De l’époque où l’on se tirait dessus à bout portant, à la venue des représentants des groupes armés au sein de la Commission Vérité Justice et Réconciliation, et aujourd’hui dans le gouvernement ; le chemin a été long, et les sacrifices importants, pour arriver à ce qu’on peut aujourd’hui considérer peu ou prou comme une situation d’apaisement, entre l’Etat et les ex rebelles.
Le 20 juin dernier, l’accord pour la paix et la réconciliation a eu un an, après de longs et laborieux pourparlers abrités par le voisin algérien, chef de file de la médiation. Un an après la signature du document et en trois ans de gestion du pouvoir, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, engrange de plus en plus de points dans le règlement de la crise sécuritaire ; une crise qui a conduit notre pays au bord de l’abîme, en 2012. Parfois décriées, souvent incompris, on a tenté toute sorte de pressions pour impressionner IBK. Mais, aujourd’hui le constat est là : de nombreuses mesures et ou initiatives que le chef de l’Etat a eu à prendre, sont, aujourd’hui, entrain petit ç petit de décanter la situation. Il suffit de retourner loin en arrière et se rappeler de toute la polémique créée par la libération, courant 2013, de certains prisonniers arrêtés dans les rangs des mouvements armés. Parmi ces prisonniers dont le président IBK a autorisé l’élargissement, au nom de l’apaisement, figurait le terroriste Mohamed Ali Ag Wadoussène. Sa libération a été en son temps beaucoup dénoncée au sein de l’opinion nationale ; mais le chef de l’Etat a assumé.
Cette mesure du président IBK, au-delà de toutes les interprétations qu’elle avait suscitées, fut l’un des tous premiers actes posés par le chef de l’Etat, un homme visionnaire qui savait déjà qu’il n’y a aucune chance d’aller à la paix si les uns et les autres devaient restés sur des positions extrémistes. Des concessions devaient se faire de part et d’autre. Souvenons-nous que quelques jours plus tard (après la libération de Wadoussène), Yoro, un arabe loyaliste a été arrêté au nord par les forces françaises qui l’accusaient de combattre aux cotés des groupes terroristes. Il a été mis à la disposition de Bamako pour son incarcération. Sa remise en liberté par l’Etat qui n’ignore pas sa loyauté, s’est opérée sans difficultés.
En 2014, après plus d’une année d’occupation de Ménaka par le Mouvement national de libération de l’Azawad, le Gatia (un groupe d’autodéfense proche de Bamako) lançait l’assaut contre la localité et y déloge le MNLA. La situation crispa les positions. Le MNLA, alors appuyé dans ses prises de positions par la Minusma, avait exigé le retrait sans condition du Gatia de la ville. A Bamako, malgré le rejet de cette demande du MNLA et de la Minusma, le chef de l’Etat intervient et instruit au Gatia de retirer ses troupes de Ménaka, au moment où l’armée présente dans la localité avait été «cantonné » à 2 km de là. Ce fut la même situation quand la Plateforme (dont fait parti le Gatia) avait réussi à prendre Kidal resté depuis 2012 sous le seul contrôle des groupes armés (Mnla, Hcua, Maa, Ansar Dine). A toutes ces occasions, le chef de l’Etat, incompris, a pris ses responsabilités, pour faire des concessions exigées par le contexte d’une crise particulièrement profonde. Mais derrière ces différentes concessions (faites plus par stratégies que par faiblesses) il y avait certains va-t-en-guerre qui, eux, n’y voyaient que «reculade» et l’expression d’une capitulation des plus hautes autorités que la gravité de la situation a mise dans une posture très difficile Or, en capitaine de bord bien avisé, l’homme d’Etat qu’est IBK était déjà sur une bonne longueur d’avance sur ceux qui le jugeaient sans avoir tous les éléments d’appréciation. La paix, dit-on n’a pas de prix et aucun sacrifice n’est de trop pour l’obtenir. Une chose que beaucoup ignorent, ces différents actes n’étaient inutiles, ils ont permis au président Keïta, de se forger aux yeux des mouvements armés et de la communauté internationale, l’image d’un homme de paix, de dialogue, de compromis donc fréquentable. Ce qui fut également important dans le rapprochement entre les deux parties. Malgré une opposition qui n’arrêtait pas de tirer sur lui à boulet rouge, le chef de l’Etat, avec la parfaite conscience de là où il veut mener le bateau Mali, a continué, imperturbablement à semer les graines de la paix ; mais, on était au moment le plus rouge de la crise, ce qui empêchait à beaucoup de personne de voir la portée des actes du président que les Maliens ont élu à plus de 77% pour gérer la crise et sauver l’intégrité territoriale, notre unité nationale ainsi que la laïcité de notre Etat. Aujourd’hui, toutes ces demandes sont des acquis. Ce qui n’était pas gagné d’avance dans un contexte où on a été jusqu’à vouloir, à défaut de l’indépendance d’une partie du territoire, obligé le Mali à s’engager dans la voie de la fédération, ou du fédéralisme. Aujourd’hui, toutes ces difficultés sont derrière nous. Dans cette même logique, intervient le 31 mars dernier, la loi sur l’installation des autorités intérimaires prévues par l’Accord pour la paix. La mesure mit encore le président Keïta sous le feu roulant d’une opposition constamment à la recherche de la petite bête. Conférences, marches, émissions radio diffusées, tracts, plainte en justice…furent les méthodes employées pour dénoncer une loi que l’Assemblée nationale a adoptée à une majorité absolue des élus de la nation. Auparavant, en conseil des ministres, avait été pris le décret sur l’installation de la Commission nationale du désarmement et celle chargée de la réinsertion des ex combattants. En quelque sorte les structures que l’Etat, dans le cadre de ses pouvoirs régaliens, devait instituer pour le bon démarrage du processus du DDR. Ces différentes actions sont posées par l’Etat au moment où, malgré la signature de l’accord d’Alger, l’on continuait encore d’enregistrer, sur le terrain, attaques, posent de mines et d’autres méthodes de défiances de l’Etat. Mais, ne dit-on pas qu’il n’y a pas de vent contraire pour qui sait où il va. IBK n’avait jamais de vu le port où il veut faire accoster le navire Mali.
CVJR, Gouvernement d’Union nationale…
Contrairement à ce qui était entendu de la bouche d’opposants, IBK n’a ni «perdu le nord», ni «passé à coté de son mandat dont le peuple l’a investi. Aujourd’hui, les faits lui donnent entièrement raison. Pour qui se souvient de la position extrémiste dans laquelle se trouvaient certains groupes armés, il était inimaginable cette situation où la plupart des leaders et chefs militaires de ces groupes armés viennent aujourd’hui à Bamako, y font le séjour qu’ils veulent et repartent sans être inquiétés ; la participation de ces ex rebelles au sein de la commission vérité justice et réconciliation constitue une autre avancée. Toutes ces choses ne sont pas tombées du hasard ; ce sont les résultats, les fruits d’un travail méthodique menés sans tambours, ni trompettes pour mettre en confiance des frères qui furent en brouille avec la patrie, mais qui n’en demeurent pas moins des nôtres. Souvenons qu’après Alger, il a fallu aussi passer par le processus d’Anefis, qui a été suivi du très controversé forum de Kidal, dont l’Etat qui a pris en charge le financement a été écarté. Toutes ces situations ne sont rien à coté de la paix que le peuple malien attend de tous ses vœux. L’entrée aujourd’hui des groupes armés dans le gouvernement, constitue dès lors un acte fort de normalisation…
Oumar Diamoye
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