« A l’issue des analyses d’échantillons effectuées sur la qualité des engrais subventionnés, nous avons décelé des quantités « hors normes », surtout au niveau des substances minérales appelées complexe coton et complexe céréales. Nous mènerons jusqu’au bout notre enquête pour assainir le secteur. Des pénalités sont prévues en la matière pour les contrevenants ». Tels ont été, en l’occurrence, les propos tenus mardi après-midi par le ministre de l’Agriculture Kassoum Denon lors de la conférence de presse qu’il a organisée dans la salle de conférence de la Maison de la presse.
C’était en présence de son homologue de l’Elevage et de la Pêche, Dr Nango Dembélé, du secrétaire général du département de l’Agriculture, Daniel Siméon Kéléma, des responsables des services techniques relevant des deux départements et un parterre de journalistes de la presse publique, privée, audiovisuelle et écrite.
Le chef du département de l’Agriculture a initié cette rencontre pour faire le point d’un certain nombre de problèmes touchant le monde agricole de façon générale et des préparatifs de la campagne agricole 2016-2017. Ainsi, il a fait le point sur la situation de l’approvisionnement des producteurs en engrais minéraux et les analyses d’échantillons effectuées par des laboratoires internationaux, régionaux et locaux pour certifier de la teneur conforme des éléments minéraux présents dans les sacs. Il a évoqué la distribution des 1000 tracteurs du programme présidentiel, le programme de nouveaux villages agricoles qui a pour ambition de faire de l’agriculture un métier attrayant et rentable.
La question foncière rurale, l’adaptation aux changements climatiques de l’agriculture et l’élevage grâce à des technologies innovantes développées par l’Institut d’économie rurale (IER), les résultats de la campagne agricole 2015-2016 ont été aussi les sujets abordés dans l’exposé liminaire du ministre Denon.
PAS DE FONCTIONNAIRE BÉNÉFICIAIRE.
Son collègue de l’Elevage et de la Pêche, Dr Dembélé s’est lui appesanti sur la promotion de la pisciculture et de l’aquaculture grâce à la subvention des alevins et de l’aliment poisson, sur l’insémination artificielle pour la production de viande et de lait à travers l’amélioration génétique de nos races bovines locales. Il a, en outre, souligné la promotion des industries de transformation des produits agricoles et animaux qui sont une source importante d’absorption du chômage, car ces unités emploient un fort taux de jeunes ruraux.
La qualité des engrais subventionnés, la vente illicite d’engrais et le sous-dosage ont focalisé l’attention des journalistes. Ainsi, des analyses contradictoires effectuées ont révélé qu’une certaine quantité d’engrais minéraux subventionnés est considérée comme « hors normes », a souligné le ministre Denon.
Il a précisé qu’un engrais est appelé « hors normes » quand il ne contient pas les teneurs d’éléments nutritifs indispensables pour le développement de la plante. Toutefois, cet engrais « hors normes » pourrait être utilisé par le paysan, mais ce dernier ne pourra pas prétendre à la fertilisation optimale désirée en raison des quantités insuffisantes des éléments nutritifs indiqués. Il a souligné que son département mettra tout en œuvre pour que ces quantités incriminées ne soient pas utilisées par le paysan, car la productivité à l’hectare est et reste le crédo du ministère.
A propos des sous-dosages effectués par les paysans en raison des ventes illicites des engrais et des sorties illégales, le ministre a expliqué que son département a sensibilisé les producteurs sur les risques de détournement des engrais. Lors d’une récente tournée dans les zones de production cotonnière, le ministre Denon avait demandé aux autorités coutumières, administratives, aux forces de sécurité de veiller à empêcher toute sortie d’engrais du territoire.
Pour ce qui est des tracteurs, le ministre Denon a soutenu qu’aucun fonctionnaire n’a bénéficié de ces machines. Les fonctionnaires candidats ne pouvaient pas remplir les conditions édictées par les critères d’éligibilité. A ce jour, la presque totalité des tracteurs est partie dans les champs des paysans bénéficiaires, a révélé le ministre Denon. Avant de préciser que le programme des 1000 tracteurs répond à une volonté du président de la république Ibrahim Boubacar Kéita d’améliorer le taux d’équipements des paysans en le faisant passer de 40 à 60% à l’horizon 2018. D’autres équipements agricoles comme les motoculteurs, les moissonneuses-batteuses, les semoirs, les attelages, les botteleuses etc feront partie de la prochaine opération.
LES MARCHÉS À BÉTAIL AU CŒUR DES SPÉCULATIONS.
Le concept de nouveaux villages agricoles se comprend comme un espace aménagé avec toutes les commodités (habitat rural, équipements collectifs, parcelles agricoles et d’élevage, unités de transformation des produits agricoles et animaux) sur lequel le jeune sera installé et exploitera le périmètre aménagé mis à sa disposition. Ce concept ne s’oppose pas à l’agropole qui vise à promouvoir des bassins agro-écologiques donnés afin de promouvoir des spéculations agricoles et des espèces animales bien déterminées assorties d’unités de transformation comme dans le cas des villages agricoles.
Le ministre de l’Elevage et de la Pêche, Dr Dembélé a souligné que l’élevage est réduit à sa plus simple dimension en raison des rétrécissements des espaces, parcours pastoraux, des gîtes d’étapes. Ce phénomène engendre des conflits entre éleveurs et agriculteurs. Pour évoquer l’ampleur du phénomène, il a cité en exemple les menaces d’expropriation qui planent sur les marchés à bétail de Niamana et de Kati Dral. Ces deux espaces qui sont considérés comme les plus grands marchés d’approvisionnement de la capitale sont menacés de disparition en raison des convoitises des spéculateurs fonciers. « S’il faut déplacer ces espaces à la suite de ces expropriations, il faut s’attendre à un renchérissement des coûts d’acquisition des animaux », a prévénu le ministre Dembélé.
Par ailleurs, notre pays a besoin d’une amélioration génétique de nos races bovines. Or, il se trouve que le vivier de chercheurs et de cadres compétents s’amenuise presque à tous les niveaux du département, services techniques compris, a fait remarquer le chef du département de l’Elevage et de la Pêche.
La conférence de presse s’est achevée sur une note optimiste quand le ministre Denon a déclaré que le pays a enregistré à l’issue de la campagne agricole 2015-2016 un excédent céréalier de 1.588.000 tonnes, dont 1.391.000 tonnes de céréales sèches et 197.000 tonnes de riz. Pour la présente campagne qui démarre, le pays s’attend à une production céréalière de 8 millions de tonnes, dont 60% de riz et de maïs. Il a souhaité une bonne campagne agricole aux producteurs exempte de calamités naturelles.
M. COULIBALY