L’école malienne est malade ; malade de ses leaders aux dents longues, regroupés au sein de l’Association des élèves et étudiants du Mali (Aeem), avec la complicité de certains véreux politiciens. L’Aeem, soupire-t-on, est l’une des plus grandes plaies de l’histoire du Mali. En témoignent les récents événements qui se sont déroulés dans nos Universités et Grandes écoles. C’est l’incompétence des ministres en charge de l’éducation dans notre pays qui est soulevée. En vérité, c’est l’Aeem qui est à l’origine de sa propre décadence.
Comme à l’accoutumée, la vie dans nos Universités et Grandes écoles aura été tristement marquée par des grèves, marches, sit-in, affrontements sanglants, surtout quand il s’est agi de renouvellements des instances dans les différentes sections de l’Aeem. Au lieu de s’adonner aux études, rien qu’aux études, les «étudiants-candidats au chômage» ne trouvent mieux que de semer la pagaille et la zizanie dans nos espaces scolaires et universitaires. Dans la foulée, cette organisation faîtière des élèves et étudiants du Mali se résume bien en cette belle formule : «Prenez la violence, ajoutez-y l’arrogance et la paresse intellectuelle, mixez le tout et vous aurez une substance appelée Aeem (Association des élèves et étudiants du Mali)». Bien dit !
À tout le moins, ce syndicat estudiantin, qui fut dans les années 90 l’un des plus puissants d’Afrique, est aujourd’hui la pire des choses qui soit arrivée à l’école malienne. Ne respectant ni son propre statut, ni le règlement intérieur de l’école malienne, l’Aeem est une arme de destruction massive des carrières de millions de jeunes maliens. La démocratie y est proscrite lors des assemblées générales. En effet, à l’Aeem, le but ultime de toute réunion est l’annonce de journées d’absence (débrayages). Les plus plébiscités sont les responsables estudiantins qui proposent le maximum de jours de fermeture de classes. Ce mode opératoire a offert à de nombreux lycéens et étudiants membres du syndicat leur quart d’heure de gloire qui fut le seul de leur vie. Ceux qui osent apporter un son de cloche, autre que les sorties intempestives, sont érigés en traîtres notoires. Certains ont été lynchés dans leur établissement pour avoir osé l’opposition. L’Aeem, peut-on alors en déduire, est la dictature de la pensée unique des plus cancres de l’école malienne.
En fait, au lieu de se pencher sur les vrais problèmes qui minent l’Aeem, ses leaders s’offrent toujours en spectacle, préférant chercher des boucs émissaires là où il n’y en a pas, allant même jusqu’à demander les démissions des deux ministres actuellement en charge de l’éducation dans notre pays : Barthélémy Togo de l’enseignement de base et Me Mountaga Tall de l’enseignement supérieur. Les voilà encore, ces étudiants, en grève illimitée… C’est une véritable fuite en avant de ceux dont on dit qu’ils sont «les futurs bâtisseurs du Mali de demain», alors qu’ils n’ont pas de têtes bien faites. Et pour cacher cette tare, au lieu de s’adonner à leurs cahiers et stylos, ils préfèrent opter pour la voie de la violence à travers coupe-coupe, machette et parfois, armes à feu.
On se souvient encore que depuis le mois d’avril dernier, la ville de Bamako, notamment les abords de nombreuses écoles, s’était transformée en champ de bataille entre étudiants de différents clans. Dans le quartier de Médina-Coura, le vendredi 22 avril 2016 aux environs de 10h, la population a été témoin de tirs de fusil qui ont endommagé deux voitures stationnées devant le domicile de leur propriétaire, à un pas de l’ECICA. Une bande d’étudiants désœuvrés circulaient en pleine journée avec armes à feu et machettes, au vu et au su de tout le monde. Grâce à cette méthode barbare qui ne dit pas son nom, le jeune Mamadou Draméra, élève de la 11ème Année au Lycée Sacré Cœur de Baco-Djicoroni, a perdu la vie en se faisant renverser par une voiture, car fuyant les violences à l’école. Triste réalité !
«Je me demande réellement à quoi sert l’Aeem ? Il faut juste se rendre dans les Universités du Mali pour comprendre le tort de l’Aeem (sorties injustifiables, viols sur les filles parfois en pleine journée…). Il m’est difficile de définir le critère de sélection des leaders de cette association. L’Etat doit définir des critères pour la désignation des leaders de l’Aeem, afin que l’école malienne puisse retrouver sa notoriété d’antan. C’est la faute à l’Etat car on connaît des enseignants du supérieur, anciens membres de l’Aeem qui, quand ils s’expriment en français, on ne les comprend pas. Je suis désolé, mais c’est une triste réalité ; c’est même une honte nationale», lance un observateur averti de la scène éducative malienne.
Au second d’enfoncer le clou : «L’Aeem, c’est de la merde ! Jamais, dans l’histoire du Mali, une petite minorité n’aura anéanti toute une génération…et cela continue depuis Oumar Mariko…Tous ces leaders de l’Aeem semeurs de troubles doivent être arrêtés et sanctionnés conformément aux lois et règlements en vigueur en République du Mali».
Puis, au troisième d’enchaîner : «Tant que la haute sphère de l’administration malienne reste remplie de ces anciens membres de l’Aeem, le Mali ne s’en sortira jamais. Car ils n’ont que violence, arrogance et surtout paresse intellectuelle comme atouts. C’est très dommage et honteux. Comment en sortir ? Telle est la grande question. Que Dieu veille sur le Mali. Amen !» Et à ce dernier de conclure sur un ton sec ! «Le président IBK n’a qu’à dissoudre l’Aeem. Cette organisation est une menace pour l’Etat…».
Responsabilité partagée ?
Loin de nous l’idée de jeter l’anathème sur les étudiants et de leur faire porter seuls la descente aux enfers de notre système éducatif, il y a lieu de reconnaître que les autorités en charge de l’éducation dans notre pays ont toutes et toujours failli. Chaque année, c’est au même scénario qu’on assiste. Alors que l’on croyait à la refondation de l’école malienne après le dernier Forum sur l’éducation nationale, nous voici assister impuissamment à son enlisement total.
Autant dire que si les étudiants appellent à cor et à cri à la démission des ministres Togo et Tall, ils n’ont pas totalement tort. En effet, pendant que la case Aeem brûle, nos deux ministres en charge de l’éducation (de base et du supérieur), chuchote-t-on, s’en moquent éperdument. Dans leurs bureaux feutrés, ils se la coulent douce, au lieu d’inviter les protagonistes de la crise autour d’une table de négociations. Peut-être que cela les arrange, puisque dans notre pays, murmure-t-on, ce sont des situations troubles ou louches qui font des millionnaires, voire des multimillionnaires. En tous cas, ces deux ministres semblent être dépassés par les événements.
Bruno E. LOMA