L’agression physique perpétrée le lundi 21 mai contre le président de la transition, au vu et su de ses gardes de corps, révèle le caractère voyou de notre Etat et face auquel le Premier ministre dit de « pleins pouvoirs » doit prendre ses responsabilités. Le spectacle était révoltant, et le Nord ne peut attendre !
« Le Mali ne mérite pas cela… », disait le chef du gouvernement le lundi soir 21 mai en langue bamanan à la télévision nationale quelques heures après les violentes manifestations qui ont ébranlé tout notre pays. Cette indignation de Cheick Modibo Diarra, qui a appelé à la cessation de toute manifestation, témoigne sans doute de la situation grave que vit notre pays.
Dans une marche organisée par des groupes, instrumentalisés par des hommes politiques, des badauds s’en sont pris au président de la République par intérim jusque dans son bureau à Koulouba. L’impensable s’est produit, et le Mali a désormais sombré dans l’impunité et l’anarchie.
Un Premier ministre sans pouvoir !
Comment des manifestants peuvent-ils faire irruption dans le bureau de Dioncounda Traoré jusqu’à l’agresser ? De toute évidence, il y a une complicité des services de sécurité de la présidence de la République. Et leur attitude donne raison à la Cédéao qui prévoyait d’envoyer des forces pour « sécuriser les institutions de la transition ». Sans doute, c’est ce que le Premier minier devait dénoncer dans son intervention télévisée.
L’accord-cadre, sur la base duquel il est nommé, lui donne les « pleins pouvoirs » dans la gestion de la transition. Malheureusement, il faut le dire, Cheick Modibo Diarra peine à retrouver ses pouvoirs. Au contraire, de nombreux observateurs dénoncent aujourd’hui une complicité avec le chef de l’ex-junte, le capitaine Amadou Haha Sanogo. Le Premier ministre tient aujourd’hui l’exécutif, dont le ministère de la Sécurité.
Et il est inadmissible que ce lundi la plupart des principales rues de Bamako étaient bloquées par des manifestants. Le spectacle le plus révoltant est cette scène de comédie qui nous a été offerte au « rond-point de l’Indépendance », où les militants du mouvement « Appel du Mali » ont bloqué le passage sur 200 m de part en part. A côté, les policiers jouaient les spectateurs. Les travailleurs, qui se rendaient à leurs services, étaient obligés de rebrousser chemin.
Aujourd’hui, il faut le dire, le Mali n’a pas besoin d’un tel spectacle, encore moins d’un affrontement entre pros et anti putsch. Un accord, malgré ses insuffisances, semble ouvrir la voie à une sortie de l’impasse. Aux Maliens de jouer maintenant, afin de ne pas donner l’impression à une certaine communauté internationale qu’ils sont incapables prendre leur destin en main. Ce qui fut malheureusement le cas à Ouagadougou en avril dernier lorsqu’il s’est agi de choisir un Premier ministre consensuel.
Ce lundi 21 mai, Bamako ressemblait à la capitale d’un pays sans foi ni loi. Il faut le dire net, l’indifférence des forces armées et de sécurité face aux dérives des manifestants confirme une complicité avec la junte. Oui aux manifestations. Mais ce qui s’est passé lundi était une dérive due au manque fermeté du gouvernement Cheick Modibo Diarra. Le capitaine Sanogo, qui est habitué au show devant les caméras de l’ORTM, avait également la responsabilité d’appeler ses partisans au calme après la signature dimanche de l’accord avec la Cédéao.
Lequel est déjà considéré par de nombreux Maliens comme « une légitimation du coup d’Etat », avec les avantages colossaux dont il bénéficie avec son statut d’ancien chef d’Etat et l’amnistie totale accordée avec les autres auteurs des événements du 21 et 22 mai derniers. La prime à l’impunité est déjà suffisante. Et ça suffit maintenant !