Le Mali est un pays de migrants. Il ne s’est jamais passé de noyade dans la Méditerranée sans qu’il n’y ait des maliens pris au piège entre la souffrance du mal vivre au pays et le mirage de l’Eldorado. L’on connait les statistiques internationales sur la question. Mais les autorités nationales font très peu de cas des maliens qui y perdent la vie. L’OIM estime que depuis le début de l’année 2016 il y a eu 2 809 morts en Méditerranée, à comparer avec les 1 838 morts durant le premier semestre 2015 contre 3 500 morts en 2014. « Le nombre de décès en Méditerranée en 2016 dépasse de presque mille personnes le bilan du premier semestre 2015, alors qu’il reste encore trois semaines avant la fin du premier semestre 2016 », a indiqué l’OIM dans un communiqué. Pourquoi c’est sur les médias occidentaux que nous apprenons les naufrages de nos compatriotes ? Pourquoi les autorités maliennes n’ont jusqu’ici pas adopté une politique de sensibilisation qui décourage nos futurs candidats à l’immigration ? Pourquoi depuis le fameux film « Bako ou l’autre Rive » de Jacques Champreux en 1979 sur l’immigration, on tarde à trouver des solutions à un fléau dont les causes sont pourtant connues ? Que vaut alors le département en charge des maliens de l’extérieur ? Pourquoi ne sait-on jamais le nombre de jeunes maliens noyés en traversant la méditerranée et leurs régions de provenance ?
Un Pays qui ne fait pas de l’avenir de sa jeunesse une priorité absolue, est un pays qui restera longtemps à la traine. Le devenir d’une nation passe non seulement par une bonne éducation de sa jeunesse, mais aussi et surtout par la création d’emplois. La ruée de la jeunesse malienne vers des horizons supposés être des Eldorados ne peut s’expliquer que par un manque d’opportunités, un désespoir et surtout l’inadéquation de la formation-emploi leur permettant d’entreprendre par eux-mêmes. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir quelle est finalement l’utilité du département en charge des maliens de l’extérieur et de surcroit, que fait le titulaire du portefeuille, M. Abdramane Sylla qui, en plus, est un ressortissant d’une zone à forte immigration ? Le constat est désolant surtout quand on regarde l’ORTM qui au lieu de donner plus d’espace aux émissions de sensibilisation ou d’organiser des débats sur les conséquences de l’immigration, consacre le plus clair de son temps d’antenne aux émissions folkloriques qui n’ont aucun impact sur la jeunesse. Face à cette pandémie qu’est devenue l’immigration clandestine, le département en charge des maliens de l’extérieur est fortement interpellé. Il faut qu’il arrive par des politiques novatrices à répondre à un certain nombre de questions dont celles relatives au nombre de victimes maliennes dans les différents drames dans la Méditerranée. Il est attendu également sur le terrain de la sensibilisation pour décourager ces milliers de jeunes qui sont toujours tentés par cette aventure si périlleuse. Pour rappel, beaucoup de jeunes maliens sont toujours bloqués en Lybie ou au Maroc dans l’espoir d’emprunter un jour la pirogue-mouroir pour aller à la recherche du « Bonheur ». Que fait le gouvernement malien pour eux, lui qui a le devoir de protéger et de voler aux secours de ses citoyens en situation de difficulté ? N’a-t-il pas le devoir de les sensibiliser sur les risques qu’ils encourent en se lançant dans cette aventure ? Les autorités maliennes sont enfin attendues pour donner des réponses aux multiples préoccupations de la jeunesse dont les plus urgentes sont l’emploi et la formation.
En définitive, l’immigration clandestine est en train de faire plus de victimes au Mali que la pandémie du Sida. Ce tueur silencieux qu’est l’immigration a presque décimé des villages entiers dans certaines localités du pays. Alors face à ce bilan macabre les autorités ne doivent plus se taire sur les conséquences de ce fléau.
Youssouf Sissoko
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