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HCUA : Une torpille au cœur du processus de paix
Publié le mercredi 15 juin 2016  |  Le Matin
La
© AFP par FAROUK BATICHE
La rébellion touareg du Mali a paraphé l`accord de paix d`Alger
Alger, le 14 Mai 2015, la rébellion a paraphé à Alger l`accord pour la paix au Mali du 1er mars.




En voulant mettre les points sur les «i», après avoir été accusé de connexion avec Ançar Dine d’Iyad Ag Ghali dans une déclaration attribuée au ministre français de la Défense, le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) n’a réussi qu’à se découvrir davantage dans son jeu trouble.

«Ce qui nous préoccupe et commence à nous agacer franchement, c’est le double jeu du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA). C’est l’un des groupes signataires des accords d’Alger, mais en même temps, clairement, il n’hésite pas à afficher une forme de proximité avec Iyad Ag Ghali et Ançar Dine, que ce soit une proximité sur le fond ou d’hommes» ! C’est la déclaration attribué en milieu de semaine au ministre français de la Défense, M. Jean-Yves Le Drian, par la presse nationale et internationale.



Directement indexé, la réaction de ce mouvement rebelle était très attendue par les observateurs. Et cela n’a pas tardé car dans un communiqué daté du 10 juin 2016 et publié le lendemain, le HCUA souligne avoir appris avec «indignation» dans la presse «les propos injustes et très graves tenus par le ministre français de la défense Mr Jean Yves Le Driant insinuant un double jeu de la part du HCUA et l’accusant de proximité avec les groupes terroristes en l’occurrence Iyad Ag Ghali et Ançar Dine».

Le communiqué revient sur «les nombreux efforts entrepris par le HCUA depuis sa création pour récupérer la jeunesse azawadienne et stopper son enrôlement dans tout groupe proche de l’extrémisme religieux et lui trouver un cadre de vie propice et digne sur son espace vital», assure le porte-parole de cette organisation M. Almou Ag Mohamed.

«C’est cet esprit qui est derrière la création de notre mouvement. Pour réussir ce pari, nous avons fait de nombreux sacrifices et nous avons plutôt besoin d’un soutien de la communauté internationale, et notamment de la France, loin des propos accusateurs, improductifs et anachroniques», a-t-il poursuivi dans le communiqué.

Loin de «blanchir» le mouvement d’un quelconque jeu trouble, ce communiqué semble avoir définitivement levé le voile sur les ambitions réelles de ce groupe.

En effet, le communiqué évoque une «jeunesse azawadienne» et rappelle que «la stabilité et la paix dans le Sahel passent par une gestion autonome par les populations locales azawadiennes de tous les aspects de la vie aussi bien politique, économique que sécuritaire».

Malgré la signature de l’Accord de paix, il est clair que les composantes de la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad) n’ont pas renoncé à leur projet d’un fédéral ou autonome de l’Azawad.

Et pour Almou Ag Mohamed, le porte-parole du HCUA, le rôle de la France et de l’ONU est «d’aider les azawadiens à retrouver leur identité et à gérer librement leurs affaires». Et comme Barkhane et la Minusma ne jouent pas ce jeu à la satisfaction, les attaques et les embuscades se multiplient contre ces forces pour les intimider et les pousser à plier bagages.

Au-delà de la régionalisation requise par l’Accord, cette revendication explique la position actuelle affichée par les composantes de la CMA à Kidal. Une région qui est fermée aux officiels maliens avec une ville qui est sans doute la capitale d’une entité militaro-politique et administrative (République autonome ou Etat fédéral) avec laquelle le Mali doit se préparer à coexister.

«Nous avons signé avec le gouvernement malien, un accord de paix qui est sensé être un cadre de base pour aboutir à une solution à terme, bien que ne répondant pas aux aspirations de la majorité des azawadiens», rappelle le porte parole du HCUA, Almou Ag Mohamed.

Cette déclaration est une stratégie de chantage non seulement sur le gouvernement malien, mais aussi sur la communauté. Une manière de dire, «sans nous, il n’y aurait pas eu d’Accord car les populations du présumé Azawad sont opposés à la paix».

Mais, en réalité, ce sont les populations de l’Adrar des Ifoghas qui n’en peuvent plus de cette belligérance entretenue par des hors la loi en qui elles ne se reconnaissent que sous la menace des armes.

Aujourd’hui, ces infortunés «Azawadiens» souhaitent la paix plus que n’importe quel Malien. Et ils l’ont prouvé par des manifestations réclamant l’éducation pour leurs enfants et les services sociaux de base (eau, santé…) pour les populations, notamment les femmes.

Le HCUA rappelle également qu’il est un des piliers de la Coordination des Mouvements de l’Azawad, «un acteur incontournable du processus» et qu’il «œuvrera sans relâche pour une CMA forte et plus que jamais unie». Depuis la signature de l’Accord de paix, on n’a pas besoin d’une CMA forte pour sa mise en œuvre, mais d’une coordination qui œuvre honnêtement et sincèrement au retour de la paix.

Il n’y a plus l’ombre d’un doute que le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad manœuvre comme un cheval de Troie au cœur du processus de mise en œuvre de l’Accord qu’il a paraphé avec le gouvernement et les autres mouvements, il y a seulement un an.

Ses responsables font le jeu d’Iyad Ag Ghali qui s’est juré de saboter le processus de paix, dont il a été exclu à cause de son attachement au terrorisme islamiste. Même s’ils semblent constituer un courant de modérés peu favorables à l’islam politique, les responsables du HCUA ne sont jamais parvenus à donner des gages sûrs et convaincants de leur indépendance vis-à-vis des d’Iyad et de sa bande de jihadistes sans foi ni conviction religieuse.

Ce qui est claire après cette réaction maladroite du porte-parole du HCUA, ce que le temps est en train de donner raison aux Maliens qui sont nombreux à croire que la communauté internationale contraint leur pays à négocier la paix avec des groupes qui ont d’autres motivations que de s’inscrire dans le principe de l’intégrité d’une République qu’ils continuent de plumer, mais à haïr.

Après le Chef de la Minusma et le ministère français de la Défense, c’était au tour du Chef d’Etat-major de la force onusienne au Mali, Général Herve Gomart, de reconnaître qu’il y a «des gens» qui sont avec les forces étrangères le jour et du «côté des terroristes» la nuit. Aujourd’hui, tout le monde sait qui sont ces «gens» et quelle est leur vraie motivation : l’indépendance de l’Azawad déguisée en autonomie !

Hamady Tamba
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