CONSULTER SON MEDECIN. Le jeûne est déconseillé également aux femmes en état de grossesse et allaitantes, aux personnes âgées dont l’état de santé est précaire. Aussi, les personnes ayant des troubles comportementaux de l’alimentation tels que les anorexiques, les boulimiques, les personnes ayant une maigreur extrême ne doivent pas entreprendre le jeûne. Il est notamment interdit aux personnes souffrant de maladie cardio-vasculaire sévère, de maladie hépatite sévère ou de maladie rénale et psychiatrique de jeûner sans avis médical. Les personnes souffrant d’ulcère gastro-duodénal doivent également être préservées du jeûne.

Selon le Dr Amadou Koné, endocrinologue à l’Hôpital du Mali, le diabète peut être concilié avec le jeûne à condition de respecter certaines règles. C’est-à-dire adapter son alimentation et son traitement aux contraintes dues à cette période d’abstinence du lever au coucher du soleil. En premier lieu, consulter son médecin traitant ou son diabétologue avant le début du Ramadan. Ce sont les seuls interlocuteurs compétents pour juger de l’état de santé du patient et adapter son traitement. Il y a des risques que le jeûne pratiqué sans un suivi médical préalable aboutisse à des complications. Il faut donc impérativement jeûner en étroite en collaboration avec son diabétologue et surtout avoir son accord.

Un diabétique, conseille le toubib, doit être bien équilibré pour faire le jeûne. Au cours du jeûne, il doit effectuer un contrôle glycémique afin de renforcer l’auto-surveillance glycémique. Ce contrôle est effectué chaque jour avant le repas suivant le coucher du soleil. Juste après le premier contrôle, il faut en faire un autre, puis un dernier avant le lever du soleil. Après le dernier contrôle, si le taux de glycémie est inférieur à 0,70 g/l, il faut obligatoirement rompre le jeûne et consommer du sucre immédiatement.

Le Dr Samaké Awa, diabétologue également à l’Hôpital du Mali, estime que le diabétique de type 1 et sous insuline peut opter pour le jeun, s’il est bien équilibré et n’a aucune complication. Dans ce cas, il faut diminuer la dose d’insuline pour éviter de tomber dans l’hypoglycémie. Par contre, les patients du type 1 avec complication cardiovasculaire, rénale ou oculaire doivent s’abstenir de jeûner ainsi que ceux qui doivent recevoir de l’insuline 3 fois par jour. Elle précise que les femmes en état de grossesse et de type 1 doivent aussi s’abstenir. Quand aux patients de type 2, sans complications et qui reçoivent des comprimés anti-diabétiques par voie orale 1 à 2 fois par jour, ils peuvent jeûner s’ils sont bien équilibrés. Par contre, pour les patients équilibrés qui doivent prendre des comprimés trois fois par jour, le jeûne est décommandé. C’est le cas aussi des patients de type 2 avec complications. Le Dr Samaké Awa conseille de manger moins gras et moins sucré. Et aussi de pratiquer un exercice physique pendant 30 minutes et 5 fois par semaine. Pendant le mois de carême, elle recommande même de pratiquer une activité physique le matin et le soir.

F. NAPHO