Madame Beaujault née Anna Ouattara, commerçante de son état, vit, depuis environ cinq ans, un feuilleton tragique dont elle aurait bien voulu se passer. Depuis 2011, elle se dit régulièrement victime des manœuvres de la part d’un officier supérieur de l’armée malienne répondant au nom de Général Hamidou Sissoko communément appelé Man. Vendredi 24 juin 2016, elle a animé une conférence de presse à Sotuba, au cours de laquelle elle a affirmé que son seul péché est d’avoir construit sur sa parcelle, acquise légalement avec son mari depuis 2008.
Le litige foncier est devenu le quotidien des Maliens. Mais, nombre de ces litiges relèvent en réalité d’un véritable rapport de force entre des citoyens nantis, convoitant des terrains appartenant à des pauvres. Madame Beaujault née Anna Ouattara pense qu’elle est dans ce lot de victimes, mais elle ne compte surtout pas baisser les bras. De son point de vue, le Général Hamidou Sissoko réclame, sans pouvoir en justifier la propriété, sa parcelle sur laquelle elle a construit sa maison. En clair, elle accuse le Général Man d’utiliser des méthodes peux orthodoxes.
A en croire Madame Beaujault, elle et son mari ont acheté deux lots contigus à Sotuba, en Commune I du district de Bamako, depuis 2008. C’est en 2011 que le Général Hamidou Sissoko se serait déclaré propriétaire des ces parcelles, sans aucun titre de propriété et aurait envoyé des machines pour casser la clôture de son chantier sans aucune décision de justice. Selon la conférencière, l’officier a construit sur une partie de l’un des lots. Ainsi, en 2015, Anna Ouattara a saisi la justice et gagné le procès contre le Général pour avoir démolit une partie de sa maison sans aucune décision de justice. Selon elle, Man a été sommé de lui verser 15 millions de F CFA à titre de dommages et intérêts. Le hic, selon elle, est qu’à ce jour, le Général Sissoko a vendu le chantier à des «Djogaramé» qui ne savaient aucunement qu’il y avait un contentieux non vidé concernant ladite parcelle.
Le voleur qui crie au vol ?
Pour Madame Beaujault née Anna Ouattara, le Général s’est non seulement emparé de ses terres, mais aussi il n’a pas manqué de l’assigner en justice pour expulsion et démolition sur la base d’un faux titre foncier. Selon elle, c’est avec ce document ‘’illégal’’ que le Tribunal de grande instance de la commune I du district de Bamako, suite à son audience du 20 juin 2016, a ordonné l’expulsion de Madame Anna Ouattara et des occupants de son chef de la parcelle N°17/9 du lotissement de Sotuba objet du TF N°7543 de Bako appartenant au requérant. Le tribunal a ordonné en outre la démolition des réalisations faites sur ladite parcelle par Madame Anna Ouattara aux frais de celle-ci sous astreinte de 25.000 F CFA par jour de retard. Voilà une décision de justice qui a totalement dépassé Anna Ouattara. «Je regrette tout simplement que le jugement n’ait pas été approfondi. Une décision de justice qui laisse à désirer. D’abord, il faut savoir que le terrain est au nom de mon mari. Et pourtant, c’est moi qui ai reçu l’assignation en justice. Je ne suis pas en fronde contre les magistrats, mais je m’insurge contre le système. Comment est-ce qu’un tribunal peut juger une telle affaire avec légèreté ?», déplore Anna Ouattara.
Elle prétend, avant d’aller au tribunal, elle avoir fait des réquisitions pour la vérification de l’authenticité des parcelles et à la mairie et à l’Institut géographique du Mali (IGM). Il ressort que deux terrains sont en son nom et deux autres au nom de son mari. La bonne dame se pose la question de savoir comment peut-on faire un titre sur un plan qui n’est pas annulé. Cela signifie, selon elle, que le titre du Général Sissoko est tout simplement faux. Et d’ailleurs, elle dit être dans la dynamique d’attaquer la procédure d’acquisition de son titre devant le tribunal compétant pour faux.
Des zones d’ombre
Il ressort de nos investigations que beaucoup de zones d’ombre entachent cette affaire qui n’a pas dévoilé tous ses mystères. Dans un premier temps, il convient de souligner que la parcelle litigieuse est au nom de Rolland Pascal Beaujault, le mari de Anna Ouattara. Pourquoi assigner donc Anna Ouattara en justice alors que son mari n’est pas décédé. Pire, elle comparait devant le tribunal sans procuration. Autres remarques pertinentes faisant planer le doute, c’est la non-conformité entre le numéro du titre foncier du Général Man (N°7572) et celui figurant sur la décision du tribunal de la commune I. On est en droit de se demander d’abord pourquoi le numéro mentionné sur la requête de l’officier ne correspond pas à celui rendu par le tribunal ? Est-ce une erreur ou une bavure judiciaire ? Qu’est-ce qui a poussé le Général Man à vendre sa maison, sachant que la procédure n’est pas terminée et que le dossier peut évoluer. Donc, tant pis pour le nouvel acquéreur.
En tout cas, ces questions poussent à croire que cette histoire est entachée de plusieurs zones d’ombre que le juge clarifiera certainement dans les jours à venir.
Affaire à suivre…
Ibrahim M.GUEYE