Le conseil de sécurité de l’ONU a examiné jeudi dernier le rapport du secrétaire général de l’ONU sur le Mali. Les responsables des groupes armés ont suivi de près cette rencontre. La plate forme estime que pour ce nouveau mandat, les Casques bleus « doivent sortir de leurs barricades ». Quant à la déclaration du Premier ministre au conseil de sécurité de l’ONU relative au démantèlement des bases des groupes armés, pour elle, « il s’agit plutôt des groupes qui se substituent à l’État sur le terrain», ce qui d’après elle « est fortement interdit par l’accord ».
Firoun Maiga, membre de la plate-forme est joint par Ayouba Sow :
« Qu’aujourd’hui, la Minusma renforce son système pour donner plus de confiance et créer les meilleures conditions de stabilité pour le pays, c’est quelque chose de très important. Je pense qu’aujourd’hui, il faut que ça soit un mandat qui est capable d’aller au-delà de ce qu’on a connu. Les checks-points, dans les points qui ont été déjà définis comme points occupés par les mouvements avant la signature de l’accord étaient des points qui étaient reconnus et qui permettent aux combattants de se regrouper. Sur la demande des mouvements, le gouvernement s’est engagé à prendre en charge les combattants. Aujourd’hui, ce n’est pas aussi facile de pouvoir amener six-cents personnes sur un site. Donc, il y a des regroupements qui se retrouvent quelque part en attendant le cantonnement. Je ne pense pas que c’est de cela dont il s’agit. Il s’agit peut-être des mouvements qui, de manière volontaire jouent le rôle régalien de l’état et ça, je pense que ce n’est pas normal. L’accord ne permet à personne de se substituer à l’état. Il faut démanteler ces checks-points ».
Les responsables de la CMA estiment que le mandat de la Minusma est déjà robuste même s’il y a des faiblesses au niveau opérationnel, à corriger. En ce qui concerne la demande de démantèlement des camps des groupes armés, la CMA qualifie cette déclaration du Premier ministre « inappropriée ». Selon ses responsables, « il faut appliquer les dispositions de l’accord qui prévoient la levée de ces checks-points ».
Almou Ag Mohamed est porte-parole de la CMA. Il est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« La Minusma est constituée de plusieurs contingents africains qui n’ont pas les mêmes formations, qui n’ont pas les mêmes modes opératoires, donc ce qu’il faudrait plutôt, c’est de revoir tout cela et puis essayer de voir comment dans son nouveau mandat, la rendre plus opérationnelle ».
Le Premier ministre, au conseil de sécurité des Nations unies a demandé le démantèlement des checks-points des mouvements. Êtes-vous favorables à cette demande ?
« Nous pensons que c’est une déclaration maladroite parce que le processus, de toutes les façons, il ne continuera qu’avec les mouvements. Quand t-on aura démantelé les bases des mouvements, nous ne voyons plus avec qui, le gouvernement va continuer le processus. Il y a des dispositions qui parlent de comment petit à petit, les bases vont être levées et seront fondues dans une armée reconstituée comme le stipule l’Accord. Donc, ce n’est pas avec une déclaration comme ça qu’on va démanteler ou qu’on va lever les bases, les camps de la coordination ».
Les secrétaires généraux et plusieurs hauts responsables de la CMA sont attendus ce week-end à Bamako pour prendre part le lundi à la signature d’un document relatif à la mise en place des autorités intérimaires. Le 20 juin commémore aussi le premier anniversaire de la signature de l’accord par la CMA.
Au moment où le renouvellement du mandat de la Minusma fait débat, l’International Crisis Group, une organisation qui s’intéresse aux conflits en Afrique de l’Ouest, a dans son dernier rapport fait ressorti les raisons qui favorisent la crise sécuritaire au centre du pays.
Jean-Hervé Jezequel, auteur du rapport, pointe du doigt « l’incapacité de l’état à créer un cadre de dialogue entre les différentes communautés ». Il est au micro de nos confrères de RFI :
« Le centre du pays est une zone agropastorale extrêmement riche, 40 % du riz malien sont produits là-bas. C’est la première zone d’élevage. Cette richesse a attiré de nombreuses communautés. Il y a effectivement la montée de tension entre agriculteurs et éleveurs, entre sédentaires et nomades. L’État, encore une fois se relève incapable de proposer des solutions de pacification par la discussion de ces vieux antagonistes. Je pense qu’il y a deux raisons principales qui expliquent un peu la faible capacité de l’État à démontrer toute son utilité au centre du pays. La première, c’est un vieux discrédit qui frappe l’État depuis plusieurs années avec le développement de la mauvaise gouvernance et de la corruption, l’État s’est décrédibilisé. Les formes de justice, les formes de sécurité sont parfois vendues aux plus offrants dans les conflits locaux. Ça c’est un problème extrêmement préoccupant. Le deuxième élément, c’est l’absence de l’État. Ça c’est liée à la montée de la forte insécurité. Et peut-être aussi la stratégie de certains groupes qui visent explicitement à chasser l’État notamment des zones rurales et à le remplacer ».