Le limogeage du gouverneur de la région de Gao, Seydou Traoré, tel que revendiqué par les manifestants; la libération d’une trentaine de manifestants détenus en relation avec les violences du mardi dernier; l’envoi d’une mission de haut niveau dans la Cité des Askia et la promesse de l’ouverture diligente d’une enquête indépendante, sont entre autres mesures prises par le gouvernement, en vue de calmer les cœurs et les esprits, aux premières heures des manifestations qui ont endeuillé Gao.
Mais, ces mesures suffiront-elles pour restaurer la confiance entre gouvernement et les jeunes frondeurs ? Le calendrier de la mise en place des autorités intérimaires, qui doit démarrer ce 15 juillet, sera-t-il toujours suspendu ou respecté ?
Depuis le début des échauffourées entre populations et autorités locales à Gao, la réaction des autorités a été prompte. En effet, dès le lendemain de la tragédie, une importante délégation ministérielle s’est rendue à Gao pour manifester la solidarité gouvernementale et s’enquérir, dans un premier temps, des premiers éléments de réponse dans cette dramatique affaire.
La mise en place diligente d’une Commission indépendante d’enquête pour faire toute la lumière est une excellente décision, puisque toute lenteur risquerait de semer le doute dans les esprits des populations de la Cité des Askia.
Dans un premier communiqué, rendu public le mardi, le gouvernement a appelé au calme avant de donner des gages de bonne volonté pour une résolution rapide de cette crise.
«Le Gouvernement exhorte les populations de Gao au calme et rappelle que le dialogue et la concertation doivent guider toutes les parties.
Le Gouvernement a décidé qu’une mission de haut niveau se rendrait sans délai à Gao pour rencontrer les différentes composantes de la société et de la population afin de trouver, dans le calme et la sérénité, des réponses appropriées aux préoccupations des différentes parties.
Le Gouvernement s’engage enfin à diligenter une enquête indépendante et impartiale pour faire toute la lumière sur ces regrettables événements », peut-on lire dans le communiqué.
Comme ainsi indiqué, dès le lendemain mercredi, la délégation annoncée conduite par le ministre de l’Administration territoriale, Abdoulaye Idrissa Maiga, et comprenant ces homologues de la Sécurité intérieur, le général de brigade Salif Traoré et le nouveau ministre de la Justice, Me Mamadou Ismaël Konaté, a fait le déplacement sur la Cité des Askia. À son programme des rencontres avec les autorités administratives de la région, les notabilités, les organisations de la société civile.
Arrivée mercredi dans la matinée à Gao par avion, la délégation a aussitôt entamé une séance de travail avec les autorités régionales, nous confient des sources locales.
Très rapidement, dans l’après-midi, la délégation gouvernementale a rencontré la société civile, les jeunes et les femmes.
Cette mission de haut niveau démontre la volonté du Gouvernement et des plus hautes autorités à faire face à la situation.
Selon le correspondant régional de l’ORTM, la tension a baissé dans la ville, depuis mercredi, avec la libération de 28 jeunes arrêtés mardi.
Au terme de l’entente signée par les parties prenantes de l’Accord pour la paix et la réconciliation, en juin dernier, la mise en place des Autorités intérimaires devrait, en principe, commencer ce 15 juillet, c’est-à-dire demain vendredi, pour prendre fin le 15 août prochain.
Pour certains, la tuerie de Gao est le résultat d’un grand malaise et d’un grand dépit des populations face à ce qu’elles considèrent comme une démission des autorités de la République dans la gestion de la région.
Ce malaise et ce dépit, soutiennent-ils, avaient pourtant été exprimés, il y a plus d’un an, quand le maire de la ville de Gao, président du PDES, avait publiquement déclaré qu’il ne quitterait pas sa place au profit des autorités transitoires.
Il ne s’agissait pas visiblement d’une fronde de l’opposition, mais bien le ras-le-bol d’une population encore choquée par l’occupation djihadiste, rebelle et terroriste.
Les populations ont, à tort ou à raison, le sentiment que le Gouvernement les sacrifie pour plaire aux rebelles. D’autant plus que ces derniers se voient servis sur un plateau d’argent tout ce qu’ils n’ont pu avoir par la force.
Les mettre à la tête des autorités intérimaires dans la région de Gao et Tombouctou, dans une certaine mesure, est ressenti par les populations comme une humiliation et un diktat.
Maintenant, il appartient désormais au Gouvernement de convaincre les Gaois de sa bonne foi.
En tout cas, avec la libération des jeunes, arrêtés, à la suite de discussions entre la société civile et les autorités ainsi que le limogeage du gouverneur, mercredi soir, le gouvernement entend prouver sa bonne foi quant à une issue heureuse à un problème qui semble être les conséquences d’un déficit de communication.
Pour rappel, les jeunes demandaient, mercredi, le départ du gouverneur et du chef de la police, qui, selon eux, auraient donné l’ordre de tirer sur la foule.
Par ailleurs, au regard de la promptitude de ce mouvement de colère des jeunes de Gao, certaines interrogations viennent à l’esprit dont une réponse appropriée peut permettre d’avancer rapidement dans la gestion de cette crise.
Pourquoi cette protestation maintenant alors que la loi a été votée à l’Assemblée nationale, depuis plusieurs semaines ?
Pourquoi attendre la veille de l’application de l’accord pour manifester ?
Par Sidi Dao