Devant la fermeté du gouvernement qui menace d’arrêter la subvention et d’autoriser l’importation de la viande, les professionnels du secteur ont choisi de louvoyer. Résultat : c’est le yoyo des prix Au sortir d’une réunion tenue samedi dernier à la direction nationale du commerce et de la concurrence (DNCC) sous la présidence du patron de la structure, Modibo Keïta, les bouchers étaient entre le marteau de l’Association des consommateurs du Mali (Ascoma) et l’enclume du département du Commerce et de l’Industrie. Soulignant la « faiblesse de l’Etat à réguler ce secteur », le 1er vice-président de l’Ascoma, Abdoul Wahab Diakité, exhortait les consommateurs à boycotter la viande de bœuf pour obliger les acteurs de la filière viande à réduire le coût du kg de viande à la consommation.
Modibo Keïta, lui, exigeait la vente à 2000 Fcfa le kg de la viande avec os et 2300 Fcfa le kilo de la viande sans os, à partir de dimanche. « Les contrevenants à cette mesure s’exposent à des sanctions telle la restitution immédiate des prêts accordés aux coopératives de bouchers pour leur permettre d’acheter en espèce les bête », menaçait-il. Les bouchers s’étaient engagés, sur fond de division, à respecter leurs engagements vis-à-vis du département du Commerce et de l’Industrie et du ministre Abdel Karim Konaté. « Nous allons vendre dès demain le kg de la viande avec os à 2000 Fcfa, 2300 Fcfa le kg la viande sans os », déclarait Amsoulaye Diallo, secrétaire général du syndicat des bouchers.
Ces différentes menaces et les mesures d’accompagnement paraissent faire leurs effets sur les bouchers. Ainsi, sur le terrain, le mot d’ordre du secrétaire général du syndicat des bouchers est relativement suivi. De légères fluctuations, aux allures de sabotage, sont constatées sur différents marchés que notre équipe de reportage à sillonné dimanche et lundi.
La tournée a commencé par le marché de Niamakoro. Là, tous les bouchers rencontrés cèdent le kg de la viande avec os à 2000 Fcfa. Une légère variation pénalise le kilo de la viande sans os qui atteint 2400 Fcfa. Explication du vendeur ? « J’ai acheté à 1900 Fcfa le kg la viande. Je suis en train de revendre à 2000 Fcfa le kilo de la viande avec os et 2400 Fcfa le kg de la viande sans os ». Une hausse injustifiée car le détaillant revendeur s’en sort vaille que vaille.
La grande satisfaction des consommateurs vient des marchés de Sabalibougou et de Torokorobougou, seconde étape de notre tournée. Les bouchers de ces marchés respectent à la lettre la convention signée avec le chef du département du commerce. Tel le jeune Moriba Diallo qui affiche sa fierté de vendre le kg de viande avec os à 2000 Fcfa, et 2300 Fcfa pour la viande sans os. Son allégresse s’explique par le fait que le boucher détaillant profite davantage lorsque baisse le prix du kilo de la viande à la consommation, explique-t-il, en remettant un sachet en plastique à Mme Coulibaly Rokia Traoré, institutrice au premier cycle de Sabalibougou, qui vient d’acheter de la viande.
Timide, la mise bien soignée, l’enseignante se dit un peu satisfaite de la baisse de 200 Fcfa des prix du kilogramme de viande à la consommation. Selon elle, cette réduction allègera un peu les dépenses des chefs de ménages. « Et, les ménagères pourraient par exemple bien assaisonner les sauces », ajoute-elle, en souriant. L’enseignante invite par ailleurs le gouvernement à fournir plus d’efforts pour réduire davantage le prix de la viande.
Les bouchers de deux marchés cités plus haut sont le contraire de leurs collègues de Badalabougou et de Fassambougou qui se trouveraient être les plus chers des six communes de la capitale. Ils seraient, selon des consommateurs, les premiers à augmenter le prix du kg de viande et les derniers, quand il s’est agit de réduire le tarif du kg de viande. Ces accusations semblent coller à la réalité du terrain.
La viande avec os y est cédée à 2000 Fcfa. Quant à la viande sans os, son prix dépend de la capacité de discussion de l’acheteur qui peut payer le kg entre 2300 et 2500 F caf (prix sur lequel insiste la majorité). Ces bouchers détaillants, comme ceux des autres marchés, ont payé http://bamada.netle kg de la viande à 1900 Fcfa avec les chevillards (les grossistes), soutient N’Faly Dansoko, boucher au marché de Fassambougou, qui vend lui aussi le kg de la viande sans os à 2500 Fcfa.
Chevillard au marché Dibida, Monzon Coulibaly, confirme qu’il rétrocède aux bouchers détaillants la viande de bœuf au prix de 1900 Fcfa/kg. D’un ton hésitant, le regard fuyant, le délégué de la commune III auprès du syndicat des bouchers explique que les chevillards ont convenu avec le département du Commerce et de l’Industrie de vendre à 1900 Fcfa/kg la viande aux bouchers détaillants. En contrepartie, le gouvernement se serait engagé à payer en guise de subvention 100 Fcfa/kg aux chevillards. Une commission est en place, afin d’enregistrer les poids de la viande pour chaque chevillard.
Syndicaliste en commune IV, Modibo Guindo, contacté au téléphone, se présente comme membre d’une de ces commissions d’enregistrement. Le boucher ajoute avoir passé la nuit à l’abattoir frigorifique du quartier « Sans fil ». Où il renseignait les factures destinées aux chevillards dans le cadre de «l’Opération spécial Ramadan (comme c’est écrit sur la facture)».
Cette opération consiste à peser la viande à l’abattoir pour quantifier en terme de kilogramme le poids de la viande vendue par chaque chevillard. Modibo Guindo précise que le gouvernement accordera une subvention de 100 Fcfa/kg aux chevillards jusqu’à la fin du Ramadan. Contacté par téléphone, les départements de l’Economie et des Finances, et du Commerce et de l’Industrie n’ont pas réagi à propos de ladite subvention qu’ils auraient accordés aux chevillards.
A la réunion de samedi, le département du Commerce et de l’Industrie s’est engagé à renoncer à la taxe d’abattage qui coûte 5000 Fcfa par bœuf abattu au niveau des abattoirs publics, avait déclaré Modibo Keïta. Ce dernier annonçait que l’exécutif prendra à son compte pour le reste du mois de carême la même taxe au niveau des abattoirs privés comme l’abattoir frigorifique du quartier « Sans fil ».
C. M. TRAORE
Source: Essor