Les forces armées maliennes sont devenues la cible privilégiée des groupes terroristes qui ont élu leur quartier général dans le septentrion malien. Face aux attaques répétitives de ces hommes sans foi ni loi, il est temps d’accélérer le processus de la réforme des forces de défense et de sécurité.
Il n’y a pas de temps à perdre. Il faut dire qu’au fil des années, l’outil de défense commun (l’armée nationale) a subi les ingérences répétées du pouvoir en place (politisation) et parfois l’indiscipline de personnes issues de ses propres rangs. Ce qui a fortement fissuré ses fondations. Ainsi, l’armée s’est immiscée à plusieurs reprises dans la vie politique. L’analyse de notre histoire récente, il ressort que pendant 44 ans (de 1968 à 2012), l’armée a toujours été au cœur ou a exercé la réalité du pouvoir. Ce sont les dysfonctionnements de l’institution qui ont érodé la cohésion de la grande muette et effrité les valeurs cardinales qui devaient la caractériser. Malgré le nombre de décès dans ses rangs suite aux attaques des jihadistes, l’on doit magnifier le loyalisme de l’armée qui a su jouer sa partition dans la défense de la République et la démocratie. La conclusion à tirer des récents évènements est que seule une armée républicaine, dont le rôle et la place sont définis, est à même de garantir la paix et la stabilité du Mali.
L’armée se doit de revisiter son histoire et de s’interroger sur son ancrage républicain dans un contexte de démocratie pluraliste. C’est fort donc de ce constat, au sortir du putsch de 2012, que la question cruciale de la réforme de l’armée se pose avec acuité.
Les grands axes de la réforme doivent être le fruit d’un travail collectif qui devra marquer définitivement le renouveau de la grande muette. L’armée ne peut être un acteur politique.
La question de sa dépolitisation est donc la première en ligne de mire de la réforme. Dans les démocraties modernes, l’armée est soumise au pouvoir civil et doit assumer la fonction que lui assigne la Constitution. Il s’agit de la défense de la patrie et sa pleine participation au développement économique du Mali. Face à ces réalités, les avancements devront être débarrassés des anciennes pratiques dans les passages de grades.
L’on doit faire en sorte que les questions de sanctions et d’avancements dans l’armée soient résolues sur des normes de qualité et de valeur et non sur des normes clientélistes, non conformes à la valeur militaire. Une chose est d’adopter une réforme à travers la Loi d’orientation et de programmation militaire (Lopam) et une autre est son application. Cette réforme aura sans nul doute des implications budgétaires et surtout institutionnelles. Une volonté politique forte mettant l’accent sur le renforcement des capacités opérationnelles des forces armées et la gestion efficace des ressources humaines permettront au Mali d’être à hauteur de mission face à la nouvelle menace du siècle, le terrorisme.
Paul N’GUESSAN