Dioncounda président, eu égard à ce qu’il nous a montré pendant quarante jours, ce n’est ni plus ni moins qu’une existence fantomatique à la présidence de la République du Mali. Aucun pouvoir réel !
Ça y est ! Dioncounda Traoré est confirmé président de la république du Mali pour une transition de 12 mois suite à un accord entre la junte et la Cedeao. En revanche, le nouveau président est loin de faire l’unanimité ; loin s’en faut, sa reconduction a suscité une vive contestation de milliers de personnes se réclamant de la Copam, du Mp 22 et autres mouvements de jeunes. Dioncounda apparemment aux anges depuis le forcing de l’organisation sous régionale affiche une mine de satisfaction. Mais durant ses quarante jours d’intérim, l’homme n’a posé aucun acte. Il était inaudible et presque invisible. Même ses partisans dénoncent sa mollesse et son manque de poigne.
Quarante jours durant, l’élu de Nara et non moins président de l’Adema-Pasj, n’a pu véritablement montrer aucune preuve pouvant redonner confiance aux Maliens. Nous avions annoncé, dans une de nos parutions, son intention de démissionner quand le capitaine Sanogo avait rejeté la décision de la Cedeao selon laquelle Dioncounda dirigera la transition à la fin de l’intérim. Il a fallu moult interventions pour qu’il revienne sur sa décision. S’il avait annoncé qu’il ne serait pas un problème pour le Mali, c’est parce qu’il savait qu’il ne fait pas l’unanimité et que la junte pouvait en découdre avec lui à tout moment.
Pendant quarante jours, le pouvoir était détenu par les membres du Cnrdre et Dioncounda n’avait rien fait pour avoir une portion. Comment renverser aujourd’hui la vapeur ? C’est la question qui taraude ses supporters qui veulent qu’il soit un vrai président, un président normal avec des prérogatives lui permettant de gouverner pendant les 12 mois de la transition. Au moins.
Avec les concessions du capitaine Amadou Haya Sanogo pour sortir le Mali de l’ornière, le désormais président de la République, Dioncounda Traoré, est appelé à s’assumer, à changer son image d’homme mou et incapable de gouverner. Même si le Cnrdre est encore dans le système et détient toujours une partie du pouvoir avec les Ministères de souveraineté comme la Défense, la Sécurité intérieur, l’Administration territoriale ou encore la Justice. Tout passe et passera par ces départements.
Le Cnrdre est aujourd’hui en quelque sorte l’instance suprême de fait de l’armée et détient la réalité des choses. C’est cette instance qui défini la politique de défense du pouvoir. Mieux la garde présidentielle obéit au capitaine Amadou Haya Sanogo plus qu’au président de la République qu’est Dioncounda Traoré. Du coup ce dernier ne se sent pas en sécurité et fait des pieds et des mains pour avoir le soutien de la Cedeao. Soutien par lequel il est désigné président de la République de la transition pour une période de 12 mois. Au fait, la décision jugée unilatérale de la Cedeao prise à Abidjan, avait suscité une levée de bouclier à Kati parce que la junte s’était sentie enterrer alors qu’elle détenait la réalité du pouvoir politique. Le compromis trouvé samedi et dimanche dernier est symptomatique, de prime à bord, de la volonté des militaires à trouver très vite une issue favorable à la crise mais tout en réglant un certain nombre de préalable comme l’avenir des membres du Cnrdre. Un début de solution est trouvé avec l’amnistie ou encore le statut d’ancien président de la République avec tous les avantages au Capitaine Sanogo.
Durant le dernier mandat de l’ancien président, Amadou Toumani Touré, Dioncounda était le deuxième homme fort consacré par la constitution puisqu’il était le président de l’Assemblée nationale. Tous les projets de loi initiés par les différents gouvernements de ATT, même les plus controversés, passaient comme lettre à la poste. Dioncounda n’avait jamais dit non à ATT même quand il le fallait. Il avait eu l’occasion avec le controversé projet de code des personnes et de la famille. C’est le contraire qui se produisit, après le vote, la contestation populaire était très vive et le président avait perdu des alliés dans la société civile et ne l’a pas promulgué. Le code retourne à l’Assemblée pour une seconde lecture avant d’être adoptée.
Ce qui fait dire à beaucoup de militaires que Dioncounda est égal à ATT, le président qu’ils ont balayé. Celui là même qui est accusé d’avoir vendu une partie du Mali aux Touareg et autres narcotrafiquants. Inadmissible donc de le voir, au terme de son intérim, à la tête du Mali même s’il n’avait pas de prérogatives.
Connu pour ses déclarations à l’emporte-pièce ; en 2007 quand l’ex président, Amadou Toumani Touré, avait sollicité l’Adema pour briguer un second mandat, Dioncounda avait eu du mal à convaincre ses ouailles. Il s’était persuadé de dire la triste vérité aux militants lors d’un meeting tenu le 14 janvier de la même année: « si nous décidons de soutenir ATT, cela ne signifie pas que le parti ne dispose pas de présidentiables. Nous avons des hommes qui, à la tête de ce pays, peuvent faire mieux que lui (…) Nous avons décidé de façon démocratique de ne pas jeter nos sous par la fenêtre à propos d’une élection présidentielle que nous allons d’office perdre… » Et de poursuivre : « Si nous n’avons pas soutenu ATT, nous aurions eu l’administration, la justice, la sécurité d’Etat sur nos dos… ». Une déclaration qui sonne comme un aveu de culpabilité de l’ex régime de l’Adema dont il était un des barons. Au Pasj, on reproche une chose à Dioncounda, son manque de charisme, qui en dépit du travail des communicateurs commis à cet effet est resté comme tel. Aujourd’hui, sa tête est mise à prix par des agitateurs professionnels qui n’excluent pas d’en découdre avec lui.
Dioncounda président, eu égard à ce qu’il nous a montré pendant quarante jours, ce n’est ni plus ni moins qu’une existence fantomatique à la présidence de la République du Mali.