Invité spécial du point de presse hebdomadaire de la Minusma, Hervé Gomart, chef d’état-major de la force de la Minusma, a fait un tour d’horizon sur les activités opérationnelles de la force ainsi que les difficultés auxquelles elles sont confrontées sur le terrain. C’était le jeudi dernier, à l’hôtel de l’Amitié.
Faisant le bilan des pertes subies par la Minusma, Hervé Gomart, Général de division, a rappelé que la Minusma a perdu la semaine dernière cinq (5) Togolais, (6) six Tchadiens au Nord d’Aguel hoc; un Chinois tué à Gao et tout cela en quinze jours. Selon lui, la perception qu’on peut en avoir, c’est une perception qui est normale, naturelle. Cela engendre un certain nombre de questions tout à fait légitimes qui sont, entre autres: les casques bleus qui sont là, ils se font tuer. A quoi servent-ils ? Que font-ils ? Faut-il maintenir cette mission ? Faut-il maintenir la Force ? Ont-ils les moyens pour remplir leur mission ?
Selon le chef d’état-major, c’est un sujet qui est délicat parce qu’il n’y a pas forcément des réponses parfaitement établies. Concernant la mort des éléments du contingent togolais, il a fait savoir que cela est dû à une mine ou un IED. En plus de ceux-là, il y a eu des tirs à la kalachnikov qui n’ont tué et blessé personne, parce que les Togolais ont réagi. Ils ont ouvert le feu, mettant en fuite les assaillants. Celui de Gao, indique-t-il, c’est un véhicule suicide. «J’étais présent à Gao dans le camp, j’ai vu les vidéos, je sais à peu près ce qui s’est passé. Si nous n’avions pas eu une bonne protection du camp, s’il n’y avait pas eu une bonne réaction du contingent chinois, s’il n’y avait pas eu la réaction rapide des Sénégalais qui étaient au «Super Camp», nous aurions pu avoir beaucoup plus de morts. Nous déplorons un mort, nous déplorons quatre blessés graves, mais s’il n’y avait pas eu cette capacité de la Force à réagir, cela aurait été beaucoup plus grave», a-t-il affirmé. Avant de préciser que la Force n’est pas là comme des agneaux qui vont à l’abattoir. « Si on nous attaque, on va réagir », a-t-il déclaré. Par ailleurs, il a fait remarquer que la force ne pourra pas éviter les mines et les IED parce qu’on forme les contingents à savoir détecter ces engins explosifs sur les axes sur lesquels on circule. Toutefois, il reconnaitra que même avec les meilleurs moyens du monde, ‘’que nous n’avons pas, on ne pourra pas détecter tous les engins explosifs’’. « On continue à s’entraîner, on continue à se préparer à ce genre de mission et demain, si on est attaqué, on réagira. C’est vraiment l’idée forte qu’il faut retenir. Nous sommes des soldats qui réagissent quand on les agresse et qui réagiront encore plus fortement demain quand on les agressera », a-t-il expliqué.
Parlant des défis de la Minusma, il dira qu’ils sont nombreux. A l’en croire, biens des Maliens s’interrogent sur ce que fait la Minusma si elle n’a pas de mandat contre le terrorisme. Selon lui, pour agir contre les groupes terroristes, il faut d’abord savoir où ils sont ; combien ils sont et comment ils agissent. « Ce qui nous manque essentiellement d’agir, c’est l’information » a insisté le chef d’état-major. Partant, il fera remarquer que la Minusma qui compte environ 11 000 soldats n’a pas des informations sur les terroristes. Cela demande des moyens techniques que nous n’avons pas. Ainsi, il a saisi cette occasion pour lancer un appel à la population à plus de coopération avec la Minusma. Et au-delà de la population, les groupes armés signataires, surtout leurs responsables, à coopérer davantage avec la Minusma.
«Dans toutes les guerres, dans tous les conflits, le meilleur renseignement c’est le renseignement humain. Il y a des millions de Maliens sur le terrain, il y’en a qui savent des choses, il faut nous transmettre ces renseignements. Je comprends parfaitement que parmi la population, certains craignent des représailles. Je le comprends parfaitement; mais, ces gens-là, ils peuvent le faire sans s’adresser directement à la Force : ils ont des représentants, il y a des autorités civiles, politiques, il y a des représentants des groupes armés signataires qui, eux, sont toutes les semaines à des tables ici à Bamako pour discuter.
.L’information est capitale dans cette lutte. Sans elle, le processus n’avancera pas. Même si demain on met plus de soldats, ça ne va pas révolutionner le processus de paix, ça ne va pas révolutionner la situation sécuritaire», a-t-il conclu.
Boubacar SIDIBE